Le 5 décembre 2020
La description sans concession d’une vie en entreprise hautement déshumanisée. Un beau coup de tonnerre sociétal !
- Réalisateur : Nicolas Silhol
- Acteurs : Lambert Wilson, Céline Sallette, Alice de Lencquesaing , Stéphane de Groodt, Violaine Fumeau
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Français
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Durée : 1h35mn
- Date télé : 5 décembre 2020 22:15
- Chaîne : OCS Max
- Date de sortie : 5 avril 2017
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Résumé : Emilie Tesson- Hansen est une jeune et brillante responsable des Ressources Humaines, une « killeuse ». Suite à un drame dans son entreprise, une enquête est ouverte. Elle se retrouve en première ligne. Elle doit faire face à la pression de l’inspectrice du travail, mais aussi à sa hiérarchie qui menace de se retourner contre elle. Emilie est bien décidée à sauver sa peau. Jusqu’où restera t-elle corporate ?
Notre avis : Initié par son père, professeur de management en école de commerce et consultant en ressources humaines, Nicolas Silhol s’intéresse depuis toujours aux rapports sociaux en entreprise. Son premier court-métrage racontait déjà une séance de jeu de rôles dans une entreprise de pompes funèbres. Frappé par la série de suicides chez France Télécom, il découvre le système du « management par la terreur » et ses conséquences sur les individus. Contrairement à Louis-Julien Petit qui avec Carole Mathieu se penchait sur la pression subie par des employés soumis à des techniques managériales écrasantes, Nicolas Sihlol concentre son propos sur la responsabilité de ceux qui acceptent de « faire le sale boulot », faisant ainsi insidieusement glisser cette étude sociétale vers le thriller. Le terme "corporate" suggère une appartenance totale à l’état d’esprit d’une société. Responsable des ressources humaines, Emilie adhère sans l’ombre d’un doute aux valeurs de son entreprise jusqu’à ce que le suicide d’un employé harcelé dans la cour de l’établissement grippe les rouages d’une machine machiavélique pourtant bien huilée. Car Emilie a été recrutée pour faire craquer ceux dont la grande société qui l’emploie veut se débarrasser, de manière à obtenir leur démission, histoire d’économiser les indemnités qui leur seraient dues en cas de licenciement.
- Copyright Claire Nicol
Le réalisateur place l’humain au cœur de son sujet et s’appuyant sur un casting de grande qualité, il nous sert avec froideur quelques beaux échantillons de la nature humaine allant du plus tendre au plus détestable. Pivot essentiel de ce drame, Céline Sallette accompagne avec tout le talent qu’on lui connaît la résurrection de cette femme. Aguerrie à la dureté du monde du travail, elle a perdu toute trace d’humanité. Quand elle devient elle-même la proie de ceux qui lui ont appris à tuer, sa carapace se fissure. Elle reprend contact avec ses émotions. Loin du monde de l’entreprise à la rigidité carcérale, quelques scènes nous la montrent dans sa vie de mère ou de femme (son compagnon, d’origine anglaise, jeune cadre flegmatique et décontracté lui apporte l’équilibre qui lui fait défaut), suggérant qu’en elle deux personnalités s’affrontent. L’amitié amoureuse et bienveillante dont son ami Vincent (merveilleux Stéphane De Groodt à la fois délicat et léger) la couve jette un voile de douceur sur ce monde de brutes. Se défendant de vouloir raconter la rédemption d’une « méchante », Nicolas Silhol s’applique à nous démontrer que c’est bien la fonction qui a perverti Emilie. Si, dans un premier temps, elle contacte l’inspectrice du travail, c’est surtout pour sauver sa peau. C’est bien le duel qui s’engage entre les deux femmes qui installe l’ambiance de polar dans lequel baigne l’intrigue d’un bout à l’autre. Du même âge, dotée d’un tempérament dynamique, elles pourraient être amies. Pourtant, leurs fonctions respectives les opposent. Emilie (Céline Sallette) a une féminité contrôlée et sophistiquée, prisonnière d’un carcan dans lequel elle s’est laissé enfermer. Marie (la peu médiatisée Violaine Fumeau qui gagne à être connue) est spontanée et généreuse. Elle est inspectrice du travail mais son comportement s’apparente à celui d’une inspectrice de police. Dans cette mise en scène qui place les personnages dans des espaces vitrés et cloisonnés et les emprisonne dans des cadres tranchants, elle virevolte, fait ce qu’elle veut, elle dérange. Elle est l’espoir d’une bouffée d’air pur, en opposition à l’univers d’oppression dans lequel sont plongés les personnages. L’hypocrisie et le cynisme progressivement envahissant, symbolisés par un Lambert Wilson dont la prestance et l’autorité naturelle renforcent l’authenticité, maintiennent une tension permanente qui empoigne le spectateur pour ne plus le lâcher.
- Copyright Claire Nicol
Si l’on peut regretter que le réalisateur ait choisi de n’adopter que le point de vue des salariés en ne réduisant le patron qu’à un infâme salaud irresponsable dépouillé de toute circonstance atténuante, la flamboyance et l’impétuosité qui animent son œuvre nous persuadent aisément de toute la capacité destructrice de la manipulation au service de méthodes de travail sans foi ni loi.
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