Du soleil et du souffle
Le 30 avril 2008
Une oeuvre âpre et visuellement somptueuse, à deux doigts de l’éblouissement.
- Réalisateur : Reha Erdem
- Acteurs : Elit İşcan, Ali Bey Kayali, Yigit Özsener
- Genre : Drame
- Nationalité : Turc
- Date de sortie : 30 avril 2008
– Durée : 1h45mn
– Titre original : Bes vakit
Une oeuvre âpre et visuellement somptueuse, à deux doigts de l’éblouissement.
L’argument : Itinéraire des trois gamins pas gâtés dans un village pauvre. Omar, fils de l’imam, veut que son paternel crève vite et si possible dans des conditions atroces. Yakub voue un culte secret à sa maîtresse d’école suscitant une attraction charnelle qu’il n’explique pas encore. Yildiz exécute toutes les tâches domestiques ingrates imposées par sa mère. Un quotidien à se flinguer si, en regardant la mer, en crapotant en pleine nature, à l’ombre des oliviers, ils n’étaient pas heureux de trouver un peu de réconfort loin d’un monde adulte contaminé par des règles liberticides.
Notre avis : Des temps et des vents est une petite merveille qui donne envie d’appeler à la rescousse de notre enthousiasme toute la batterie des expressions les plus galvaudées. Un de ces faux petits films qui ne manquent pas de grandeur. Transcendé par la bande-son élégiaque de Arvo Pärt, ce quatrième long métrage de Reha Erdem affiche des trésors de poésie visuelle où le raffinement de la mise en scène et l’art de la suggestion s’exercent à merveille. Idéalement, il se situe à la jonction de l’intellect et de l’émotion (entre cerveau et coeur, sens et pensée). Au centre du récit, trois jeunes protagonistes qui évoluent différemment au rythme de l’air, de l’eau, de la nuit, du jour et des saisons en résistant coûte que coûte aux us drastiques entretenus par des adultes. Le fantasme, la nature, l’amitié deviennent des refuges pour lutter contre cette réalité peu avenante.
La tristesse qui gagne le spectateur, la mélancolie qui sourd des plans et de leur enchaînement semble irrémédiablement venir d’une fondamentale incapacité d’être heureux, le grand sujet du film. Entre cruauté des sentiments humains et beauté aride des paysages, Erdem dresse un état des lieux de la société turque, à cheval entre tradition religieuse (celle des parents) et besoin vital d’affranchissement (celui des jeunes). Cette réussite sur le choc des générations et des cultures rappelle à quel point le cinéma turc, soutenu depuis quelques années par des pointures comme Nuri Bilge Ceylan (Uzak), est l’un des plus riches et stimulants du moment. Dans la grisaille cinématographique actuelle, Des temps et des vents est aussi apaisant qu’un rayon de soleil après la pluie.
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evil_owl 19 mai 2008
Des temps et des vents
Loin de la ville et du bruit, le réalisateur nous offre sa vision pastorale et métaphorique du passage à l’âge adulte, dans une Turquie contemporaine encore pétrie de traditions. L’Homme perd son enfance ; une transition, bercée par la nuit, le jour et la religion.
Une évocation parfaitement servie par une photographie de très grande qualité (renforcée par la qualité de la copie) et un art certain dans la maîtrise des mouvements de la caméra. D’aucuns pourraient qualifier un tel travail de vision artificiel ; mais pourquoi bouder son plaisir lorsque c’est si agréable.
On se laisse, pour qui aime la contemplation, doucement emporter par cette histoire et les tintinabulations de Pärt.