Vrai faux Elite au Cap
Le 25 mai 2020
En adoptant un registre moins excessif et caricatural que son aînée espagnole Elite, cette deuxième production sud-africaine de Netflix nous abandonne sur un final dont on se doute vite, mais où hélas rien n’est clair. Loin s’en faut. Heureusement que la suite semble a priori inévitable…
- Réalisateurs : Nosipho Dumisa - Daryne Joshua
- Acteurs : Ama Qamata, Khosi Ngema, Gail Mabalane
- Nationalité : Sud-africain
- : Netflix
- Durée : 6 épisodes de 43 à 54 minutes.
- VOD : NETFLIX
- Scénariste : Nosipho Dumisa
- Genre : Drame, Société
- Titre original : Blood & Water
- Âge : Interdit aux moins de 13 ans
- Date de sortie : 20 mai 2020
- Plus d'informations : Blood & Water
L'a vu
Veut la voir
Résumé : Après l’avoir croisée à une fête, une ado du Cap cherche à savoir si la championne de natation d’une école privée est bien sa sœur qui a été enlevée à la naissance.
Critique Commençons par préciser que Blood & Water, deuxième série sud-africaine Netflix (1), est inspirée d’un fait divers qui s’est déroulé au milieu des années 90 au Cap et dont le dénouement judiciaire a eu lieu en 2016. L’une des protagonistes en a livré le récit dans un livre paru l’an dernier (2). Comme notre politique est d’éviter de spoiler, nous ne dirons pas un mot sur la vraie histoire et nous limiterons à notre point de vue sur la fiction.
Afrique du Sud, Le Cap. Puleng Khumalo fête un anniversaire dans une ambiance plus que plombée. On célèbre celui de sa sœur Phume disparue, ou plutôt enlevée, après sa naissance. Depuis dix-sept ans, plus aucun signe de vie. Ajoutez à cela une enquête qui impliquerait son père et des relations tendues avec sa mère. Suite à un concours de circonstances qu’on ne détaillera pas, Puleng intègre le très huppé lycée Parkhurst, où elle côtoie une certaine Fikile Bhele, fille de famille fortunée, probable future sélectionnée en natation pour les JO, instragameuse cotée et candidate aux élections de déléguée du lycée. Bref, la « star » de Parkhurst. Sauf qu’elle est née le même jour que la sœur kidnappée de Puleng et qu’elles se ressemblent un peu. De là à penser que ? Oui, et sans spoiler, on y pense très très très vite, si bien qu’on se laisse embarquer dans une intrigue « à charge », puisque que l’affaire semblerait pliée. Tellement pliée que les scénaristes ne s’encombrent pas de finesse pour enfiler rebondissements et révélations à gros sabots, grâce à l’enquête menée par Puleng et un ami, qui recherchent surtout le pourquoi du comment. Ou l’inverse.
- Copyright Netflix
Les épisodes s’enchaînent à un rythme honnêtement captivant, avec le bon dosage de cliffhangers et twists. Bien sûr, ce lycée Parkhurst (3) n’est pas sans rappeler celui de Elite, mais en nettement moins caricatural. Si une majorité de fils et filles à papa en forme le gros des troupes - et ça fume, boit, couche, deale et fait la bringue -, les parents, eux, sont là, veillent au grain, et les ados y sont bien moins en roue libre surréaliste et lunaire que dans sa cousine espagnole. Blood & Water a finalement peu à voir avec Elite, en raison de son format court, qui évite la dilution avec de pseudo-sous intrigues pour remplir. Il y en a, mais elles sont plus centrées sur de mini-portraits de personnages secondaires qui font progresser, voire salement basculer des situations. La série aborde, via quelques touches, les cicatrices pas totalement refermées de la société sud-africaine, son passé avec la communauté noire, il va sans dire.
On y montre assez bien aussi, en énième guise d’avertissement, l’addiction aux smartphones et réseaux sociaux. Entre harcèlement virtuel et découvertes, en trois clics sur Facebook ou Instagram, d’informations sur de possibles personnes impliquées dans la disparition de la sœur de Puleng, Blood & Water nous démontre que tout ce que nous publions, commentons, likons ou partageons, en toute naïveté ou sincérité, même en privé, sont autant de micros-traces qui peuvent à tout moment nous exploser à la figure.
Mais là où Blood & Water se distingue du simple teen drama, sans en révolutionner pour autant le genre, c’est par une bascule qui s’opère insidieusement dans les derniers épisodes. Alors que les choses semblent a priori s’éclaircir, elles entraînent nos adolescents dans des comportements plus sombres. La série gagne une forme de maturité, et son final renversant (vous comprendrez) abandonne certains personnages - et pas des moindres - dans un cliffhanger anxiogène, voire terrible quant à sa possible résolution. Comme la série est numéro 1 aux USA, mais aussi en France, Bahamas, Niger, Libye, Afrique du Sud bien sûr, ou numéro 2 au Brésil, etc. nous ne prendrons pas trop de risque en pariant que la saison 2 devrait être vite dans les tuyaux.
En résumé, c’est une bonne petite série, honnêtement réalisée et interprétée (Ama Qamata, Khosi Ngema et Thabang Molaba devraient logiquement avoir du succès sur leurs réseaux sociaux au-delà de l’Afrique du Sud), dont on espère qu’elle bénéficiera d’un budget rallongé pour la suite, histoire de profiter de plus de décors, à commencer par les plages du Cap limitées à trois malheureux plans aériens en boucle, certainement échappés d’une banque d’images.
Bref, l’été arrive, et la saison des teen drama semble bien ouverte sur Netflix.
- Copyright Netflix
(1) La première est Queen Sono (6 épisodes), sortie en février 2020, qui met en scène la super espionne Queen Solo, luttant contre trafiquants, mafias, etc. On découvre qu’elle est la fille d’une militante anti-apartheid assassinée. Nous confessons honteusement que nous n’avons pas tenu au-delà de deux épisodes. Désolé…
(2) Zephany : Two mothers, one daughter, an astonishing true story – Édition Tafelberg. Uniquement en anglais pour l’instant sur les sites de ventes en ligne usuels.
(3) Il existe bien une école Parkhurst au Cap, mais c’est un collège. Parkhurst est le nom d’une pédagogue américaine à qui on doit la méthode Dalton au début du XXe siècle. Cette méthode laisse les élèves, après avoir signé un « contrat », apprendre librement à l’aide de fiches et outils d’auto-contrôle. Un esprit que l’on retrouve dans la pédagogie du lycée dans la série, où les élèves sont très autonomes, assez pour enquêter… et sécher les cours pour leurs investigations.
- Copyright Netflix
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.