Duel sur le Mississipi - la critique du film + le test DVD

Notre avis : Bien qu’il soit intégré à la collection « western », Duel sur le Mississippi s’apparente davantage à un film d’aventures, typique de ces compléments de programme destinés à accompagner « le » métrage, ses stars et son prestige. Avec le recul, certains de ces hors-d’œuvre ont gagné l’aura que leur confère leur absence de prétention. C’est le cas ici, non pas qu’on ait dégoté un bijou ignoré, mais, pour trois raisons au moins, on aurait tort de passer à côté de cette petite heure pleine de charme.
D’abord, mais c’est presque accessoire, le contexte historique, doctement expliqué par la voix off initiale, a été peu traité au cinéma ; il s’agit d’une guerre ignorée, celle du sucre dans la Louisiane des années 1820. Faute de moyens, elle reste largement hors-champ : qu’on ne s’attende donc pas à des plantations immenses et une masse de figurants y travaillant. La canne à sucre n’est qu’un enjeu, ou plutôt le déclenchement du récit : en effet, c’est parce qu’il s’est fait voler sa récolte que le vieux Tulane passe en jugement, et que la belle détentrice de sa dette soumet son fils à trois ans de domesticité (il sera son esclave, comme il le dit à maintes reprises). La précieuse denrée réapparaît ça et là, comme pour accélérer la narration, mais à vrai dire le spectateur s’en moque très vite, pour peu qu’il soit sensible à l’indéniable charme des personnages.
Second atout, majeur celui-ci, l’humour : le scénario se moque comme d’une guigne de la vraisemblance et de la cohérence, tout occupé qu’il est à chercher le détail plaisant, qui tire sans cesse le film vers la parodie ; et c’est un régal : de l’arbitre du duel qui salue différemment les bretteurs selon leur chance de survivre à la séquence des commissions où Lily humilie le bel André en lui faisant porter ses paniers ou monter à l’arrière de la voiture, en passant par un crêpage de chignons devant des hommes hilares, le comique envahit le métrage au point d’en détruire tout suspense ou esprit de sérieux. Aussi est-on presque déçu quand il passe le relai à des péripéties plus conventionnelles.
Il faut enfin compter avec l’incendiaire rousse interprétée malicieusement par Patricia Medina (qui venait de jouer dans le Mr. Arkadin de Welles), impeccable maîtresse-femme, dominatrice et rebelle, dont l’érotisme discret mais patent colore les meilleures séquences. Son numéro a du chien, et il fait la voir assumer aussi bien la flamboyance que la soumission finale qui fera hurler les féministes. Impossible de résister à cette tornade qui donne à Duel sur le Mississippi une très légère touche perverse.
Certes, tout cela ne fait pas un grand film : le manque de sérieux est aussi une limite, puisqu’il ne débouche jamais sur la franche parodie et que les scènes d’action souffrent d’évidentes carences. Pareillement, Lex Barker, éloigné de ses prestations dans différents Tarzan, n’a pas grand panache et son jeu reste monolithique. Au moins passe-t-on une heure sympathique, plutôt enlevée, avec cette œuvrette sans prétention mais non sans atouts.

Les suppléments :
Hormis la bande-annonce, il faut se contenter des huit minutes de Patrick Brion qui examine les westerns de 1955, les carrières de Castle et Lex Barker, en déplorant la décadence du genre. C’est intéressant, mais un peu court.

L’image :
Il y a bien quelques plans larges flous, un curieux tressautement d’image, mais globalement la copie restaurée est de toute beauté : splendeur des couleurs, grain léger, absence de parasites. Impeccable.

Le son :
Seule la VO est disponible ; on ne le regrettera pas. La piste mono est limpide, avec les limites des conditions d’enregistrement, et les dialogues ne manquent pas de mordant.