Le 3 avril 2015
Une petite perle du cinéma britannique, aussi drôle que corrosive.
- Réalisateurs : John Boulting - Roy Boulting
- Acteurs : Peter Sellers, Cecil Parker, Isabel Jeans, Bernard Miles, Ian Carmichael
- Genre : Comédie
- Nationalité : Britannique
- Editeur vidéo : Tamasa
- Durée : 1h45mn
- Date de sortie : 23 mai 1963
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– Sortie DVD : le 7 avril 2015
ne petite perle du cinéma britannique, aussi drôle que corrosive.
L’argument : Un aumônier de prison, un peu naïf mais bienveillant, est nommé pasteur à la place d’un ecclésiastique de la haute société. Sa croyance reposant sur le pardon et la charité, le met en contradiction avec les habitants de la ville. Toutes ces bonnes œuvres vont engendrer des complications…
Notre avis : Heavens above, Le Ciel vous regarde en français, tient du jeu de massacre ; en introduisant dans une petite bourgade anglaise un pasteur à part, les scénaristes tirent à vue sur les institutions : l’église, bien sûr, avec ses évêques frileux et amateurs de luxe (Ah ! Le repos sur un yacht, avec le soleil qui caresse la peau !), mais aussi les politiques, la presse, les industriels… Tout le monde en prend pour son grade, dans cette fausse gentille comédie qui ne ménage personne. Car les gens, grands et petits, n’en sortent pas davantage indemnes. De la famille Smith, tout droit échappée de Affreux, sales et méchants, à la riche Mme Despard qui réchauffe son chien sous une couverture électrique, tous sont veules, stupides, et, quand les choses tournent mal, le racisme et la haine de l’autre font surface. John Smallwood, le pasteur, sert de révélateur à cette société, qui « préfère le profit aux prophètes » ; car au fond, c’est bien à une attaque en règle du capitalisme que se livre le film. Un monde de rapaces, où chacun tire comme il peut son épingle du jeu, par la ruse, le vol, ou les aides de l’état.
Si personne n’est épargné, le scénario s’ingénie à multiplier les angles d’attaque : le rire de Peter Sellers en lisant la presse (et des deux journaux qui lui sont présentés il dit : « c’est du pareil au même ») suffit ; l’allusion est parfois très subtile : au bedeau noir, une dame reproche d’être « illettré, entre autres choses ». Au contraire les boulets rouges qui visent l’église, l’industrie ou les politiques se développent tout au long du film. Mais dans tous les cas, les dialogues sont un régal absolu, fins et amusants. On pourrait multiplier les exemples de cet humour satirique à la saveur délicate.
La première fois que le pasteur apparaît, il est ligoté sur une chaise. À la fin, en un subtil retournement, c’est lui qui attachera l’astronaute – et là encore, on pourrait dénombrer maints échos ménagés par les scénaristes. Dès le début donc, Smallwood est une victime ; c’est aussi un personnage décalé qui arrive et repart en benne à ordures, tombe dans un trou, subit la pluie sans fin. À ce titre il n’est pas très loin du personnage de The Party, tourné à la même époque. Comme lui, plus que lui, il veut bien faire, ou plutôt faire le bien, dirigé par une lecture littérale de la Bible. Mais ce proche de L’Idiot de Dostoïevski ne comprend pas que l’époque contemporaine ne permet pas cette lecture. L’évêque lui reproche même de citer la Bible à tout bout de champ ! On pense encore à Dostoïevski, mais aux Frères Karamazov cette fois : si Jésus revenait, l’Église, non seulement ne le reconnaîtrait pas, mais encore elle le renierait. Sinistre constat qui commence dès le début du film, où, en quelques plans, la perte de spiritualité est dénoncée. Dans ce monde vendu au profit, il n’y a pas de place pour un naïf généreux. Ainsi sa belle tentative avec Mme Despard est-elle vouée à l’échec : donner dans un univers de commerce ne peut aboutir qu’à l’émeute et la révolte. Au passage le film nous donne une version amusée d’ Europe 51 de Rossellini.
Heavens above, malgré une réalisation trop souvent fonctionnelle, est un plaisir de chaque instant. La finesse des dialogues comme celle du jeu – quels acteurs, de Sellers au moindre second rôle ! - sont au service d’une construction implacable, fondée sur l’enchaînement : tout événement devient une cause, qui va aboutir à une conclusion inattendue et pourtant parfaitement logique. Jusqu’à l’absurde : quand Smallwood n’a plus sa place sur terre, on l’expédie dans l’espace.
Un DVD correct pour ce petit bijou d’humour anglais.
Les suppléments :
Comme pour les autres DVD de cette collection, un livret de 12 pages, signé par Charlotte Garson, développe une analyse très fine et complète. Une galerie de photos et des filmographies complètent les bonus.
L’image :
Globalement, la copie est bonne, malgré quelques plans aux parasites apparents.
Galerie Photos
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