Le 24 octobre 2021
Un joyau de tendresse familiale qui raconte autant l’émancipation de femmes que celle tout un pays, Haïti, soumis à la corruption et la pauvreté endémique.
- Réalisateur : Gessica Geneus
- Acteurs : Fabiola Remy, Djanaïna François, Néhémie Bastien
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Béninois, Haïtien
- Distributeur : Nour Films
- Durée : 1h33mn
- Date télé : 10 juin 2024 23:04
- Chaîne : TV5 Monde
- Date de sortie : 13 octobre 2021
- Festival : Festival de Cannes 2021
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Résumé : Freda habite avec sa mère et sa soeur dans un quartier populaire de Port-au-Prince. Face aux défis du quotidien en Haïti, chacune se demande s’il faut partir ou rester. Freda veut croire en l’avenir de son pays.
Critique : Freda, c’est le prénom d’une ancienne déesse Vaudou. Du haut de sa vingtaine d’années, elle cherche à trouver un souffle de liberté dans son pays, Haïti, qui peine toujours à se redresser d’années de dictature et de catastrophes climatiques. Elle voudrait être libre, épanouie, légère surtout, dans une nation ravagée par la corruption, la brutalité policière et la désertion des jeunes vers un ailleurs plus enchanteur. Gessica Généus s’attache dans cette première œuvre de cinéma à parler de son rapport au pays dans les traits de cette jeune-fille, Freda, qu’elle présente comme l’emblème d’une génération capable de rendre l’espoir à des milliers de jeunes gens qui vivent leur destin comme une impasse. S’il s’agit d’un sujet périlleux aux accents mélodramatiques, la réalisatrice parvient avec brio à échapper à la caricature. Elle mélange son récit d’extraits de documentaires télévisés où l’on voit la jeunesse haïtienne courir dans les rues et se faire tirer dessus ou gazer. Ce péril jeune pour reprendre le titre de Klaplisch se débat avec des idées révolutionnaires, regrettant presque le règne proprement dramatique de Duvalier. Seule Freda garde la tête haute, jamais dupe qu’une dictature en chasse souvent une autre dans ces pays qui se redressent difficilement d’années de domination occidentale.
- Copyright Nour Films
Le destin de Freda est intimement noué avec sa famille. Il y a d’ailleurs dans la représentation de cette cellule familiale quelque chose de très durassien. La mère est en effet prête à toutes les compromissions, pourvu que son fils puisse obtenir l’argent qui lui permettra de quitter Haïti. Elle accepte les yeux fermés que sa fille cadette offre son corps et sa jeunesse à des hommes riches, au mépris de sa liberté. Seule Freda résiste au déterminisme social et familial. Elle s’accroche aux études universitaires et hésite à suivre son amant dans son projet migratoire. Car Freda aime son pays. Elle est attachée à sa famille, au petit magasin alimentaire où elle vit avec sa mère, et à l’idée qu’un jour, elle aussi trouvera la solution pour sortir de la pauvreté. Elle refuse les mariages arrangés ou les relations intéressées avec des hommes riches, au contraire de sa sœur qu’elle ne parvient pas à protéger de ses dérives sentimentales et sexuelles.
- Copyright Nour Films
Le cinéma haïtien est rare. Les images qu’on en connaît sont souvent celles de l’actualité. Ici la fiction fait honneur aux femmes. Même la mère dont on perçoit qu’elle est ravagée par une maladie mentale qui ne dit pas son nom, incarne une figure de liberté se pliant à l’ironie et au sarcasme et s’empêche de regarder la réalité. La bande-son qui accompagne le récit apporte aux personnages féminins une hauteur supplémentaire. L’émotion recherchée par Gessica Généus refuse la facilité dramatique. La mise en scène se plaît à valoriser la beauté presque magnétique de la jeune héroïne qui se transforme en un exemple de féminité et de grâce. Dans ce pays où les femmes sont obsédées par le blanchissement de la peau, Freda, au contraire, incarne la fierté d’être noire, libre et intelligente. C’est peut-être le signe que le déterminisme tiers-mondiste est une vision réactionnaire d’un temps passé et que la liberté s’incarnera dans les traits de ces gamines intrépides, certaines de leur pouvoir d’agir dans la société.
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