Le 1er novembre 2021
D’une allure décousue et bavarde, Careless Crime réécrit une certaine histoire iranienne où la révolution islamique, en emportant le Shah dans sa course au pouvoir, mettait fin à tout un pan de la culture mondiale.
- Réalisateur : Shahram Mokri
- Acteurs : Babak Karimi, Razie Mansori, Abolfazl Kahani, Mohamad Sareban
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Iranien
- Distributeur : Damned Distribution
- Durée : 2h14mn
- Date de sortie : 3 novembre 2021
- Festival : Festival de Venise 2020
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Résumé : Quatre individus se préparent à incendier un cinéma lors d’une projection d’un film particulièrement attendu : des militaires ont retrouvé un missile non explosé, symbole d’un passé révolu et d’un présent encore indécis. En 1978, l’incendie du Cinéma Rex à Abadan, en Iran, a fait 478 morts. Certains le considèrent comme l’élément déclencheur de la révolution iranienne.
Critique : Il y a des films écrits comme des labyrinthes de paroles et d’images où tout semble à la fois confus et cohérent. Careless Crime est de ceux-là. L’œuvre de Shahram Mokri entraîne son spectateur dans un univers hirsute et merveilleux qui superpose des temporalités et des récits. Car le long-métrage est un film sur le cinéma au temps où en Iran, on associait la tyrannie du Shah à la culture occidentale et il fallait incendier les salles pour chasser tout ce qui ressemblait de près ou de loin à la domination américaine à travers le monde. Quatre bonhommes, aux allures de pieds nickelés, tentent de mettre le feu à une salle de cinéma où les Iraniens s’intéressent à des films sophistiqués qui mélangent soigneusement la réalité à la fiction. Pendant ce temps, on assiste au film lui-même sur l’écran qui va s’enflammer, où il est question d’une campagne étrange qu’un missile va embraser.
- Copyright Damned Films
Shahram Mokri se plaît à jouer avec les styles. Il manie le burlesque, l’ironie et la critique sévère dans une œuvre souvent musicale, déjantée et joyeuse. On est loin d’un certain cinéma iranien qui décrit un pays aux prises avec la contradiction entre tradition et modernité. Il y a même de la folie, presque à la façon d’un cinéma de Wes Anderson, qui se délecte à perdre ses spectateurs et semer le doute. Pour autant, la longueur du film a tendance à assommer parfois le spectateur, qui peut se décourager d’un fil du récit qui manie tous les genres. Nous sommes dans un Iran résolument moderne, où les pharmacies ne délivrent plus de psychotropes, mais confient cette tâche médicale aux musées du troisième art. La censure rode dans cet univers urbain et champêtre, qui sème à profusion des références cinématographiques et une réflexion profonde de l’art sur l’art.
- Copyright Damned Films
Accepter de se perdre dans ce tumulte de musique et de paroles, c’est déjà tout comprendre de cette drôle de narration. On perçoit la manipulation du gouvernement qui a déjà endormi les esprits. Règne dans les têtes l’illusion d’un régime ancien du Shah qui n’aurait été que dévotion au capitalisme américain. Shahram Mokri réécrit le récit de son pays dans un imaginaire plein de vie, de personnages haut en couleur, avec en fond d’écran la sensation d’une mélancolie qui perdure depuis des décennies en Iran.
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