Le 22 avril 2025


- Scénaristes : JUNG>, Laetitia Marty>
- Dessinateur : JUNG
- Collection : Encrages
- Genre : Autobiographie, Roman graphique, Société
- Editeur : Delcourt
- Famille : Roman graphique
- Date de sortie : 26 mars 2025
Une quête des origines à travers le coréen de l’adoption.
Résumé : Jung, coréen d’origine, a été adopté, et a pu restranscrire sa vie dans des romans graphiques. Joy est une jeune femme coréenne qui est condamnée, si elle reste mère célibataire, au déshonneur, mais en tombant sur le livre, ses convictions vacillent...
Critique : Avec son œuvre, Jung réalise un double travail : en fouillant dans ses souvenirs et dans ses origines, il fait un travail d’introspection autobiographique dont il a besoin, pour avancer en temps qu’ancien enfant adopté. Mais avec ses albums, il critique, fustige, remet en cause tout une société, celle de son pays d’origine, la Corée du Sud. Comme il le dit lui même, ce pays est paradoxalement à la pointe de la technologie tout en étant à la traîne dans sa vision de l’évolution des normes sociales, et notamment envers les femmes, toujours considérées comme inférieures, facilement déshonorées, le mariage et le patriarcat restant indéboulonnables pour gérer les statuts. Toutefois, avec Destins coréens, s’il part bien de son ressenti, de sa volonté de revenir et comprendre, Jung bifurque en racontant une autre histoire que la sienne, celle de Joy, jeune femme de vingt ans, étudiante aimant ses parents, qui va perdre son père d’un cancer, et qui se retrouve enceinte au lendemain d’une aventure d’un soir. Face à une société qui proscrit l’avortement mais encourage l’abandon des nouveaux nés, ses choix sont maigres. En lisant un album précédent, elle semble changer d’avis, mais la distance empêche Jung de suivre son destin. Déterminé, il tente de la retrouver, et va raconter cette histoire humaine cathartique, aussi bien pour lui que pour elle, et on l’espère, pour les générations futures de Coréens.
- Jung, Laëtitia Marty / Delcourt
Destins coréens est une de ces œuvres modernes qui fait voyager le lecteur, pas seulement par son lieu où son temps (curieusement, le Séoul d’aujourd’hui n’est pas aussi dépaysant qu’il y a dix ans), mais bien par son style. Comme une gravure grise où l’émotion pourrait faire vriller la paume de la main, les premières pages ont cette griffure qui marque le lecteur, autant que l’auteur a dû être marqué par ces moments. Le peu de couleur illustre d’une manière peut-être inconsciente le manque d’espoir qui s’étale dans les premières pages, où la maladie du père obscurcit chaque planche, alors même que Jung ne l’a jamais connu. Cet abattement est lourd, mais dans une seconde partie, l’album se met à respirer, notamment une fois que Joy a été retrouvée. Un air encore encombré, difficile, mais qui fait du bien malgré tout, et peu à peu on sent que le trait se lâche, se fait plus aéré, et d’un coup on se dit que le gris n’est plus un problème. Il est ce gris de la vie, entre le tout noir et le tout blanc, que l’on tente d’éclaircir peu à peu.
- Jung, Laëtitia Marty / Delcourt
Destins coréens est un récit immersif qui peint l’état d’esprit d’une société conservatrice et lie l’abandon infantile à la condition féminine. Un album coup de poing.
144 pages – 20,50 €