Souvenirs d’un "keupon"
Le 25 juin 2003
Le parcours d’un jeune prolo anglais marqué par une musique de révolte. Bel hommage à la culture working class.
- Auteur : John King
- Editeur : Editions de l’Olivier
- Genre : Roman & fiction
- Nationalité : Anglaise
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Les rockers "cristallisent" sur l’été 1953 et les premiers enregistrements d’Elvis pour Sun Records, les hippies sur 1969 et le summer of love... Les punks, eux, font commencer l’Histoire en 1977, quand les refrains hargneux des Sex Pistols, Ruts, Slits et autres Clash, balancés sur des riffs dépouillés et rageurs, chassent Yes et Genesis des hit parades et invitent à l’émeute, la révolte, l’anarchie in the UK et partout ailleurs. Le majeur bien raide et un rictus aux lèvres.
Au-delà des accessoires de mode (épingle à nourrice, lame de rasoir, crête capillaire) et du marketing orchestré par les récupérateurs, le punk, "c’était d’abord une musique et des paroles qui nous parlaient de notre quotidien, en prise directe", résume Joe, jeune prolo anglais de la banlieue sud de Londres, quinze ans à l’époque de la déferlante qui va marquer sa vie : bière, speed, foot, amitié, filles (celles qui avalent et les autres), frustration, ennui, bandes, baston, école en forme d’impasse, travail de grouillot qu’on subit jusqu’au week-end, méfiance vis-à-vis des pouvoirs qui mentent et qui enchaînent, exaltation d’une culture populaire et d’une solidarité communautaire qui résistent tant bien que mal au karcher du libéralisme thatchérien et au dissolvant douceâtre du blairisme.
Déjà remarqué pour sa trilogie sur les hooligans [1], John King s’inscrit dans une tradition britannique de célébration de la working class qui comprend non seulement des écrivains (Orwell, Alan Silitoe, John Bailey et plus récemment Irvine Welsh ou Jo-Ann Goodwin) mais aussi des musiciens (depuis la pop acerbe des Kinks aux élucubrations hébétées des Happy Mondays, en passant, bien sûr, par la fulgurance du punk). Une tradition où l’instinct de classe devient parfois sectaire (certains développements sociopolitiques de King ne brillent pas par leur subtilité, surtout quand il s’éloigne de ce qu’il connaît vraiment) mais où le
"réalisme" n’exclut pas quelques bouffées de poésie : le miroitement de l’essence à la surface d’une flaque, la chaleur d’une chope de thé cueillie comme un ciboire, la douceur amniotique du canal deserté où l’on vient s’immerger, se réancrer... Retour aux sources.
John King, Human punk, Editions de L’Olivier, 2003, 480 pages, 22 €
[1] Football Factory, Headhunters, England Away, dont les deux premiers ont été traduits en français
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