Bis repetita - Émilie Noblet - critique

Critique : Delphine est professeure de latin et, chaque année, perd une bonne part de ses élèves, ce qui risque de compromettre son poste au sein du lycée où elle travaille. Elle est tout l’inverse de ce prof de mathématiques qui ouvre le générique, avec ces lycéens motivés, dynamiques, bourrés d’énergie. Alors, pour sauver les meubles, elle met des notes proches de l’excellence, sans se soucier en réalité du contenu de ses enseignements et de la progression réelle des jeunes. Que les professeurs intéressés de découvrir les représentations de leur métier sur un écran ne s’y trompent pas, Bis repetita est une comédie légère conçue pour s’amuser sans se tordre le cerveau. Voilà enfin un film sur l’Éducation nationale qui ne s’enferme pas dans un mélodrame social en dénonçant les carences du système, la baisse de niveau des élèves, et le désarroi des enseignants. Au contraire, Bis repetita se moque des conventions, quitte à tomber dans le grotesque et la farce potache.

Deux acteurs absolument époustouflants se donnent la voix. D’un côté, il y a Louise Bourgoin dans la peau de cette prof tout aussi désabusée que désinvolte, qui entraîne, malgré elle, son groupe d’élèves à un concours européen de latin où l’échec est couru d’avance. En face, il y a Xavier Lacaille dans la peau d’un chercheur en langues mortes, passionné et hors sol, qui développe dans sa thèse une pseudo théorie d’apprentissage des parlers anciens. Au milieu d’eux, les gamins se donnent le change, certes dans des rôles d’adolescents stéréotypés mais particulièrement drôles.

Copyright Stéphanie Branchu - Topshot Film - Why Not Productions

Bis repetita s’assume comme une œuvre légère, insouciante, où l’invraisemblance constitue le moteur même du rire. Les personnages en font des tonnes, dans une théâtralité totale, avec des dialogues déjantés. Curieusement, grâce à la mise en scène pourtant très classique, on croit à ce concours où la professeure organise la triche afin de faire gagner ses élèves. La référence à Harry Potter est évidente dans cette sorte d’amphithéâtre romain, pas loin de faire penser à la fameuse école de Poudlard sortie de l’imaginaire de J. K. Rowling. Émilie Noblet joue avec les codes du cinéma au risque de se perdre dans le non-sens. Elle montre combien il est difficile de faire rire, et pourtant y parvient avec brio sans tomber dans le grotesque.

Bis repetita ne sera ni le film de l’année, mais encore moins le navet de 2024. Voilà une œuvre sincère, pétillante, où le spectateur est assuré de s’amuser. Les acteurs y sont pour beaucoup. Ils donnent au film une énergie véritable. Et le meilleur sans doute se trouve dans la fameuse chanson de Céline Dion "Pour que tu m’aimes encore" que Louise Bourgoin et son acolyte Xavier Lacaille entament dans un latin parfait à l’intérieur du bus qui les conduit à Naples. Signe aussi que les deux comédiens n’ont pas peur du ridicule, du moment que le spectateur s’amuse et qu’eux-mêmes y trouvent la joie de tourner ensemble.