Le 7 octobre 2012
- Acteur : Christian Clavier
La star des Visiteurs quitte la France pour Londres. Un exil fiscal ou, comme le dit son attaché de presse, un mal-être face aux critiques ? Retour sur un désamour qui n’a peut-être rien à voir avec Nicolas Sarkozy !
La star des Visiteurs quitte la France pour Londres. Un exil fiscal ou, comme le dit son attaché de presse, un mal-être face aux critiques ? Retour sur un désamour qui n’a peut-être rien à voir avec Nicolas Sarkozy !
Oubliées les années du Splendid des années 70-80, où il n’était pas aux yeux du public le plus populaire de la bande, Christian Clavier obtient sa revanche en 1993 avec Les Visiteurs. Alors que le cinéma français est mort, que la comédie populaire cherche un second souffle, le comédien associé à Jean-Marie Poiré pour le scénario, est à l’origine d’un phénomène de société aux côtés de Jean Reno, dans le rôle plein de tics verbaux, de Jacquouille. Plus de 13.7 millions de spectateurs lui firent un triomphe mérité au point que le comédien devenu la star française numéro 1 scrute le sommet du box-office pendant 4 ans : un Gérard Oury hanté par le souvenir de Louis de Funès lui permet de jouer de la grimace dans La soif de l’or, La Vengeance d’une blonde de Jeannot Szwarc n’est pas terrible, mais officie correctement au B.O. local, et en 1995 avec Depardieu il casse la baraque dans le nouveau Poiré, Les Anges gardiens. Le hic, c’est que pour les critiques, cela ne passe plus. Le montage haché du réalisateur exaspère, les expressions pour cours de récréations font office de formules faciles à éviter et cristallisent la mauvaise foi de certains critiques qui assassineront Les visiteurs 2 : les couloirs du temps en 98. Pour le public, ce n’est pas grave, la possibilité de rire avec des personnages désormais ancrés dans le patrimoine comique national est le plus important. En revanche, quand l’opportunisme pousse à un décalque américain inutile et franchement médiocre en 2001, il n’y a guère de "visiteurs" dans les salles françaises, alors qu’aux USA on se demande bien qui est ce Jean-Marie Gaubert (pseudo de Poiré pour l’occasion !). Le réalisateur est artistiquement mort en France. Il a perdu toute crédibilité et le four de Ma femme s’appelle... Maurice va l’achever.
Si deux Astérix, signés Zidi et Chabat permettent à Clavier de tenir encore le haut de l’affiche, on sent une méfiance en filigrane vis à vis du comédien de la part de l’équipe de Canal qui tient les rennes d’Astérix 2, et le personnage d’Astérix devient quasi secondaire dans le second volet, également le plus populaire à ce jour !
Parallèlement, les médias mettent en avant les affinités de l’acteur avec une droite française pas très populaire auprès de la majorité des artistes, en particulier auprès des bobos et des comiques qui égratignent Sarkozy, ministre sur-médiatisé à l’époque, et futur président pour lequel Clavier ne cachera jamais son amitié, sa proximité même. Il sera d’ailleurs de la fête le soir du Fouquet’s et une partie du public ne lui pardonnera pas, alors que la cote de popularité du président bling bling n’attend pas la crise pour fléchir.
Est-ce pour autant que l’insuccès de Clavier dans les années 2000, à l’échelle de sa popularité dans les années 90, s’explique par ses prises de position ? Pas forcément : à l’exception du hit de Gaumont L’enquête Corse, avec Jean Reno, en 2004, la plupart de ses films sont des nanars patentés : Lovely Rita est une cata que tout le monde souhaite rayer de son esprit, Albert est méchant de Hervé Palud avec Michel Serrault est juste mauvais quand, en 2006, L’entente Cordiale avec Daniel Auteuil est un désastre artistique que Warner France distributeur tentera de dissimuler le plus possible. La nullité du film dépasse largement le comédien, tout est juste désastreux dans ce projet aux résultats dantesques au box-office français. L’entente Cordiale était réalisé par Vincent de Brus avec lequel il avait tourné un an auparavant le sympathique L’antidote aux côtés de Jacques Villeret, autre déception commerciale, sûrement imméritée, mais dont l’impopularité s’expliquait par l’aspect très Gérard Oury et donc très démodé du projet. Déjà qu’en 1993 La Soif de l’or était limite, alors imaginez L’antidote en 2005. L’auberge Rouge de Gérard Krawczyk avec Balasko connaîtra un sort similaire. Trop "old school". En plus la critique est excessivement mauvaise, il y a alors une véritable envie d’en découdre avec le comédien.
Si on laissera volontiers de côté le cas des Bronzés 3 : amis pour la vie en 2006, gros coup de marketing et de nostalgie, que peu des 10 millions de spectateurs garderont dans leur coeur, on notera un rebond qualitatif dans la carrière de Jacquouille avec notamment Le Prix à payer d’Alexandra Leclère, film bobo destiné à un public urbain et non populaire. Lanvin, Pailhas et Nathalie Baye font passer la pilule de la présence du comédien dans un rôle stéréotypé très désagréable qui colle à l’idée que se font les spectateurs du comédien. Le film est un petit carton en salle. Décidément, la carrière de Gérard Clavier devient imprévisible. En 2009, l’acteur prend un pari audacieux et casse son image dans un thriller politique qui n’a rien de comique, au discours que l’on pourrait même interpréter comme étant de gauche. Un début de rédemption ? On salue le virage et l’interprétation de l’ancienne star du Splendid, mais, sorti en décembre, le film avec Clovis Cornillac n’est pas armé pour plaire au public qui préfère aller voir Arthur de Besson, Paranormal activity 1 ou Twilight 2. C’est qu’on entre en période de fêtes !
Déçu, sûrement meurtri, Clavier s’absente alors, toujours las des critiques sur ses amitiés avec Sarko ; il ne revient qu’en 2011 en tant qu’acteur...réalisateur ! Tendrait-il le bâton pour se faire battre ? Le public qui s’est déshabitué de sa présence sur le grand écran (finalement ce sont les épopées Napoléon et Les Misérables pour la télé qu’on garde en tête) et qui s’est tourné vers une nouvelle génération de comiques (Omar Sy en premier) ne répond toujours pas présent à l’appel malgré les retrouvailles avec Jean Reno et Muriel Robin. Sortie face à Contagion, Mon pire cauchemar, et surtout une semaine après Intouchables, le film est soigneusement évité par les spectateurs et copieusement détesté par les critiques. Un règlement de comptes ? Non, le film réitère une approche passéiste du genre ; il n’est pas toujours d’un très bon goût. On est loin de la subtilité d’écriture d’Intouchables avec Cluzet et Omar Sy qui concentre toutes les attentions !
Clavier qui a tourné depuis Les Profs de et avec Pierre-François Martin-Laval (sortie en juin 2013), aux côtés de François Morel, Isabelle Nanty et Arnaud Ducret, annonce dans la presse au début du mois d’octobre 2012 qu’il s’exile en Angleterre où il prépare une pièce en français qui sera jouée dans la capitale britannique. Selon son agent, il ne s’agit pas d’un exil fiscal qui ferait suite à l’élection de François Hollande, le président qui veut tout taxer, surtout les grosses fortunes, mais de la conséquence du désamour qu’il subit en France alors que les critiques le tancent et le relancent systématiquement sur ses affinités politiques.
N’étant pas dans les petits papiers de l’acteur, chacun est libre d’interpréter cette décision comme il lui plaît, car il est vrai que les critiques se sont acharnées à tort ou à raison sur lui, et que généralement les publications de communiqués de presse ne sont jamais que des mots destinés à calmer les polémiques auxquels il est difficile de croire.
©Universal France
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