Réalise-moi un tableau
Le 26 janvier 2012
En tentant le pari de donner vie à l’un des plus célèbres tableaux de la Renaissance, Lech Majewski signe une oeuvre visuellement séduisante, à défaut d’être captivante.
- Réalisateur : Lech Majewski
- Acteurs : Charlotte Rampling, Rutger Hauer, Michael York
- Genre : Drame, Historique
- Nationalité : Polonais, Suédois
- Durée : 1h32mn
- Titre original : The Mill and the Cross
- Date de sortie : 28 décembre 2011
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En tentant le pari de donner vie à l’un des plus célèbres tableaux de la Renaissance, Lech Majewski signe une oeuvre visuellement séduisante, à défaut d’être captivante.
L’argument : Année 1564, alors que les Flandres subissent l’occupation brutale des Espagnols, Pieter Bruegel l’Ancien, achève son chef d’œuvre "Le Portement de la croix", où derrière la Passion du Christ, on peut lire la chronique tourmentée d’un pays en plein chaos.
Le film plonge littéralement le spectateur dans le tableau et suit le parcours d’une douzaine de personnages au temps des guerres de religions. Leurs histoires s’entrelacent dans de vastes paysages peuplés de villageois et de cavaliers rouges. Parmi eux Bruegel lui-même, son ami le collectionneur Nicholas Jonghelinck et la Vierge Marie.
Notre avis : Même si on le connaît surtout pour avoir été le scénariste du biopic consacré au peintre néo-expressionniste Jean-Michel Basquiat, Lech Majewski est le réalisateur de onze films. Bruegel, le moulin et la croix est sans doute celui ayant connu la plus grande couverture médiatique. Ceci s’explique facilement : audacieux et fascinant pari que de construire un scénario à partir d’un tableau (Le Portement de croix, 1564) et ainsi donner vie aux différents personnages présents, tout en rendant un fervent hommage à son auteur : Pieter Brueghel l’Ancien, considéré comme l’une des quatre grandes figures de la peinture flamande.
L’auteur a la bonne idée de nous plonger littéralement dans le tableau, expérience d’autant plus enrichissante que visuellement, le spectacle est magnifique. L’amour de Majewski et du co-scénariste Michael Gibson (historien d’art de profession) pour le peintre de la Renaissance transpire à chaque scène, nous offrant quelques très belles séquences. La tâche n’était pas aisée, mais c’est aussi toute une époque qui prend vie devant nous. Une époque de pauvreté, mais surtout de douleur, à l’image de scènes d’une violence quasi-insoutenable lorsque les soldats espagnols agressent des villageois sans défense. On apprécie aussi de voir Bruegel incarné par l’excellent Rutger Hauer, devenu rare dans le cinéma autre que la série B, intervenir directement dans le récit. Il influence directement le cours de l’action et des évènements, en croisant des figures notables de l’époque, telles que le collectionneur d’art Nicholas Jonghelinck (Michael York, l’inoubliable acteur de Cabaret, un peu perdu de vue depuis quelques années) en tête.
Malgré ses qualités esthétiques et d’autres bonnes idées narratives, le film ne convainc pas pour autant. Majewski a beau maîtriser l’oeuvre du peintre et son temps, il semble moins à l’aise quand il s’agit de manier le langage cinématographique. Car si l’on excepte sa façon de filmer le moulin du titre, faisant de celui-ci une structure aussi belle que crépusculaire (certains plans sont saisissants), les enjeux narratifs manquent de portée et le rythme végétatif provoque des baisses constantes d’attention.
Le manque de liant entre les différentes scènes et l’impossibilité de Majewski à leur insuffler un quelconque souffle s’avèrent fatales, quand la quasi-absence de dialogues assoit un peu plus le mutisme d’une oeuvre figée dans l’ennui et la maladresse. Copier l’art pictural jusque dans le refus du mot nécessitait un talent contemplatif qu’on ne fait qu’entre-apercevoir, au grand désespoir d’une émotion qui ne surgit que rarement.
Bref, une faute de goût qu’on ne conseillera même pas aux amateurs de cinéma contemplatif qui trouveront des toiles bien plus évocatrices ailleurs.
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