Le 22 avril 2022


- Scénariste : Harold Schechter>
- Dessinateur : Powell, Eric
- Collection : Contrebande
- Genre : Biographie, Policier
- Editeur : Delcourt
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 13 avril 2022
Portrait glaçant et horrifique du plus iconique des tueurs américains
Résumé : Cette enquête biographique et graphique retrace les origines et le parcours d’un tueur du Midwest américain, qui inspira tant d’horribles figures du cinéma, entre culte de la mère et cadavres déterrés : Ed Gein.
Certains livres glacent le sang, d’autres donnent la nausée. À l’instar des Bienveillantes, cette biographie tirée de faits hélas trop réel, sur le tueur américain Ed Gein, soulève l’estomac avec la force d’une vague aux relents acides. Cette sensation est présente jusqu’à la dernière page, laissant dans la bouche et le cerveau une image et un goût abjects. Néanmoins, quelles sont les œuvres – picturales, cinématographiques ou littéraires – qui dépassent la simple curiosité morbide pour aller permettre au lecteur/spectateur de comprendre et de s’interroger en plaçant la violence du monde devant son visage ?
Le duo Schechter/Powell a particulièrement réussi ce coup, et comme avec Truman Capote dans De Sang froid, on se plaît à constater que certaines œuvres ont une force étrange en plongeant dans l’inhumanité en toute objectivité. Une mère despotique et puritaine, un père alcoolique et dépassé, un frère victime d’un accident louche, et puis les tombes, l’isolement, les disparitions... Les premiers chapitres, si l’on excepte le prologue sur Psychose et Hitchcock, proposent une vision somme toute assez fiable de l’Amérique profonde. Mais la descente aux Enfers de la perquisition va atteindre des sommets d’horreur...
Delcourt – Harold Schechter, Eric Powell
Il y a en effet un pic, un climax épouvantable au cœur de cet ouvrage. On mesure dès lors l’étendue du talent graphique de Powell. Le dessinateur se contente souvent de souligner par petites touches la malice, le despotisme dans le personnage de la mère, et glisse de discrètes références aux comics de l’après guerre où les cannibales apparaissent. Son dessin présente avec la même neutralité apparente les corps, ou plutôt les peaux et les organes, dans des positions que l’on pensait réservés aux seuls films d’horreur ou séries policières nordiques. Il n’y a rien de trop sanguinolent – sur ce point, le noir et blanc y est pour beaucoup – et c’est dans une sobriété abjecte et une neutralité d’enquête que se dessine le mausolée d’Ed Gein, figure qui passe d’ailleurs dans la BD comme elle a passé auprès de ses voisins : pitoyable, simplet, poli et apeuré.
Delcourt – Harold Schechter, Eric Powell
Biographie écœurante de vérité et saisissante d’un crayon forcené, Ed Gein : autopsie d’un tueur en série aurait mérité son titre original "Tu as appris ce qu’a fait Ed Gein" tant celui-ci correspond à l’ambition du récit.
288 pages – 24,90 €