Le 2 août 2019
Un chef-d’œuvre absolu et passionné, porté par deux comédiens exceptionnels, Depardieu et Adjani, au sommet de leur talent, qui donnent à voir l’exubérance de l’amour et de la folie créatrice.
- Réalisateur : Bruno Nuytten
- Acteurs : François Berléand, Isabelle Adjani, Gérard Depardieu, Alain Cuny, Madeleine Robinson, Philippe Clévenot, Danièle Lebrun, Roger Planchon, Jean-Pierre Sentier, Laurent Grévill, Maxime Leroux, Katrine Boorman
- Genre : Drame, Biopic
- Nationalité : Français
- Distributeur : Tamasa Distribution
- Durée : 2h55mn
- Reprise: 17 avril 2019
- Date de sortie : 7 décembre 1988
L'a vu
Veulent le voir
Résumé : Camille Claudel voue ses jours et ses nuits à sa passion, la sculpture. Soutenue par son père et son frère Paul, elle rêve d’entrer dans l’atelier du grand maître Auguste Rodin. Après lui avoir démontré son talent et sa détermination à travailler avec lui, Rodin l’engage comme apprentie avec son amie Jessie. Camille tombe rapidement éperdument amoureuse du maître. Elle devient son égérie et ravive son imagination quelque peu éteinte. Très vite, elle travaille de plus en plus pour Rodin…
Critique : En 1988, sortait peut-être le film qui fera d’Adjani la meilleure des actrices françaises, sur le destin incroyable et romantique de la grande, très grande, Camille Claudel. Cette femme géniale est sculpteur. Sculptrice, devrait-on dire, car elle figurait déjà parmi les féministes des avant-gardes, dans un contexte social où les hommes étaient les seuls à devenir des artistes autorisés, et où les pères avaient le droit de vie et de mort sur leurs enfants. Camille Claudel évolue dans un milieu bourgeois privilégié, avec un père aimant, une mère acariâtre et froide, des frères et sœurs dont le fameux Paul deviendra l’écrivain converti que l’on connaît. Elle gratte la terre, dans des couloirs sombres de glaise, à la recherche de la matière qui donnera vie à son œuvre. C’est elle, Camille, cette jeune femme passionnée, rebelle, c’est elle qui traverse les rues d’un pas assuré, suivie par un mouvement de caméra en travelling absolument prodigieux, c’est elle qui propose son talent au Maître sculpteur, Rodin. C’est surtout elle, Camille, qui, après avoir été l’élève du Maître, donnera naissance à une œuvre immense et passionnée, dont d’ailleurs, prise de folie, elle en détruira une grande partie.
Camille Claudel n’aurait jamais été le film qu’il est, sans la présence d’Adjani et Depardieu. Les deux monstres de cinéma s’aiment, s’attirent, s’idolâtrent, se rejettent, dans une explosion d’émotions et de couleurs. La musique accompagne quasiment d’un bout à l’autre du film ce récit magnifique d’amour, de passion et de douleur, avec en toile de fond, ces marbres que les deux comédiens agrippent avec leurs mains, à la recherche de l’œuvre qui se cache sous la pierre. Nuytten. qui faisait là son premier film en tant que réalisateur, a créé une œuvre sensorielle et solaire, habitée par des comédiens puissants. La voix d’Alain Cuny, qui incarne le père de Claudel, continue de résonner à la fin du film, quand il entonne avec profondeur les versets poétiques de Paul Claudel. Et que dire des cris pétris d’alcool d’Isabelle Adjani, quand elle supplie son amant sous les fenêtres de son appartement, pour qu’il sorte de son mutisme ? Que dire de la présence de Depardieu qui semble devenu le double des propres sculptures de Rodin ? Camille Claudel, qui a bénéficié d’une restauration à l’initiative de Tamasa Distribution, fait honneur à un cinéma, peut-être un peu perdu aujourd’hui, où la dimension économique comptait moins que l’engagement de ses comédiens et de ses techniciens à donner vie à une œuvre d’art.
Le récit est construit en deux parties. La première raconte l’accession de la jeune Camille Claudel à la maturité artistique. On voit les deux êtres s’aimer, faire l’amour, apprendre à partir du talent de l’un et de l’autre. On voit les œuvres se faire dans un Paris habité par le jeune Debussy et tous les autres artistes du début du 20e siècle. La seconde partie raconte la déchéance psychique et sentimentale de l’artiste. Claudel s’écrase dans sa relation avec Rodin, sans la moindre concession. Elle se livre sans nuance à sa folie dévastatrice. Tout le corps et le visage d’Isabelle Adjani se transforment au fur et à mesure de la chute en enfer de son personnage. La démence, l’alcoolisme, la démesure prennent la place de la jeune femme si belle, si lumineuse de la première partie. La puissance de jeu de la comédienne est telle que même tous les prix qu’elle a reçus semblent dérisoires. En vérité, Adjani inscrit, grâce à son implication dans le film, une contribution supplémentaire à ce qui fera date dans l’histoire du cinéma.
L’occasion est donnée à la jeune génération de revoir ou de découvrir un film immense. Plus largement, l’occasion est donnée à chacun d’entre nous de nous rappeler que la domination des hommes sur les femmes, n’est pas une affaire nouvelle et surtout qu’il est plus qu’indispensable de nous précipiter dans le Musée de la rue de Varenne, afin de nous nourrir de l’œuvre puissante et éternelle de la sculptrice, Camille Claudel.
- © Tamasa 2019
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.