Le 5 août 2019
- Scénariste : Corrado Mastantuono>
- Dessinateur : Corrado Mastantuono
- Genre : Science-fiction
- Editeur : MOSQUITO
- Famille : BD Franco-belge
- Date de sortie : 3 mai 2019
- Durée : 1
Buzzer et Taille-la-route nous emmène dans un monde de science-fiction baroque et dangereux, au cœur d’un curieux pénitencier nommé la machine à Jaspiner. Nous allons y suivre un détenu, Buzzer, de son arrestation à sa tentative d’évasion, et les liens d’amitié qu’il va nouer avec un autre prisonnier, Taille-la-route.
Résumé : Corrado Mastantuono nous sert un récit offrant une triste vision de la nature humaine. Jouant sur les bassesses et les folies des uns et des autres, la vie dans ce pénitencier psychédélique devient vite un enfer pour tous, autant geôliers que prisonniers.
Une note liminaire nous avertit d’office, cette histoire est issue d’une série parues en magazine dans le but de les unir et de leur donner « un souffle plus ample ». Présentation de l’univers, des personnages, pages de croquis nous montrant les étapes intermédiaires de travail – très intéressantes quand vous aurez lu la BD et que vous les reprendrez pour retrouvez petit à petit de quelles cases elles ont été les brouillons de travail – et l’histoire démarre par un petit prologue qui pose tout de suite des personnages secondaires et surtout l’ambiance de ce pénitencier.
Puis nous découvrons Buzzer, qui sera le fil directeur tout au long du récit, le personnage que nous suivrons et auquel on s’attachera malgré ses défauts. Peut-être devrions-nous dire pour ses défauts, car ce sont ces derniers qui le rendent très humains.
Le récit nous donne un aperçu, et si l’on a un regret, c’est que cette histoire ne soit pas plus longue. On sent parfois une accélération qui créé chez nous un effet de manque. Comme s’il manquait des pans du récit. On se rappelle alors la note liminaire qui nous a prévenus, il s’agit de regrouper des anciennes histoires, des reliques, issues d’un magazine qui a suspendu la série.
A la lecture, on se demande bien pourquoi cette série a été suspendue d’ailleurs. Car ce pénitencier, sorte d’organisme technologique, de lieu, de ville dans la ville, de monde dans le monde, avec ses habitants, relève tellement de secrets, de surprises, qu’on ne peut que prendre plaisir à en comprendre les rouages au fur et à mesure de l’histoire.
On sent que Taille-la-route n’a pas assez d’espace pour trouver sa place. Que des intrigues de fond manquent d’espace pour se développer. Et du coup le pari est tenu, Mastantuono crée des liens entre ces histoires et solidifie un univers cohérent autant par son fonctionnement que par ses absurdités.
Car ce monde est aussi basé sur l’absurde. L’importance accordée aux chapeaux, les animaux dans la jungle du pénitencier, et surtout le dessin complètement déjanté.
Corrado Mastantuono / Mosquito
Mastantuono prend les pinceaux et nous sert un trait déroutant. Précis, réaliste pour des personnages caricaturaux, des décors loufoques mais cohérents dans leur folie, le dessin est incroyable. Techniquement, le trait se charge de hachures pour accentuer les reliefs, le sombre. Mais ces mêmes ombres sont marquées par d’énormes aplats de noir savamment posés. Créant parfois d’étranges formes géométriques dans les cases où les personnages perdent imperceptiblement leur équilibre. De même qu’ils perdent leur équilibre mental dans cette folie corruptrice qui règne, dans cette absurde logique où les bassesses humaines refont surface encore et encore.
Les couleurs enrichissent la floraison de détails qui peuplent chacune des cases, il n’y a rien qui soit ordonné dans la machine à Jaspiner. Tout penche, se mélange, se croise, les caisses débordent d’outils, de fils, d’objets, les murs de pierres, et le sol de plantes ou de tentacules tubulaires d’acier. Impossible de se retrouver dans l’architecture des lieux. D’ailleurs, le langage même des habitants de la machine à Jaspiner est hermétique. Unité de temps et d’espace sont des noms sortis de nulle part. Mais au bout d’un moment, on s’habitue au langage, car le fond du récit reste clair et accessible. Et ce langage fait partie des couches d’immersion dans ce monde qui nous échappe et qu’on ne peut que saisir par brides.
Buzzer et Taille-La-Route met en scène un univers fou et un personnage attachant, Buzzer, qui sera entraîné au fond de l’horreur. Corrado Mastantuono nous offre ainsi un récit drôle mais tragique, absurde mais cohérent, loufoque mais touchant, comportant d’énormes pans d’ombre que l’on regrette de ne pas voir se développer.
48 pages – 14€
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