Le canasson du cauchemar
Le 9 mars 2015
Une micro production de genre française qui ne s’interdit pas l’audace et réussit à se démarquer de par son atmosphère particulièrement envoûtante.
- Réalisateur : Romain Basset
- Acteurs : Katherine MacColl / Catriona MacColl, Philippe Nahon, Lilly-Fleur pointeaux, Murray Head, Fu’ad Ait Aattou
- Genre : Fantastique, Épouvante-horreur
- Nationalité : Français
- Durée : 1h32mn
- Titre original : Fièvre
- Date de sortie : 11 mars 2015
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Une micro production de genre française qui ne s’interdit pas l’audace et réussit à se démarquer de par son atmosphère particulièrement envoûtante.
L’argument : Depuis son enfance, Jessica est hantée par des cauchemars récurrents dans lesquels elle est poursuivie par une mystérieuse créature à tête de cheval appelée Horsehead. Dans l’espoir de retrouver la paix, Jessica a entamé des études de psychophysiologie des rêves. Suite au décès de sa grand-mère maternelle, Jessica est contrainte de retourner dans la maison familiale. A son arrivée, elle découvre que son aïeule défunte reposera dans la chambre mitoyenne de la sienne durant la veillée mortuaire…Après une première nuit agitée par un nouveau cauchemar, Jessica tombe subitement malade. Clouée au lit par une forte fièvre, la jeune femme décide d’utiliser son état léthargique pour expérimenter le rêve lucide et essayer ainsi de prendre le contrôle de ses cauchemars, une pratique dangereuse dont certains ne se remettent jamais. Jessica évolue alors dans son propre monde onirique. Elle mène l’enquête afin de découvrir le mal qui la ronge elle et sa famille depuis des générations. Elle devra aussi affronter une dernière fois le maléfique Horsehead.
Notre avis : À l’heure où la position du cinéma de genre en France se fait de plus en plus marginale, le cran dont fait preuve le jeune réalisateur Romain Basset pour accoucher d’un tout premier long métrage fantastico-horrifique au budget dérisoire se salue bien bas. Un projet monté avec les difficultés que l’on rencontre d’ordinaire sur le marché hexagonal pour ce type d’œuvres, communément mal-aimées par les exploitants, les producteurs et le public. Et malgré les nombreux obstacles dressés sur sa route, Romain Basset aura su se démener tout en faisant preuve d’intégrité pour créer un film d’atmosphère résolument envoûtant, incarné par une imagerie sous l’emprise d’un esprit gothique anglais de souche, baroque, et rendant un hommage vénérable aux maîtres du cinéma de genre italien (parmi lesquels : Argento, Bava et bien sûr Fulci). Dans cet esprit, on peut le rapprocher des dernières livraisons du duo Hélène Cattet/Bruno Forzani (Amer, L’étrange couleur des larmes de ton corps) fasciné lui aussi par tout un pan du cinéma de genre transalpin.
Ce n’est donc pas un hasard si l’on retrouve Catriona MacColl, l’icône du gore italien des années 80 chère à Lucio Fulci (Frayeurs et L’au-delà), en tête d’affiche, aux côtés de Murray Head (le chanteur de One night in Bangkok, acteur dans Un dimanche comme les autres), pour donner la réplique à Lilly-Fleur Pointeaux dont la prestation révèle une fragilité et un charme rappelant celui de la belle américaine Maika Monroe (parfaite dans le premier rôle de It Follows, tout juste auréolé du Grand Prix au dernier festival de Gérardmer). Tourné en langue anglaise dans un soucis de distribution hors de nos frontières, Horsehead (initialement baptisé Fièvre) s’essaye à faire vivre au spectateur une expérience ensorcelante et viscérale autour du rêve lucide. Un pari osé, en bonne partie remporté grâce à des phases de songes cauchemardesques qui condensent quelques jolis instants de grâce à l’écran. La réalisation nous fait ainsi profiter d’une ambiance à la beauté plastique vénéneuse, magnifiée par nombre de plans subtilement découpés, et par un travail sur les lumières apte à faire naître un cortège de séquences fantasmagoriques comme suspendues dans le temps. Visuellement Horsehead possède du style, c’est une évidence.
Au rang des choses un peu plus désagréables, on signalera des enjeux émotionnels restreints qui peuvent tenir à distance mais surtout un équilibre narratif un peu trop flottant à notre goût. L’alternance entre le rêve et la réalité s’opère parfois au détriment de la tension du récit.
Le film prend son temps pour nous narrer le drame intime d’une jeune héroïne (Lilly-Fleur Pointeaux) qui doit percer un douloureux secret familial remontant à plusieurs générations. Entre les non-dits qui attisent les rapports conflictuels avec sa mère (Catriona MacColl) et la prise de contrôle de ses rêves dans un état semi conscient, le danger rôde, incarné par une oppressante créature à tête de cheval. Une figure symbolique du "messager de la mort/guide vers l’au-delà" que Basset utilise à bon escient afin de déboucher sur une révélation finale intéressante à plus d’un titre (le sujet de la maternité malaisée s’en détache avec une profondeur insoupçonnée).
On retiendra également le travail fort louable sur les effets spéciaux de Jacques-Olivier Molon (créateur du monstre chevalin) et David Scherer (la scène de crucifixion sanglante très réussie) pour permettre l’aboutissement visuel de Horsehead.
Au final, ce passeport pour un univers onirique captivant et viscéral, à la poésie palpable, opère son entreprise de séduction en dépit d’un équilibre narratif parfois précaire. Romain Basset mérite davantage de moyens pour mettre en oeuvre toutes ses ambitions. On lui souhaite la réussite pour qu’il puisse progresser dans un genre qui lui va si bien.
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