Le 28 août 2015
- Acteur : Geraldine Chaplin
Les Dollars des Sables nous a passionnés. L’adaptation du roman de Jean-Noël Pancrazi nous a permis de rencontrer Géraldine Chapline, actrice intemporelle, qui a traversé les époques, et qui a encore tant à nous offrir. Rencontre avec un mythe.
Nous avons rencontré Géraldine Chaplin lors du D8-Festival Espagnol qui s’est tenu à Paris en juin, au Louxor. L’actrice à la filmographie de 130 titres n’était pas seulement venue présenter son dernier film, Les dollars des sables , réalisé par le duo Israel Cárdenas et Laura Amelia Guzmán, mais bel et bien nous parler de ce qui, à ses yeux, est l’oeuvre qui lui tient le plus à cœur, de toute sa carrière. Nous avons eu l’immense plaisir de partager ses impressions et confidences dans un espagnol presque parfait !
aVoir-aLire.com : Félicitations Géraldine pour votre interprétation dans Les Dollars des sables. C’est une œuvre dure et actuelle, particulièrement bien ancrée dans la réalité sociale dominicaine. Qu’est-ce qui vous a attiré dans ce projet et vous a fait accepter le rôle d’Anne, cette Occidentale qui vient trouver l’amour dans les bras d’une jeune prostituée qui cherche à quitter le pays ?
Géraldine Chaplin : J’ai été fascinée par les réalisateurs. Quelle chance de pouvoir travailler avec eux ! Je n’y m’attendais pas ! J’avais parlé à tout le monde de leur film Jean Gentil, une histoire terrible, très triste que j’avais adorée. Laura Amelia Guzmàn et Israel Cárdenas m’ont appelée pour qu’on travaille ensemble. Ce fut un vrai cadeau tombé du ciel. (Elle tourne son regard vers le plafond en souriant).
Ensuite on a commencé à peaufiner le personnage d’Anne, à faire des répétitions. On a eu beaucoup de réunions avec l’équipe avant de se lancer.
(C) Tucuman Films
Vous deviez une fois de plus incarner un personnage dans une langue étrangère, comment appréhendez-vous les difficultés linguistiques dans ces cas ? Est-ce qu’il vous arrive de ne plus faire de différence entre les langues... l’anglais, le français, l’espagnol… ?
Disons que la langue la plus difficile pour moi c’est l’anglais, à cause de mon accent. Les Américains pensent que je suis anglaise, tandis que les Anglais sont persuadés que je suis américaine. Du coup, je suis toujours obligée de forcer un accent ! Je dois beaucoup le travailler, et en fin de compte c’est comme si c’était une autre langue pour moi. Cependant c’est la langue que je lis et parle le plus facilement. Tout simplement celle dans laquelle je me sens le plus à l’aise. Par contre, pour le travail, cela me demande des efforts supplémentaires. C’est clair.
(C) Tucuman Films
Le film de Laura Amelia Guzmàn et Israel Cárdenas évoque les dernières années de vie d’une femme (los últimos coletazos de vida) et l’illusion de la jeunesse retrouvée auprès d’une jeune prostituée avec laquelle elle va entretenir une relation homosexuelle. Géraldine, est-ce ce rôle vous a fait peur ? Vous retrouver en République Dominicaine, dans une liaison trouble avec une jeune femme qui vend son corps... Redoutiez-vous le tournage ou le regard du public ?
Non, je n’ai jamais pensé ça. Cependant il est vrai que j’avais peur, j’étais terrifiée de devoir me déshabiller devant Jeannette et que cela puisse la dégoûter. Il ne faut pas oublier que je suis « una vieja pelleja » (une très vieille dame). Je me disais : « Mon Dieu, qu’elle ne soit pas trop dégoûtée ». Elle a tout compris et tout est allé parfaitement.
Dans le long-métrage il y a un moment précis où votre personnage et celui de Jeannette ont une discussion au cours de laquelle Jeannette fait allusion au fils d’Anne. En revanche, Anne n’a pas envie d’approfondir ce sujet. C’est un moment fort, car révélateur des problèmes mère-fils. Bien qu’Anne évoque son fils de temps à autre, elle invente toujours des excuses pour ne pas trop en dévoiler. C’est presque comme si la communication se coupait. Qu’est-ce qui s’est passé entre eux ?
On ne sait pas.
(C) Tucuman Films
Comment avez-vous travaillé ces non-dits ? Comment avez-vous creusé la blessure implicite née de cette relation difficile entre cette mère exilée et son fils ?
Israel et Laura m’ont dit : « Si tu as besoin d’inventer quelque chose, vas-y, mais nous, on ne veut pas le savoir ». Donc j’ai imaginé une anecdote ; mais cela n’a pas forcement d’importance.
On apprécie l’approche des personnages qui ne sont pas linéaires. En approfondissant, on se rend compte de leur part des ténèbres, de leurs contradictions qui dépassent la simple dualité. Anne n’est pas hyper sage et Jeannette n’est pas la vilaine méchante que l’on peut croire.
(Géraldine applaudit et rigole) Voilà, c’est clair ! Toutes les choses qu’elles font ensemble (se promener, se baigner, danser)... Elles n’ont pas de conversations de vrai couple. C’est une relation aussi complexe que jolie. Je voulais toujours accentuer des gestes, des sentiments, et les réalisateurs me disaient : « Non, non, non, Géraldine c’est bon comme ça ». Le résultat est génial, parce que c’est le portrait d’une vie dans toute sa complexité qui dépasse le manichéisme.
Vous avez joué dans environ 130 films. Avez-vous jamais envisagé de réaliser votre propre long-métrage, de diriger d’autres comédies, forte de votre expérience ?
Oh non, jamais ! J’adore être la pâte, l’argile qu’il faut modeler.
(C) Tucuman Films
On va vous voir prochainement dans le dernier film de Valérie Donzelli Marguerite et Julien. Vous avez tourné avec beaucoup de cinéastes, des hommes, des femmes, des auteurs de cultures et de nationalités différentes… Et vous semblez affectionner en particulier les réalisateurs espagnols comme Carlos Saura ( Cría cuervos La madriguera ), Pedro Almodovar, (Parle avec elle), Isabel Coixet ( Another me ), Juan Antonio Bayona (The impossible, L’orphelinat)… Est-ce qu’il y a une façon ibérique de mettre en scène, ou vous ne faites pas de différence ?
(Elle rit et me regarde d’un air fixe) Bon, en Angleterre il existe le « tea tray » et en Espagne il y a le « bocata » (ndlr : sandwich espagnol). On coupe quand il faut prendre le « bocata » et c’est un moment magique. C’est un rituel ; je ne peux pas dire que cela soit mon instant préféré mais une chose est sûre, cela fait totalement partie de la culture espagnole ! On ne peut pas rater le « bocata » de chorizo, de jamón, de tortilla, peu importe. Le « bocata » c’est un événement de partage et convivialité pour tout le monde.
Les films de Géraldine Chaplin sur aVoi-raLire
Critique des Dollars des sables
Les Dollars des sables (Bande annonce) par IsabelleBuron
Les Dollars des sables, de Laura Amelia Guzmàn et Israel Cárdenas.
A l’affiche à partir du mercredi 25 août 2015.
Merci à Géraldine Chaplin et à l’attachée de presse Isabelle Buron pour cette magnifique rencontre.
(C) Tucuman Films
Galerie Photos
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