Le 10 mai 2024
Élodie Lélu signe un film féministe intergénérationnel pétri de jolies idées mais qui peine à convaincre pleinement.
- Réalisateur : Élodie Lélu
- Acteurs : Olivier Gourmet, Émilie Dequenne, Hélène Vincent, Tom Audenaert, Fantine Harduin, Aymeric Fougeron
- Genre : Comédie dramatique, Teen movie, Film pour ou sur la famille
- Nationalité : Français, Canadien, Belge
- Distributeur : Daisy Day Films
- Durée : 1h27mn
- Date de sortie : 22 mai 2024
- Plus d'informations : Site du distributeur
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Résumé : Alors que sa grand-mère Yvonne montre les premiers signes de la maladie d’Alzheimer, la jeune Manon, seize ans, vient vivre chez elle avec son beau-père, en attendant qu’une place en maison médicale se libère.
Critique : L’ouverture du film, entraînante, joue sur un décalage troublant, comme un premier malentendu entre le marketing et la réalité, avec sa piste électro qui diffuse une ambiance légère et son personnage principal en déphasage avec le sens des réalités. Jusque dans son titre, Colocs de choc pourrait laisser croire en sa nature comique ; mais dès après l’exposition, la note d’intention se fait plus claire : la légèreté et l’innocence, comme Yvonne dans son camion de pompier, se font un peu la malle. Colocs de choc n’a pas grand-chose d’une comédie, et après tout pourquoi pas. S’installe alors le trio qui nous accompagne dans la quête initiatique de Manon, et la lutte d’Yvonne contre l’évaporation de ses souvenirs.
- © Daisy Day Films 2024
Pétri de jolies idées, parfois très bien exploitées, le film laisse pourtant en bouche une tiédeur jamais tout à fait décevante, jamais tout à fait jouissive. La belle idée, c’est d’amener tous les personnages principaux dans la maison d’Yvonne, ou plutôt de les y contraindre, ce qui permet d’abord d’appuyer sur la délicatesse de trouver des lieux de soins adaptés pour les malades, et l’exigence qui incombe aux proches qui leur viennent en aide sans répit au quotidien. Mais surtout, cela les amène à investir les lieux où la mémoire intime et professionnelle d’Yvonne s’est construite, alors même que cet espace se délite dans sa tête. Comme si la permanence du lieu valait la permanence de sa mémoire. Comme si, avec ces décors qui n’ont pas évolué depuis des années, Yvonne s’était évertuée à prolonger l’instant.
Ce lieu inchangé est le théâtre de l’évolution de Manon, timide et jugée sans vergogne par ses pairs, et dont l’existence échappe de plus en plus à Yvonne. Poussée à grandir et à se rapprocher de l’image d’Épinal qu’elle a de sa mère, elle incarne ce qui semble être l’enjeu principal du film : la construction d’une conscience et d’un combat féministe, et la transmission de celui-ci entre les générations.
La mise en scène, au mieux sans artifice mais au pire sans éclat, laisse de l’espace à des comédiens talentueux, qui s’attachent à donner corps à ce récit initiatique, mais demeurent comme empêchés par un cadre trop restrictif et stéréotypé.
- © Daisy Day Films 2024
Car tout dans la construction de Manon, en tant que femme et en tant que féministe, est relativement attendu et convenu. Le film semble toujours vouloir crier ses bonnes intentions, et coche toutes les cases de l’éveil féministe, usant de filons trop évidents, comme lorsque les personnages se sentent le besoin de déconstruire verbalement les mécaniques patriarcales à l’œuvre sous nos yeux, ou que la vieillesse d’Yvonne est le prétexte pour la faire clamer des discours féministes devant sa télé, et qu’elle fait la leçon à sa petite-fille pour la dissuader d’acheter un soutien-gorge. Une fois devenue plus mature et ouvertement féministe, Manon s‘empressera de le jeter pour surligner au spectateur ce qu’il a déjà compris : Manon sera féministe comme sa grand-mère, et le combat continue. Le fond s’illustre par son caractère consensuel, et le procédé peut finir par lasser.
Pendant ce temps, la conclusion du récit s’amorce sans surprise, et quelques soubresauts scénaristiques peinent à éviter à Colocs de choc de demeurer joliment inoffensif.
Au fond, il reste de Colocs de choc une douce idée : s’il paraît impossible d’imposer à Yvonne un deuil à chaque fois qu’elle oublie une tragédie, elle n’est pas à l’abri d’un éternel émerveillement non plus.
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