De Mémoire – La chronique BD

Le personnage de Nick Powell est vraiment intéressant. On s’attache très vite à lui. Son regard cynique, caustique, sans filtre sur le monde en fait un de ces héros détachés, désabusés comme les vieux détectives de polar. Sauf que Nick n’est pas policier ni détective, il effectue des petits boulots jusqu’à ce qu’il se lasse et change de job. Et il sera même videur. Mais, contre toute attente, ces ennuis ne viendront pas forcément de ce métier à risque.

Si le personnage de Nick est attachant et nous entraîne dans l’histoire, le récit reste quant à lui de facture très classique. Nous allons voyager entre le présent et le passé, surtout l’enfance de Nick, marqué par un violent trauma. Dans le présent, malheureusement, concernant les ennuis qui lui tombent dessus, on en saisit très vite l’origine et la cause. Aucune surprise de ce côté là. Or, ce côté-là, c’est un peu le nœud d’une histoire d’enquête. Par conséquent, on ne peut pas qualifier ce récit de thriller. Car il n’y a tout simplement pas de tension dramatique, pas de notion d’urgence. Le récit se déroule, on suit Nick, qui ne semble pas vraiment s’en faire plus que nous, et comme Nick, on comprend assez vite le fin mot de l’histoire.

Le dénouement en happy end renforce encore plus cette absence de tension. Et le climax de l’histoire reste un peu étrange. Il nous a fallu le relire plusieurs fois pour être sûr d’avoir compris. Scénaristiquement parlant, nous avons trouvé que cette histoire manquait d’une structure plus solide, de rebondissements, ou d’événements qui nous feraient nous inquiéter pour Nick, ou qui nous laisseraient des questions en bouche au long de l’intrigue.

Corbeyran, Winoc / Bamboo Grand Angle

Winoc au dessin nous offre un univers réaliste tracé dans un style vif, nerveux. Ce qui donne aux événement une dynamique forte. Les ombres hachurées contribuent également à cette nervosité du trait. Elle se mêle aux effets de couleur. L’absence de tension de l’histoire est amplement compensée par la tension des traits, où tout semble se dessiner dans l’urgence.
Les couleurs varient pour créer les ambiances des différentes scènes. La composition des pages se resserre sur les scènes d’action pour s’aérer lors des scènes de pause.
Winoc nous livre une belle partition graphique pour donner vie et rugosité à cette histoire.

De Mémoire met en scène de beaux personnages, autant Nick que ceux et celles qui gravitent autour de lui. Cependant il manque à ces protagonistes une intrigue plus serrée, moins prévisible qui nous garderait en haleine jusqu’à la fin.