Good bye Clinton !
Le 28 avril 2004
Humour noir et diablement efficace dans une Bosnie hantée par ses fantômes, mais néanmoins porteuse d’espoir.


- Réalisateur : Pjer Zalica
- Acteur : Enis Beslagic
- Genre : Drame
- Nationalité : Bosniaque

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– Durée : 1h45mn
Humour noir et diablement efficace dans une Bosnie hantée par ses fantômes, mais néanmoins porteuse d’espoir.
L’argument : La petite ville de Tesanj en Bosnie est en pleine ébullition. Le président américain Bill Clinton annonce sa venue imminente. Branle-bas de combat dans la petite bourgade : la ville a sept jours pour se redonner une apparence respectable et faire disparaître les séquelles de la guerre : prostitution, corruption, crime, racisme, folie... Ce qui relève de l’exploit !
Notre avis : Comment évoquer une guerre (le conflit en ex-Yougoslavie) qui a connu épuration ethnique et massacres dans une relative indifférence ? Dix ans après, les consciences se sont réveillées, dans la honte. Dans Au feu !, la communauté internationale et les médias en prennent pour leur grade. À mille lieues d’un esprit revanchard ou accusateur, le réalisateur Pjer Zalica a choisi la meilleure des armes : l’humour. Mais un humour noir, grinçant, tellement cynique qu’il n’en est que plus efficace. En privilégiant une situation absurde et cocasse, Zalica réussit la prouesse de dépeindre une Bosnie complexe, hantée par ses fantômes, mais néanmoins porteuse d’espoir.
Au feu ! est une tragi-comédie au sens premier du terme. La mise en scène et les personnages sont à l’image d’un pays qui doit malgré tout se reconstruire après le chaos. Il y ce père dont le fils a disparu pendant la guerre, tandis qu’un autre tombe amoureux ; il y a ces prostituées forcées à qui on vole leur passeport, tandis qu’une chanteuse, célébrité locale, revient au pays. Le retour à la normale et le pardon semblent impossibles car on ne peut oublier les tueries fratricides. Et pourtant... Imperceptiblement, la caméra de Zalica capte ces moments où l’optimisme pointe son nez. C’est lentement que la Bosnie et la Serbie dépasseront l’horreur, nul besoin de l’Occident et de ses bonnes intentions pour cicatriser les blessures. Les exigences arrogantes des Américains sont grotesques et indifférentes à la réalité : ils ne veulent pas voir ce qui s’est passé, il faut leur donner un peuple souriant, chaleureux et tolérant. Avec tendresse et lucidité, Pjer Zalica raconte le difficile chemin de la reconstruction : une leçon bouleversante.
Coup d’œil : Présenté dans de nombreux festivals, Au feu ! a reçu une pluie de récompenses dont le Léopard d’argent à Locarno, le grand prix et le prix d’interprétation masculine à Marrakech ainsi que six prix à Sarajevo.