Le 2 avril 2016
Un thriller psychologique bien maîtrisé, distillant une ambiance vénéneuse qui trouble autant qu’elle fascine. Au-delà de l’exercice de style, ce premier long grisant opère une véritable réflexion sur la crise des migrants que traverse l’Europe.
- Réalisateur : Joyce A. Nashawati
- Acteurs : Louis-Do de Lencquesaing, Yannis Stankoglou, Ziad Bakri, Mimi Denissi
- Genre : Drame, Fantastique
- Nationalité : Français
- Durée : 1h28
- Date de sortie : 20 avril 2016
L'a vu
Veut le voir
Un thriller psychologique bien maîtrisé, distillant une ambiance vénéneuse qui trouble autant qu’elle fascine. Au-delà de l’exercice de style étouffant et du cinéma de genre de science-fiction, ce premier long grisant opère une réflexion pertinente sur la crise des migrants que traverse l’Europe.
L’argument : Grèce. Futur proche. Une station balnéaire frappée par une vague de chaleur. L’eau se fait rare et la violence est prête à exploser. Ashraf, immigré solitaire, garde la villa d’une famille française en son absence. Dans ce paysage aride, écrasé par le soleil, il est arrêté par un policier pour un contrôle de papiers…
Copyright Pretty Pictures
Notre avis : La jeune réalisatrice Joyce A. Nashawati s’était faite remarquer pour ses trois-courts métrages, et notamment La morsure qui avait obtenu le Grand Prix au Festival du Film Fantastique de Gérardmer en 2010. Avec Blind sun, elle signe son premier long-métrage, un thriller psychologique.
Le film s’intéresse à un jeune immigré musulman, Ashraf, venu en Grèce pour surveiller une villa appartenant à une famille française. Dès son arrivée, il est confronté à des obstacles, notamment le contrôle d’un policier qui lui confisque ses papiers.
La jeune réalisatrice évoque sans conteste la situation actuelle alarmante des demandeurs d’asile qui arrivent par milliers en Grèce, provoquant le racisme des habitants. En filigrane, elle signale également la situation économique de la Grèce qui cristallise les préoccupations des habitants.
La chaleur et le manque d’eau conduisent Ashraf à perdre progressivement pied avec la réalité, d’autant qu’il se retrouve totalement isolé dans la villa qu’il surveille. Comme dans Le Horla de Maupassant, il va être confronté à une présence fantomatique qui semble le persécuter. Toute la question est alors de savoir s’il s’agit de démons intérieurs ou de gens hostiles à son égard.
Copyright Pretty Pictures
Quelle est l’origine de l’ombre que l’on voit défiler à plusieurs reprises ? Et qui est à l’origine des nombreux dégâts commis dans la villa ? Le mystère reste entier et l’ambiance est aussi lourde que le soleil de Grèce semble accablant.
L’angoisse du personnage principal peut être due à sa difficulté de trouver sa place dans ce monde, d’autant qu’il en a conscience. Il est confronté non seulement à son statut de migrant dans un pays étranger – pauvre de surcroît – mais aussi par sa fonction de gardien d’une villa de bourgeois, milieu qui n’est absolument pas le sien.
Tout au long du film, Ashraf erre comme une âme en souffrance dans la villa et dans tous les paysages extérieurs environnants, ne parvenant jamais à trouver le moindre réconfort ou la moindre aide d’un tiers. La considération sociale du film est particulièrement bien vue et fortement liée à une actualité brûlante.
Copyright Pretty Pictures
Alors que d’habitude la peur est liée à l’obscurité, Joyce A. Nashawati réussit l’exploit de créer un climat angoissant dans des paysages extrêmement lumineux. Ici, tout le film se passe sous un soleil de plomb, d’où son titre. Il s’achève de façon énigmatique et ouverte, s’inscrivant dans la droite lignée du reste du film.
Avec son physique longiligne et sec, l’acteur Ziad Bakri incarne de façon crédible le rôle d’Ashraf, un immigré évoluant dans un pays qui n’est pas le sien, avec un sentiment de malaise permanent. S’il occupe très largement l’espace, l’acteur n’est pas seul. On notera notamment dans un rôle secondaire pertinent, la présence de Louis-Do de Lencquesaing, en bourgeois hautain.
Malgré la modestie de son budget, la jeune réalisatrice tire le meilleur parti de ses moindres décors. D’autant qu’elle bénéficie d’une superbe photographie.
Au final, Joyce A. Nashawati livre avec Blind sun un premier long métrage convaincant, ne croulant pas sous des références écrasantes, et trace elle-même son propre sillon. Voilà un premier essai pour le moins prometteur.
Copyright Pretty Pictures
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.