Le 18 août 2018
Œuvre documentaire autant qu’essai, Caniba dessine les contours d’un spectre pour tenter d’approcher l’homme derrière le monstre. Il délivre ainsi une réflexion dérangeante mais passionnante sur la nature profonde de l’homme et ses pulsions enfouies.
- Réalisateurs : Lucien Castaing-Taylor - Verena Paravel
- Acteurs : Issei Sagawa, Jun Sagawa
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Distributeur : Norte Distribution
- Durée : 1h30mn
- Âge : Interdit aux moins de 18 ans
- Date de sortie : 22 août 2018
- Festival : Festival de Venise 2017
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– Prix spécial du Jury à la 74ème Mostra de Venise
Résumé : En 1981, Issei Sagawa, alors étudiant à Paris, défraya la chronique après qu’il ait - littéralement - dévoré le corps d’une de ses camarades de la Sorbonne. Affaibli par la maladie, il habite désormais avec son frère, Jun, qui prend soin de lui. Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor, cinéastes et anthropologues, sont partis à leur rencontre. "Caniba" est le fruit de ce face à face remarquable.
Notre avis : Véréna Paravel et Lucien Castaing-Taylor sont anthropologues avant d’être cinéastes, et cette approche scientifique devient un manifeste esthétique à chacun de leur film.
Ainsi après le remarqué Leviathan, qui cherchait le moyen de placer le spectateur en immersion avec les pêcheurs en plaçant des caméras numériques sur les corps et les surfaces entre ciel et terre, le travail qu’ils s’imposent ici conserve le même souci d’une approche du sujet au plus près, mais d’une manière différente puisqu’il s’agit là de pénétrer les pensées secrètes d’un homme reconnu monstre après un terrible homicide.
- © 2018 Norte Distribution. Tous droits réservés.
Issei Sagawa était étudiant à la Sorbonne en 1981 lorsqu’il assassina d’une balle dans le dos, au cours d’un dîner, sa petite amie de l’époque avant de la manger et la disséquer. Interné dans un hôpital psychiatrique et bénéficiant d’un non-lieu, il fut extradé au Japon quelques temps après où il continua de vivre libre en banlieue.
Entre apparitions télévisées et tournages de films érotiques, il publia surtout un manga qui décrit cette terrible soirée.
- © 2018 Norte Distribution. Tous droits réservés.
La caméra, si proche du visage, de sa bouche, semble vouloir abolir les distances entre Sagawa et le spectateur. Mais les cinéastes composent avec la mise au point et laissent des espaces flous, dans lesquels, en bougeant même de quelques centimètres, il peut se dissoudre. L’homme est très malade, il s’exprime avec lenteur et le regard, qui n’a rien de maléfique, se perd parfois dans les limbes. Tout flotte dans un entre-deux, entre répulsion et fascination, compassion et rejet absolu.
De rares pauses sont aménagées, lorsque nous découvrons par l’intermédiaire de souvenirs filmés son enfance banale et joyeuse avec son frère Jun, qui prend soin de lui aujourd’hui et qui est l’autre visage de ce documentaire.
- © 2018 Norte Distribution. Tous droits réservés.
Cette interaction entre les deux hommes est l’essence du film puisque devant les caméras les visages fragmentés se répondent et s’interrogent. Jun n’a de cesse d’essayer de comprendre son frère, son geste qu’il rejette mais qu’il essaye de prendre avec légèreté.
Lui aussi entretient une pulsion, des fantasmes inavouables, moins dangereux pour la vie d’autrui car solitaires, qu’il révèle pourtant devant nous à son frère.
Au bout de cet entretien atypique dans la forme et profondément dérangeant dans son propos, se révèle une réflexion sur la nature de l’homme, ses pulsions qu’il essaye d’enfouir au plus profond afin de vivre en société et qui, parfois, se réveillent.
Malheureusement frappé d’une interdiction aux moins de 18 ans, Caniba est pourtant de ces œuvres qui secouent pour longtemps nos opinions préconçues sur la nature humaine et la vie en société. Un film important.
- © 2018 Norte Distribution. Tous droits réservés.
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