Enfant 44 - la critique + le test DVD

Sur fond de paranoïa dans les années 50, Daniel Espinosa signe un thriller plus plaisant que réellement haletant.

L’argument : Hiver 1952, Moscou. Leo Demidov est un brillant agent de la police secrète soviétique, promis à un grand avenir au sein du Parti. Lorsque le corps d’un enfant est retrouvé sur une voie ferrée, il est chargé de classer l’affaire. Il s’agit d’un accident, Staline ayant décrété que le crime ne pouvait exister dans le parfait État communiste. Mais peu à peu, le doute s’installe dans l’esprit de Léo et il découvre que d’autres enfants ont été victimes "d’accidents" similaires. Tombé en disgrâce, soupçonné de trahison, Léo est contraint à l’exil avec sa femme, Raïssa. Prenant tous les risques, Léo et Raïssa vont se lancer dans la traque de ce tueur en série invisible, qui fera d’eux des ennemis du peuple...

(C) SND

Notre avis : à dire vrai, on craint le pire au début, entre la caméra perpétuellement mobile et un montage à la hache qui va jusqu’à l’illisibilité, une musique pléonastique étouffante, et des acteurs qui parlent anglais en roulant les « r » puisqu’on est en URSS. Mais, heureusement, petit à petit, sans que vraiment les défauts disparaissent, un charme diffus émane du film. D’abord parce que le contexte, impeccablement reconstitué, permet un suspens paranoïaque : dans ce pays où la vérité officielle prime, chaque homme est potentiellement un espion et la sûreté une illusion. Évidemment, le scénariste en joue, multipliant les changements de situation : celui qui règne un jour peut chuter le lendemain.
La multiplication des personnages secondaires, plutôt bien brossés, décuple cette sensation d’insécurité perpétuelle et s’avère diablement efficace. C’est cette atmosphère qui fait le prix du film, beaucoup plus que les intrigues elles-mêmes, qui sont trop nombreuses pour vraiment convaincre : Léo, le héros, doit arrêter un tueur en série, conquérir sa femme, échapper aux services secrets et se racheter à ses propres yeux. Ça fait beaucoup, trop sans doute, d’autant que s’y ajoute une quête d’identité, trouble et confuse, qui part du prénom donné au combat dès le début du film.

© SND
Le travail sur les costumes, les lieux et les accessoires, sans être ostensible, contribue à la création d’un climat, renforcé par les couleurs de la ville, ternes et grises. Le cadre ainsi construit participe des aventures rocambolesques et leur donne chair. On suit donc sans déplaisir ces péripéties, mais sans non plus grande passion : Espinosa n’est en effet pas très doué pour entretenir le suspens, et certaines séquences tombent à plat. D’autres, au contraire, sont efficaces (le suicide du guichetier) ou émouvantes (l’aveu de Raïsa à son mari). Au total c’est donc le sentiment d’inégalité qui prime et l’on se prend à rêver de ce qu’eût pu être le film : avec plus d’ambition, une grande quête métaphysique ; avec une intrigue moins touffue, un suspens efficace, voire haletant ; avec plus de souffle, une épopée tragique. Tel quel, il reste un spectacle plaisant, trop conventionnel cependant pour enthousiasmer.

Le DVD

Les suppléments :

Un court making of (8 minutes) qui s’attarde sur la reconstitution historique et une bande-annonce.

L’image :

La copie restitue fidèlement le travail du chef opérateur, du gris urbain aux couleurs pimpantes de la forêt.

Le son :

Les quatre pistes (Dolby Digital 2.0 et 5.1, en Français et en VO) sont d’un bel équilibre, retranscrivant les dialogues avec finesse.