Le 22 septembre 2024
Si Cyril Aris met à l’honneur la détermination de Mounia Aki et son équipe à tourner Costa Brava, Lebanon, il dresse surtout un merveilleux récit sur la capacité du cinéma à surmonter des volcans et les tragédies du monde. Une leçon d’humilité.
- Réalisateur : Cyril Aris
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Allemand, Libanais
- Distributeur : Les Films des Deux Rives
- Durée : 1h27mn
- Titre original : Dancing on the Edge of a Volcano
- Date de sortie : 25 septembre 2024
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Résumé : Après l’explosion au port de Beyrouth du 4 août 2020, une équipe de tournage fait face à un dilemme : affronter le chaos et poursuivre le tournage de leur film, ou l’abandonner face aux crises qui gagnent le pays. "Danser sur un volcan" met en évidence la résilience de l’équipe et raconte leur lutte pour continuer à faire du cinéma au milieu d’une ville dévastée.
Critique : Comment continuer à écrire, à faire des films, quand tout un pays, le Liban, est aux prises des pires catastrophes ? Faut-il se résoudre à se taire, à se soumettre aux aléas économiques, ou continuer coûte que coûte à militer pour la poursuite de l’œuvre commencée ? C’est tout le débat que Cyril Aris pose dans son documentaire Danser sur un volcan qui prend pour décor le délabrement de Beyrouth, étranglée par l’explosion d’une usine en 2020 sur le port et des années de conflit. Les immeubles éventrés ressemblent à des maisons de poupées, sinon que les gens y survivent véritablement, déjà assommés par des années d’inflation dérégulée et des crises politiques.
Danser sur un volcan constitue un moteur optimiste en faveur de la puissance créatrice. Réunir déjà des financements pour faire un film, trouver un distributeur sont des épreuves parfois rédhibitoires pour un réalisateur. Ici, le projet se heurte à l’impensable, à savoir la destruction d’une ville, la disparition de proches et l’éventrement des habitations. L’explosion du port de Beyrouth avait fait beaucoup parler les médias occidentaux, et le film apparaît comme un sain rappel que la capitale libanaise continue de souffrir. Cyril Aris filme de l’intérieur la lâcheté du pouvoir politique, avec en creux, l’image de ces jeunes policiers qui se font insulter par le peuple alors qu’ils sont sans doute autant victimes que celles et ceux qui hurlent leur colère.
- Copyright Les Films des Deux Rives
La réalisatrice, Mounia Akl, dont nous avions récemment vu et apprécié Costa Brava, Lebanon, est le personnage central de ce documentaire qui va à la recherche au plus profond d’elle-même de ce qui provoque la puissance de créer. La fiction de la cinéaste donnait à voir l’état d’un pays dévoré par l’inflation qui se transforme en déflation, la pollution et l’inertie et la corruption politiques dans un esprit intimiste et familial. Le documentaire décrit la manière dont elle a poursuivi son travail, jusqu’à l’aboutissement final du film, prenant son inspiration dans le rapport que sa propre mère entretient avec la nature, dans sa maison située en campagne. Il faut se souvenir que le pays traversait en sus, comme le monde entier, la crise de la Covid-19, ce qui était loin de faciliter les velléités de tournage.
La détermination de Mounia Aki est remarquable. Elle l’est d’autant plus que Cyril Aris décrit, à coups d’archives, un pays, le Liban, qui n’a jamais eu de cesse de se débattre avec des crises politiques et économiques. Tous les protagonistes qui traversent le documentaire sont d’une profondeur et d’une sincérité troublantes. Ils témoignent de leurs existences qu’ils jugent vides, du passage du temps et de leur isolement. Et pourtant, ils perdurent dans une détermination sans faille qui leur permet de produire, écrire, tourner et jouer une œuvre de cinéma. La politique s’invite en plein tournage avec le résultat des élections, quand la productrice ne se décourage pas en perdant des crédits rongés par la dévaluation de la monnaie du pays, ou lorsque des inondations démolissent les décors.
- Copyright Les Films des Deux Rives
Danser sur un volcan constitue une vraie illustration de la difficulté dans la plupart des pays du monde à réaliser un long-métrage. Trop souvent, on consomme les films qui se déroulent sur l’écran, en oubliant à quel point les réalisateurs et les équipes doivent batailler pour parvenir à leurs fins. En ce sens, le documentaire force l’admiration pour des réalisateurs libanais en l’occurrence, mais aussi iraniens, syriens, afghans, pour lesquels la création artistique procède de la résilience et du combat.
Danser sur un volcan constitue un documentaire qui rajoute à la passion du cinéma. Faire un film n’est pas juste raconter une histoire avec des acteurs, c’est lutter et réécrire le réel au service d’une fiction. Véritablement, Cyril Aris nous pousse à l’humilité.
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