Le 20 février 2023
Comédie subtile sur la réunification de l’Allemagne, Good bye Lenin ! est aussi, en filigrane, la chronique doucement mélancolique d’une génération qui a cru aux vertus du socialisme, derrière le rideau de fer.
- Réalisateur : Wolfgang Becker
- Acteurs : Daniel Brühl, Katrin Sass, Chulpan Khamatova, Florian Lukas, Maria Simon
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Allemand
- Distributeur : Océan Films
- Durée : 1h50mn
- Date télé : 20 février 2023 20:50
- Chaîne : Arte
- Date de sortie : 10 septembre 2003
Résumé : Alex, un jeune Berlinois de l’Est, apprend la chute du mur alors que sa mère est dans le coma à la suite d’un infarctus. Celle-ci a toujours été quelqu’un d’actif, participant avec enthousiasme à l’animation d’une chorale. Les mois passent et le coma continue. La ville se transforme, les voitures occidentales sillonnent les rues, les publicités envahissent les murs. Au bout de huit mois, elle ouvre les yeux dans une ville qu’elle ne peut plus reconnaître. Alex veut absolument lui éviter un choc brutal que son cœur affaibli ne pourrait supporter. Profitant de son alitement, avec l’aide de sa famille et de ses amis, il reconstruit autour d’elle son univers familier, convoque les jeunes chanteurs de la chorale, sollicite l’aide d’un ancien cosmonaute, reconverti en chauffeur de taxi, et s’efforce de faire revivre la RDA dans les 79 m² de l’appartement, remis aux normes socialistes.
Critique : Good bye Lenin ! mélange astucieusement la grande Histoire et le drame intimiste. Cette association ne fonctionne pas toujours, loin s’en faut. Mais ici, elle est au service d’une bonne cause, si l’on peut dire, puisqu’il s’agit de préserver une valétudinaire du choc que constitue un bouleversement politique. Le long métrage parvient à trouver la note juste entre l’émotion et la satire : ainsi, jamais l’amour filial à l’origine d’un mensonge soigneusement organisé, ne se dégrade en mélodramatique manifestation de tendresse. Pas plus qu’Alex ne s’épanche de manière outrancière, sa mère ne laissera l’émotion briser le cercle vertueux des affections tacites, comme le prouve le sourire entendu et bienveillant qu’elle adresse à son fils, à la fin du film, lorsque le mensonge n’est plus qu’un secret de polichinelle.
La duperie altruiste, dont le caractère éphémère saute aux yeux dès le début, assure en douceur une transition qui vaut aussi pour une génération -d’une certaine manière- orpheline d’un monde auquel elle a cru, biberonnée par une propagande que le pastiche des actualités est-allemandes rend très prégnante, même si l’imitation s’infléchit et fantasme un modèle de pays jamais advenu. À aucun moment, le réalisateur ne donne l’impression de tourner en dérision les idéaux déçus d’une population soudainement passée du côté des démocraties libérales. S’il s’accommode d’un scénario de comédie, le film est aussi le portrait d’une jeunesse, qui vit l’entre-deux, certes débarrassée d’une dictature, mais également confrontée au désarroi suscité par ce que l’intellectuel Francis Fukuyama nomma à l’époque « la fin de l’Histoire », actant le triomphe du néolibéralisme, sans autre alternative. La musique de Yann Tiersen prolonge cette impression, donnant à ce printemps de la liberté des couleurs bien plus automnales qu’il n’y paraît, conférant au temps qui passe une dimension réellement proustienne, dans sa manière très soucieuse de documenter des biographies individuelles.
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
elodieoulisa 26 avril 2007
Good bye Lenin ! - la critique du film
"Queen"
Good bye Lenin est multiple. C’est d’abord et avant tout une histoire d’amour entre une mère et son fils, ou plutôt l’amour d’un fils pour sa mère. Cette dernière, pro-communiste dans une Allemagne de l’Est dirigée par l’idéologie de l’URSS, consacre sa vie à cet idéal de l’Est. C’est surtout pour elle un exutoire à l’abandon de son mari, qui a fui sans femme et sans enfants, vers l’Ouest.
Mais les temps changent. La jeunesse commence à s’affrancir de l’idéologie communiste et rêve d’une ouverture et d’une fraternisation avec l’Ouest. Le fils en fait partie. La mère l’apprend et tombe dans le coma.
Pendant ce temps, l’Histoire continue. L’Allemagne est réunifiée. Lorsque la mère se réveille, le fils décide de lui offrir son rêve. Une Allemagne de l’Est accueillant l’Ouest et non l’inverse. Avec plein de petites choses, petits détails (comme la fabrication d’un journal télévisé hyper kitsh mais tellement vrai), de petites anecdotes à la Amélie Poulain, le fils rembobine le fil de l’Histoire par amour pour sa mère.
Mais ce film est aussi l’image de la fin d’une époque, d’une utopie, d’un rêve, où il faut dire au revoir à Lenine pour mieux saluer le capitalisme, la modernité.
Une très belle leçon d’Histoire détaillée et romancée, juste pour sourire, pleurer, et découvrir que la réunification a pu, comme le mur de Berlin, infliger des blessures intimes à ce pays voisin qu’est l’Allemagne.
puremorning 27 avril 2007
Good bye Lenin ! - la critique du film
« Queen »
1989 : chute du mur de Berlin, symbole du bloc soviétique qui s’écroule. Avec le communisme, c’est la RDA qui implose, l’Histoire (avec un grand H) change.
Au même moment, une petite histoire se déroule : Alex, un ado berlinois, apprend que sa mère a subi un infarctus. Elle reste dans le coma, ignorant tout de la révolution en marche. A son réveil, quelques mois plus tard, Alex veut éviter le choc brutal du changement à cette petite main communiste convaincue, dont l’une des activités principales est la sacro-sainte lettre au Parti. Il va donc travestir l’Histoire en montant toute une mise en scène autour du lit de la convalescente : Non, comme la guerre de Troie selon Giraudoux, la chute du mur de Berlin n’a pas eu lieu !
Porté par scénario astucieux, « Good bye Lenin » est une comédie allemande à l’italienne (oui, oui !), toute en subtilités et en décalage. Doux-amer, le film se déroule au rythme de la mère, tranquillement. La réalisation est efficace, au service d’une histoire suffisamment riche pour éviter les effets.
Il eût été si facile de cogner au burin sur un régime disparu. Il eût été si convenu de fabriquer un manifeste de ses mille turpitudes. Loin de ce manichéisme, Wolfgang Becker s’intéresse à ses personnages sans les juger. Cà et là perce même une certaine tendresse, comme dans la rédaction de ces fameuses lettres au Parti Communiste où le ridicule côtoie un dévouement et un engagement touchant.
Au-delà des symboles, Becker raconte aussi une jeunesse - celle d’Alex, entre militantisme politique, rencontres amoureuses, absence du père - une vieillesse - celle de la mère, entre maladie et convalescence, entre rêve et désillusion - et surtout, une relation mère-fils bouleversante.
La distribution est remarquable, Daniel Brühl et Katrin Sass en tête. Les acteurs n’en font jamais trop et c’est tant mieux.
On connaissait l’amour qui soulevait des montagnes, « Good bye Lenin » donne à voir un amour qui rebâtit les murs ! A voir.