Le 12 octobre 2015
Héritages offre une plongée introspective dans le Liban d’antan et d’aujourd’hui par le prisme de l’exil. Un film sur la résilience qui ne convainc pas totalement.
- Réalisateurs : Philippe Aractingi - Philippe Aractingi
- Genre : Documentaire
- Durée : 1h28mn
- Titre original : Mirath
- Date de sortie : 28 octobre 2015
L'a vu
Veut le voir
Profondément marqué par les guerres successives au Liban, Philippe Aractingi évoque l’exil en se replongeant dans les archives familiales. Si Héritages réussit, par moments, à nous toucher, le manque de distance critique lui fait perdre de vue son sujet initial : la transmission.
L’argument : En fuyant une nouvelle fois le Liban en juillet 2006, le réalisateur Philippe Aractingi prend conscience que, comme lui, ses ancêtres fuient depuis cinq générations les guerres et les massacres. Dans une fresque où se croisent avec légèreté photos, archives, et mise en scène ludique où il intègre ses enfants, il entreprend le récit des pérégrinations de sa famille à travers le Levant. Un film sur l’exil, la mémoire et la transmission, plein d’émotion et d’honnêteté.
Notre avis : Le titre du film recèle bien des promesses. Le réalisateur a choisi un pluriel : Héritages. Il s’agit pour lui de revenir sur son enfance, et donc sur l’histoire qui lui a été léguée par ses grands parents, mais aussi de transmettre ses souvenirs à ses propres descendants. Comment évoquer la mémoire ? Comment parler des événements passés qui ont été fondateurs dans la vie d’un enfant ? Comment raconter la douleur de l’exil ? Ces questionnements sont à l’origine de ce récit autobiographique. Philippe Aractingi n’a cessé de quitter le Liban, le pays dont il est originaire, et d’y revenir dans un mouvement obsessionnel. C’est là-bas qu’il s’est essayé à la photographie et au documentaire. Héritages raconte les exils successifs de sa famille sur quatre générations. Le film débute sur une suite de photographies des trois enfants du réalisateur, à la manière de diapositives. Boulimique d’images, il n’a cessé de photographier le quotidien de sa vie de famille dans une sorte de course contre le temps. L’influence de Boris Cyrulnik est prégnante. Il s’agit pour Aractingi de contourner le traumatisme passé par le médium cinématographique. Et c’est là la limite de son projet.
La démarche est noble et l’entreprise sûrement nécessaire pour celui qui en est l’initiateur. Néanmoins, le film reste clos sur lui-même. Les pensées du réalisateur, souvent autocentrées à défaut d’être autocritiques, se résument à des idées fixes. Une scène illustre particulièrement cet écueil. Le réalisateur est attablé avec ses trois enfants au Liban et leur présente ses jouets de guerre : douilles, explosifs etc. L’aîné est vraisemblablement mal à l’aise devant ce père qui n’hésite pas à détailler la fonction de chaque arme à feu. Ce moment de tension aurait pu déboucher sur une vraie confrontation entre deux générations qui ne perçoivent pas Liban de la même façon en raison même de leur héritage divergeant. Au lieu de cela, le réalisateur semble contourner la difficulté provoquée par la situation en martelant qu’il est important de connaître le passé de ses parents. Pour lui peut-être mais qu’en pensent ses propres enfants ? Ont-ils eux aussi l’envie et le désir de comprendre les ressorts de la vie de leur père ? Nous ne le saurons pas.
Les nombreux dispositifs de mise en scène qui multiplient les images comme pour mieux rendre compte de la parcellisation de la mémoire, contournent, là aussi, le point central du film. Le réalisateur utilise d’une manière redondante le cadre dans le cadre et la mise en abîme. Il se filme en train de filmer, capte un instant de conversation sur skype en enfermant sa femme dans la fenêtre de l’ordinateur. Il projette des images d’archives sur un fond vert évoquant le Liban d’antan et les fait coïncider avec le présent en faisant jouer son propre rôle à son fils aîné. Le problème c’est que l’utilisation de ces éléments, initialement intéressants, ne débouche sur aucune réflexion autour de la mémoire et de la reconstitution du passé.
Si certaines scènes fonctionnent - belle séquence de repas entre le réalisateur et sa mère qui ne comprend pas l’obsession de son fils à vouloir remuer le passé - le film semble ne jamais dépasser le stade de l’émotion pour procéder à une analyse critique.
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.