Le 9 février 2021
- Auteur : Jean-Claude Carrière
- Voir le dossier : Nécrologie
Jean-Claude Carrière vient de mourir à l’âge de 89 ans. Romancier, scénariste, dramaturge, parolier, cet homme aux passions multiples avait collaboré avec les plus grands metteurs en scène (Malle, Buñuel, Godard...). Nos chroniqueurs Laurent Garreau et Blaise Royer rendent hommage à ce grand conteur, à la carrière immense, qu’ils ont eu la chance de rencontrer.
Témoignage : J’ai rencontré Jean-Claude Carrière pour la première fois dans le cadre de ma thèse consacrée à la censure. Nous avions parlé de Belle de jour, de Luis Buñuel, dont il était le scénariste. Dans ce même film, il a été l’interprète du rôle d’un prêtre lors d’une messe noire, à travers une séquence coupée au montage et qui est restée invisible depuis. Cette censure révèle quelque chose de la personnalité du scénariste. Jean-Claude Carrière était un homme paradoxal. Rares sont les personnages de l’ombre à avoir autant attiré la lumière. Discuter avec lui, c’était l’entendre énoncer les noms des grands artistes avec lesquels il avait “modestement” collaboré, de Buñuel à Philippe Garrel - on notera aussi les noms de Pierre Etaix, Louis Malle, Ridley Scott, Peter Brook, Schlöndorff, Chéreau, évidemment, mais aussi Jacques Deray, Julian Schnabel ou Jean Rouch. La liste semble infinie et couvre plus d’un demi-siècle de l’histoire du cinéma.
Il ne goûtait pas les reconnaissances notoires et pourtant a reçu les plus grands prix que le cinéma puisse accorder et il était incontournable dans les médias pour aborder les nombreux sujets sur lesquels ce polygraphe invétéré avait écrit. Cette énergie déployée à transmettre et à vivre intensément sa mission lui a ouvert des voies improbables vers des horizons culturels très divers. Il se disait français, mexicain, indien et iranien. Il avait le cosmopolitisme chevillé au corps. Au cours de la même année, il pouvait passer deux semaines aux Etats-Unis présidés par Donald Trump où le Moma lui accordait la première rétrospective consacrée à un scénariste, puis s’envoler pour l’Iran des Mollahs où était organisée une rétrospective de ses dessins de presse et humoristiques. Passeur de récits et de poésie, il se qualifiait lui même de conteur et insistait souvent sur l’importance de la transmission. Fidèle à ses engagements et à ses valeurs, il m’aura témoigné ainsi qu’à Blaise Royer, mon compère coorganisateur du Festival Nouvelles Images d’Iran, que ce n’était pas un vain mot, en nous accueillant chez lui et nous accordant son parrainage.
Photo : Reza Kashefi
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