Bourrasque de printemps – Mizumaru Anzai - la chronique Manga

Critique : Mizumaru Anzai raconte ces récits à la première personne. Tout se déroule le plus souvent dans le Japon des années soixante/soixante-dix que l’auteur a bien connu.

Ces histoires courtes nous entraînent dans la vie de personnages que nous découvrons le temps de quelques pages. Ces situations parfois banalement quotidiennes, parfois extraordinaires, se terminent de manière étonnante. Non pas par une chute originale, mais par un instant où l’on pourrait attendre une suite… qui ne vient pas. Une fin suspendue qui nous laisse dans la réflexion ou l’émotion. Des dialogues courts, allant à l’essentiel, ou alors des textes partant dans une douce poésie, là aussi brève. Il ne faut que quelques mots à Mizumaru Anzai pour nous plonger dans une ambiance, pour nous entraîner dans ses instants volés.

Ces petites nouvelles graphiques utilisent quasiment toutes le « je » mais suivent un personnage différent à chaque fois, voire parfois elles ne comportent pas de personnages, comme celle qui ouvre le recueil. Enfant brun, jeune homme blond, homme, femme, peu importe, on retrouve toujours le verbe de Mizumaru Anzai et la même manière de parler, comme si au-delà des différences, ces histoires ne racontaient qu’une seule vie, plusieurs moments d’un long chemin, dévoilant des émotions en demi-teinte que nous avons tous vécu.

© Mizumaru Anzai / IMHO pour la traduction française

Le dessin, tout comme le texte, tire vers le minimalisme. Mizumaru Anzai opte pour un style naïf, à l’inverse du manga mainstream de son époque. Rien n’est détaillé, quelques traits suffisent à esquisser un bateau, des nappes de noir ourlés de blanc évoquent la mer et ses vagues, poules et humains ont les mêmes yeux. Malgré ce choix drastique, Mizumaru Anzai parvient à faire naître l’émotion. Quelques hachures apportent parfois du volume. Mais la plupart du temps, la perspective est cassée, les décors posés au début d’une histoire disparaissent et les têtes des personnages sont seules dans les cases. La composition continue ce choix de la simplicité : pas de case tordue ou de mise en scène baroque des planches. Les cases s’enchaînent dans des champs et contrechamps, des vues de paysage silencieux, parfois un peu d’action, mais rarement. Et toujours d’une manière qui nous surprend. Le trait de Mizumaru Anzai rejoint la même épure que ses dialogues, dans une approche naïve du dessin, pour des récits profondément intimes.

Bourrasque de printemps nous dévoile des histoires étonnantes par leur légèreté, autant narrative que graphique, une approche des profondeurs de l’intime par un dessin et une narration qui semble rester en surface. Un contraste surprenant à découvrir.