Le 19 novembre 2018
Une exposition immersive, parfaitement orchestrée.
- Plus d'informations : Le site officiel
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Résumé : Le musée de l’Orangerie nous offre une exposition retraçant l’œuvre de l’artiste figurative portugaise Paula Rego, peintre et sculptrice, révélée au Royaume-Uni dans les années 60. Son parcours chronologique et créatif se déploie dans une scénographie mêlant tableaux, sculptures et installations, ponctuées d’œuvres d’artistes amis ou résonnant avec les thèmes développés.
Notre avis : Qu’on ne s’y trompe pas ! Ceux qui voudront revivre dans cette exposition la magie de l’enfance et son cortège de souvenirs attendris n’y trouveront pas leur compte.
Ici pas de morale manichéenne, pas d’enseignement de la vertu et de ses douceurs. C’est à un théâtre d’âmes tortueuses auquel nous propose d’assister l’artiste. Une représentation crue, puissante, parfois cauchemardesque de la vie quotidienne de l’enfance à la vieillesse. Une traversée intime des époques crises politiques, guerre et mutations profondes de la société, vécues par cette grande dame de 83 ans.
Paula Rego sait raconter par un seul regard, les sentiments profonds, joie, rancœur, regret, alors même qu’ils sont masqués par une expression de façade sage. Cette complicité avec les personnages rend l’œuvre profondément narrative, mêlant les histoires du sujet, de l’artiste, de l’observateur.
Si dans de nombreux tableaux la rigueur d’un environnement où doit régner l’ordre et la mesure, est prégnant, l’histoire bascule très rapidement. Tout devient dérangé, décalé, dérangeant. Les enfants ont des visages d’adultes, les personnages sont parfois psychédéliques, effrayants (l’homme polochon ou les mises en scène). La vie réelle flirte avec la vie fantasmée portée par la symbolique et les références aux contes. Tout est mis en doute.
Affiche de l’exposition - Crédits : Private Collection / Bridgeman Images
La série Pinocchio est particulièrement déstabilisante. Paula Rego nous donne à voir un enfant diabolique au regard sadique, une fée bleue presque menaçante après d’un Pinocchio fragilisé dans sa nudité d’enfant. Que chuchote la fée à l’oreille de sa créature ? La prévient-elle de la dureté du monde, lui demande-t-elle d’accomplir une œuvre maléfique ? Est-il son ange démoniaque, qu’elle initie ?
Au-delà du récit c’est la matière qui nous avale : la craie épaisse, la couleur dense et vive, le trait noir qui renforce la présence du personnage, nous donnent l’impression de travailler la toile avec l’artiste. Dans cette exposition sanguine, tout est force vive. Quelques eaux fortes, gravure faites d’aplat et de traits dignes des bandes dessinée rappellent la richesse créative de l’artiste et la diversité de styles qu’elle peut épouser.
Dans la série « les autruches dansantes » (références à Fantasia de Walt Disney) les visages de femme sont durs et leur corps presque masculin. Quel contraste avec la collection Walter et Guillaume exposée dans les salles voisines, où les femmes sont passives, nuageuses, opalines. Chez Paula, elles sont le cœur du sujet et pas une nature morte. Le contraire de la sylphide fantasmée de Marie Laurencin. La femme semble omniprésente, omnipotente. L’homme reste d’ailleurs peu représenté, figurant, objet plus que sujet, voire pire, marionnette ou poupée.
Dans cette exposition, l’artiste s’impose comme centre de son œuvre en tant que femme, avec en point d’orgue, « Painting him out », représentation de l’artiste à tous ses âges, dans tous ses rôles.
Exposition du 17 octobre 2018 au 14 janvier 2019
Commissaire d’exposition : Cécile Debray, conservateur en chef, directrice du musée de l’Orangerie
Galerie photos
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