Macro-phone
Le 2 décembre 2011
Chronique de la vie d’un mac qui se rêve rappeur. Un film entre deux eaux, rude et violent, sauvé et plombé par son ambiguïté.


- Réalisateur : Craig Brewer
- Acteurs : Terrence Howard, Anthony Anderson, Taryn Manning
- Genre : Drame, Musical
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h56mn
- Date de sortie : 7 décembre 2005

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Chronique de la vie d’un mac qui se rêve rappeur. Un film entre deux eaux, rude et violent, sauvé et plombé par son ambiguïté.
L’argument : Memphis, en plein été, les rues pauvres, la chaleur, la sueur, les grosses bagnoles pourries et le rap. DJay, un maquereau, décide de se mettre au rap. Il compte sur ses proches et la prochaine venue en ville d’un ancien ami devenu célèbre. Il doit, pour cette occasion, enregistrer une démo...
Notre avis : Hustle and flow est un film qui ne se refuse aucune vulgarité, aucune violence verbale et physique pour mettre en scène la misère morale et matérielle de ses héros. DJay, son personnage principal (Terrence Howard, une des stars montantes du moment, vu dans Crash récemment), est un mac tout ce qu’il y a de plus minable, qui entretient ses "filles" à coups de biftons et de maximes faussement philosophiques. Un pauvre type, antipathique à souhait, frimeur, mais aussi paumé qu’il est puant. Le Memphis dans lequel il déambule, anesthésié par la chaleur, est à son image : noir, pauvre, camé et sans illusions. Personne ne s’y étonne de la prostitution. Le mac a pignon sur rue. Noir c’est noir, ça pue la sueur, les putes se font mettre enceintes, sont grasses aux cheveux gras, les clients sont moches. Réalistes, un poil tape-à-l’œil, les premières minutes de Hustle and flow ouvrent sur une "blaxpoitation" à la sauce cinéma indépendant plutôt réussie. Isaac Hayes est à la musique, John Singleton à la production, la machine est bien huilée.
Par le plus pur des hasards, DJay se retrouve en possession d’un synthétiseur, échangé contre une dose de coke (il est aussi dealer...). Commence une longue et pénible tentative de reconversion du deal vers le rap. Là encore, rien n’est rose. Les paroles du maquereau sont fichées explicit lyric, son premier morceau s’intitulant... "Claque cette pute". Cru. Mais c’est justement dans ce choix de ne pas céder aux politesses et à des sentiments faciles que Craig Brewer parvient à construire son film. Amour, violence, tendresse, les relations entre DJay et ses "filles" (une bande de trois paumées attachantes) sont à l’image du film, et sans concessions. DJay est un salaud au grand cœur, mais un salaud avant tout. Tous ceux qui gravitent autour de lui baignent aussi dans les faux-semblants.
La ligne de conduite du rappeur en herbe lui sera dictée par Key, son producteur : "Il y a ceux qui triment, et ceux qui friment." Hustle and flow, une heure durant, trime à merveille. La musique, si souvent violente et vulgaire soit-elle, sert alors le film à la perfection. Le souteneur, assis à l’église, écoutant un magnifique gospel, se met à pleurer. Ce sont ces moments-là qui ont fait de Hustle and flow un des succès du dernier Festival de Sundance. Malheureusement, à mi-chemin, la faute à une mise en scène de plus en plus tapageuse, la sale histoire passe du côté de ceux qui "triment" à celui de ceux qui "friment". Comme si la production indépendante réaliste glissait lentement vers le grand public, délaissant sa rudesse au profit d’un humour et d’un sens du spectaculaire superficiels.