The power of love
Le 14 juin 2018
Pour son premier film en anglais, Sebastián Lelio est parvenu à capter le batifolage entre deux femmes issues de la communauté juive orthodoxe avec suffisamment de doigté pour que leur passion interdite interroge davantage leur relation à la religion qu’à leur sexualité.
- Réalisateur : Sebastián Lelio
- Acteurs : Rachel McAdams, Rachel Weisz, Alessandro Nivola, Anton Lesser, Nicholas Woodeson
- Genre : Drame, Romance, Mélodrame, LGBTQIA+
- Nationalité : Britannique
- Distributeur : Mars Distribution
- Durée : 1h54mn
- Date télé : 25 avril 2024 22:30
- Chaîne : OCS Pulp
- Titre original : Disobedience
- Date de sortie : 13 juin 2018
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Résumé : En partant vivre à Manhattan pour devenir photographe, Ronit Khruska a pris ses distances avec la communauté juive orthodoxe londonienne dans laquelle elle a grandi. Mais quand elle apprend la mort de son père, rabbin, elle décide de rentrer chez elle pour assister aux obsèques. Ronit doit affronter l’hostilité des membres de sa communauté à l’exception de son ami d’enfance Dovid, qui semble heureux de la revoir. Mais elle est surtout bouleversée d’apprendre qu’Esti, dont elle était autrefois secrètement amoureuse, est devenue l’épouse de Dovid. Les retrouvailles entre les deux femmes font renaître une passion qui ne s’est jamais vraiment éteinte…
Critique : Après qu’il ait signé, avec Gloria et Une femme fantastique, deux des plus beaux portraits de femme de ces dernières années, le second ayant de surcroît remporté l’Oscar du Meilleur Film en Langue Étrangère, on pouvait se douter que le Chilien Sebastián Lelio a reçu de nombreuses propositions des États-Unis. Avant d’accepter de signer un remake américain de Gloria, le scénario qui a trouvé grâce à ses yeux pour signer une première réalisation en langue anglaise est l’adaptation d’un roman de la Britannique Naomi Alderman. Cette histoire, qui trouve place au sein de la communauté juive orthodoxe londonienne, suit la lignée des précédents films de Lelio puisqu’elle se concentre sur deux personnages féminins dont le parcours opposé ouvre une réflexion des plus intéressantes sur la possibilité ou non de se défaire d’un lourd héritage culturel.
Toutefois, le film étant vendu sur son principal argument « romance lesbienne dans un milieu traditionaliste », il avait de quoi laisser présager une dramaturgie préétablie basée sur la confrontation entre leur relation amoureuse et un patriarcat homophobe. Les récents Rafiki et Carmen et Lola –vus tous deux au Festival de Cannes–, situés respectivement au Kenya et dans une communauté de Gitans espagnols, nous ont réaffirmé à quel point cette dichotomie était un passage obligé pour évoquer l’homosexualité, en l’occurrence féminine. Si Désobéissance se détache du lot, c’est justement parce que Lelio réussit à faire complètement abstraction de ce schéma convenu.
- Copyright Mars films
Grâce à une mise en scène soignée, les retrouvailles entre Ronit et Estit, alors que la seconde est mariée, et la réminiscence de leur flirt adolescent parviennent à être captés avec suffisamment de délicatesse pour que les non-dits se suffisent à eux-mêmes. Sans se donner pour défi de rivaliser avec la tension sexuelle contenue dans les jeux de regard de Carol, Lelio réussit à faire naitre une sensualité sous-jacente dans les échanges entre les deux femmes, mais surtout parvient à ne pas faire de leur homosexualité l’enjeu majeur de ce marivaudage. Au contraire, le traitement qu’en fait le scénario l’assimile à un adultère sans jamais que sa nature saphique ne soit évoquée. De cette façon, le réalisateur se déleste du poids du regard des autres pour mieux se concentrer sur les tourments intimes de ces deux femmes, mais aussi sur ceux de Dovid, le mari d’Estit, et homme de foi respecté au sein de sa communauté.
- Copyright Mars films
Dès la litanie prononcée en ouverture, on saisit que c’est la question de la liberté de choix qui est au cœur de ce scénario romantique. C’est au regard de cette éternelle problématique que chacun des trois personnages se retrouve face à ses propres incertitudes et ses tentations respectives, et ce, qu’elles soient d’ordre profane ou religieux. Une telle approche introspective vis-à-vis de la question de la foi profite d’une réalisation raffinée, qui sait se montrer transgressive sans tomber dans le piège de la dénonciation crue. Le jeu très épuré de Rachel Weisz, Rachel McAdams et Alessandro Nivola est d’ailleurs pour beaucoup dans la capacité de Sebastián Lelio à transformer ce récit, au demeurant prévisible, en une envolée vibrante autant que spirituelle.
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