Le 4 mai 2014
- Réalisateur : Philippe Muyl
Entretien avec Philippe Muyl, cinéaste humaniste, conteur du vingt-et-unième siècle et réalisateur du film Le promeneur d’oiseau.
Entretien avec Philippe Muyl, cinéaste humaniste, conteur du vingt-et-unième siècle et réalisateur du film Le promeneur d’oiseau.
avoir-aLire : La genèse du long-métrage Le promeneur d’oiseau trouve ses racines dans le succès monumental de l’un de vos précédents films : Le papillon. Comment ce nouveau projet s’est-il imposé à vous ?
Philippe Muyl : En 2002, Le papillon est sorti en chinois à Taïwan. Il a immédiatement été copié en dvd pirate de façon quasi-industrielle et mis en ligne sur différents sites de streaming internet. Etant donné qu’il a été vu par près de quinze millions de personnes, je pense que je peux affirmer être une heureuse victime du piratage ! Si les choses ne s’étaient pas déroulées ainsi, je n’aurais peut être pas réalisé Le promeneur d’oiseau.
Puis, en 2009, lors d’un festival à Pékin, j’ai rencontré un couple de producteurs qui m’a orienté sur ce projet. A l’époque, les jeux n’étaient pas faits ! Comment serait-il possible pour un réalisateur français en Chine de tourner un film chinois, avec des acteurs chinois.... Finalement, j’ai accepté ce challenge fou, et je me suis lancé dans cette aventure déraisonnable.
Comment expliquer ce succès phénoménal en Orient ?
Je ne l’ai toujours pas compris... Ceci dit, il me semble que ce qui a touché le public chinois c’est la mise en scène d’un modèle social très répandu en Asie. On observe beaucoup dans les parcs et les rues de nombreuses personnes du troisième âge avec leurs petits enfants. D’autant plus qu’est exercée en Chine la politique de l’enfant unique !
Un temps, nous avons envisagé de faire un remake du film Le papillon. Mais je n’en avais pas envie. Malgré cela, nous nous sommes appuyés sur plusieurs générations opposées : le grand-père, la petite fille, et le couple moderne en proie à des problèmes relationnels et perdus dans leur quête de richesse.
Pourquoi avoir choisi le thème du conflit générationnel ?
Je pense que ce qui me touche, c’est la facilité avec laquelle les gens se séparent aujourd’hui. Les gens sont absorbés par leur travail. La quête effrénée de réussite sociale, notamment en Chine, annihile toute forme de communication. C’est désolant.
Il se dit qu’on ne peut pas faire un film avec de bons sentiments. Je ne suis pas d’accord ! On ne peut pas faire de film sans qu’il y ait de conflits, mais il ne s’agit ici que de tension dramatique. Laissez-moi prendre l’exemple de la relation père-fils qui est mise en scène dans Le promeneur d’oiseau. En France, lorsqu’il y a un souci de famille, on s’explique, on crie, on s’empoigne par le col de la veste ! En Chine, tout reste dans le non-dit.... C’est assez difficile à gérer dans un film.
© Envisions Films
Comment appréhender une oeuvre dont le tournage s’est déroulé dans un pays au régime si controversé en Occident ?
Il n’est pas exclu que certaines critiques me reprochent d’être trop doux. Mais je ne me suis pas forcé ! Je ne fais pas de la politique, mais bien du divertissement. Pour autant, le film n’est pas vide de sens. J’estime montrer ce que la société chinoise a de compliqué, contrasté, injuste. Mais je ne le montre pas du doigt. J’ai toujours eu ma ligne de conduite. Que ça plaise ou non, c’est ce que je fais, et je ne sais pas faire autre chose.
Le promeneur d’oiseau témoigne d’une structure de narration très occidentale. Etait-ce un exercice contraignant ?
Effectivement, il s’agit d’un film chinois, fait par un français, avec une narration occidentale. Cela permet à un public non chinois de suivre l’histoire, c’est une carte pour mieux comprendre le film. Pour le moment, nous avons eu de bons retours suite aux projections à Pékin. Mais il est vrai que c’est un jeu d’équilibre...
Le promeneur d’oiseau met en scène une certaine culture du récit initiatique. C’est un voyage extérieur et intérieur qui altère celui qui l’éprouve. Je ne réalise pas de films réalistes, mais je réalise des fables. C’est occidental dans sa linéarité, et pourtant c’est un conte. Je pense que les spectateurs sont des enfants auxquels il faut raconter des histoires !
Qu’est-ce qui fait l’unicité du film ?
C’est un film chinois pour deux publics. Au public français, qui ne connaît de la Chine que la pollution, les révoltes dans les usines et troubles gouvernementaux, il montre une autre facette du pays : les paysages magnifiques, les paysans accueillants...
Au public chinois, il pose une nouvelle fois la question de l’équilibre. Celui entre la modernité, la construction effrénée et le respect de la nature.
La critique du film : ICI
Galerie Photos
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.