Le 4 mars 2018
Les amateurs retrouveront avec plaisir Bogart dans ce noir efficace et de facture très classique.
- Réalisateur : John Cromwell
- Acteurs : Humphrey Bogart, Lizabeth Scott, Morris Carnovsky
- Genre : Drame, Thriller, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Sidonis Calysta
- Durée : 1h40mn
- Titre original : Dead Reckoning
- Date de sortie : 3 septembre 1947
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– Sortie DVD et Combo Blu-ray + DVD : le 5 mars 2018
Résumé : Rip Murdock et Johnny Darke se rendent à Washington, mais Rip retrouve son ami mort. Apprenant qu’il était accusé de meurtre, il enquête sur lui. Il tombe amoureux de Coral, dont le mari était la victime supposée de Johnny.
Notre avis : A priori, En marge de l’enquête (encore une traduction bizarre…) a tout d’un ersatz : un faux Grand sommeil, avec Bogart, une simili-Bacall et, hélas, pas Howard Hawks, pour un film noir bavard et à l’intrigue profuse (pas autant cependant). Et de fait l’ombre du chef-d’œuvre pèse sur ce métrage attachant : il faut oublier l’un pour apprécier l’autre à sa juste mesure. D’ailleurs, cette sombre histoire de faux coupable ne manque ni de charme ni de mordant.
Le début en est tranchant : un homme en fuite, sous la pluie nocturne (nuit et pluie réapparaîtront dans la course finale), se cache dans une église et raconte son aventure à un aumônier militaire. Le flash-back, boiteux dans la logique diégétique, permet à la voix off de déployer un récit complexe, qui fait passer un héros de guerre de la lumière à l’ombre en une plongée cauchemardesque dans le noir. Dans ce monde « malade », comme le dit le héros, les apparences sont régulièrement trompeuses : Johnny, l’ami de Rip, se cachait sous une fausse identité, accusé d’un crime qu’il n’a pas commis ; Rip lui-même, fuyard dès les premières minutes, a la police à ses trousses et pourtant il est innocent ; quant au « méchant » Martinelli, propriétaire louche d’une boîte, ou à la vamp surnommée Dusty, leur passé trouble sera révélé peu à peu. Visuellement, John Cromwell traduit ce jeu sur le vrai et le faux par des plans superbes : ainsi de l’apparition de Dusty filmée en un travelling qui va des jambes au visage, ou du visage fréquemment masqué de Rip au début. Le cinéaste suggère ainsi constamment que les paroles sont sujettes à caution, que la réalité échappe. Et de fait, Rip dans sa quête met tout le temps du film à découvrir qui est qui ; constamment manipulé, il se fait droguer, assommer, tabasser, et se fourvoie jusqu’aux dernières minutes.
En marge de l’enquête souffre d’un certain statisme et de dialogues trop abondants, même s’ils sont souvent savoureux. Mais le scénario, malgré quelques coïncidences ou simplifications, a l’habileté de structurer fermement un récit qui a tendance à l’éparpillement ; que ce soit par des objets récurrents (la médaille, la lettre), des situations et des répliques qui se répètent ou des gimmicks comme le goût de la musique chez le tortionnaire, il parvient à retenir l’attention et à donner une impression de fermeté.
Pourtant, ce qui fait de ce film noir très classique une œuvre agréable, c’est le numéro magistral de Bogart, à l’aise dans son rôle de dur sarcastique : il donne à chacune de ses répliques un ton singulier. Comme son point de vue est privilégié (c’est lui qui raconte dans la majeure partie, ce qui se conçoit d’autant mieux qu’il a l’ « avantage » de ne pas tout savoir), il est à l’image -et au son !- dans presque chaque plan ; son regard désabusé apporte une patine et une profondeur bien à lui, illuminant de son génie un film qui n’atteint pas les sommets de Laura ou de Assurance sur la mort dont il imite la structure en flash-back confession, mais reste très plaisant.
Les suppléments :
En plus de la bande-annonce, le Blu-ray propose deux courtes introductions : François Guérif développe une fine analyse à partir du début et du titre, avant de multiplier les informations éclectiques (9mn) ; Patrick Brion aime le classicisme du film, avec sa « vraie garce ». On est content que ses précisions intéressantes sur le cinéaste, sur les caractéristiques du noir et sur Bogart ne recoupent pas celles de Guérif (10mn).
L’image :
Quelques griffures sans conséquences ; pour l’essentiel, la copie est belle, nuancée, et le grain sans trop d’épaisseur. Une réussite pour un film de 1947.
Le son :
Portée par la belle voix grave de Bogart, la bande-son sans parasites ni souffle propose des voix claires dans les dialogues abondants. Les sous-titres peinent à suivre le rythme, mais la VF d’époque est assez désagréable.
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