Côté obscur
Le 28 février 2005
Six nouvelles pour une chronique de la folie pathétiquement humaine.
- Auteur : Hubert Prolongeau
- Editeur : Belfond
- Genre : Roman & fiction
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Un seul espoir lorsque l’on referme ce recueil de nouvelles : qu’elles aient un effet cathartique sur le lecteur. Sinon, notre société est irrémédiablement perdue.
Que celui qui n’a jamais été à deux doigts de "péter un plomb", pour reprendre l’expression consacrée, lève le doigt. Pour qui a déjà ressenti monter en soi cette bouffée de colère ou de rage dans une situation particulièrement agaçante voir carrément énervante, la sensation n’est pas inconnue. Le plus souvent, et heureusement, la colère retombe comme un soufflé, aussi vite qu’elle est apparue. Pas pour Hubert Prolongeau. Chez ses personnages, la manette de décompression n’a pas fonctionné et ils ont basculé de l’autre côté. Un basculement plus ou moins violent et irréversible : tout dépend des circonstances.
Car il y a une marge entre les réactions des personnages des six nouvelles de Doubles faces. On ne peut décemment pas comparer les passages à l’acte de Marie, Lebrun et Cassel par exemple. Une pervenche effacée qui se découvre un plaisir jouissif à rayer les voitures mal garées... Un prof devenu voyeur et obsessionnel le temps des vacances... Un banlieusard, kidnappé, qui finit par massacrer son ravisseur, devenant ainsi un héros des temps modernes pour les spectateurs de "Ça se discute". Encore que... Au bout du compte, c’est un bien sombre portrait du Français moyen, ou plutôt du Parisien moyen, que nous dessine Hubert Prolongeau. Notre petit confort moral en prend un sacré coup : ces chroniques de la folie ordinaire sont si pathétiquement humaines, si dérisoires, qu’elles en deviennent effrayantes.
Or notre inquiétude ne s’arrête pas là. Passe encore que ces individus aient commis l’irréparable et qu’ils se dépouillent de toute humanité, mais l’auteur suggère que ces dérapages sont contagieux. Le recueil est construit remarquablement comme un jeu de domino. Chaque personnage prend sa source dans la nouvelle précédente où il apparaît en second plan et la partie démarre à Paris pour aboutir à Bamako. Certes Hubert Prolongeau s’arrête au Mali, mais et après ? Qui peut dire que l’hécatombe ne va pas se propager aux autres continents ?
Hubert Prolongeau, Doubles faces, Belfond, 2005, 189 pages, 14,50 €
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