Le 13 octobre 2018
- Festival : ASNIFF 2018
Avec une sélection qui aura tenu toutes ses promesses, la dixième édition de l’Absurde Séance International Film Festival se sera révélée aussi impeccablement soignée que joyeusement festive.
Se targuant allègrement d’avoir peaufiné une programmation aux petits oignons, ce dixième épisode des festivités dédiées au film de genre et aux (re)découvertes de pépites cinématographiques (avant-premières, nanars cultes, inédits…) n’aura cette année pas démérité, déroulant un tableau de chasse sans précédent, composé d’une pléiade d’illustres invités (l’ex-actrice pornographique Brigitte Lahaie, le réalisateur Luigi Cozzi et l’actrice Caroline Munro venus présenter leur (mé)fait cinématographique Le choc des étoiles, Lucio A. Rojas, pour son intense Trauma, Brendan Steere présentant son petit dernier, Velocipastor, ainsi que le jeune réalisateur Jérémie Guez, dans le cadre de l’avant-première française de Tu ne tueras point – notre critique emballée ici), d’un jury tout aussi éclatant (les journalistes Julien Sévéon, Alexandre Hervaud, Amandine Glevarec et Enlil Albanna), et de longs-métrages aux origines diverses, mais aux desseins analogues : livrer d’intenses preuves du savoir-faire en matière de cinéma. C’est peu dire que nous ne fûmes pas déçus.
- (c) Nat Wachsberger, Patrick Wachsberger
- Starcrash - le choc des étoiles
Parmi une sélection éclectique élaborée par Jean-Maurice Bigeard et son équipe obstinée (le nanar attendu Le choc des étoiles, le premier film des frères Coen remasterisé, l’impitoyable Trauma, le déjanté The cop baby, ou l’avant-première du prochain film de Lars von Trier, The house that Jack built), il convient d’effectuer un retour sur ce qui aura constitué le florilège de ces réjouissants moments.
SOBIBOR : héroïque et déchirante Histoire
Davantage connu en Russie pour son travail d’acteur (nous avons pu le voir, dans nos contrées, dans La taupe ou Wanted – choisis ton destin), Konstantin Khabenskiy endosse pour la première fois le costume de réalisateur – sans toutefois délaisser celui d’acteur, puisqu’il incarne également le meneur Alexander Pechersky, face à un Christophe Lambert tiré à quatre épingles dans un costume nazi – pour relater l’une des rares révoltes juives survenues dans un camp d’extermination. Ne nous épargnant nullement, dans la description de la vie du camp, les sévices et autres humiliations quotidiennes infligés au peuple juif par les serviteurs du Troisième Reich, le réalisateur s’intéresse à la difficile mise en place d’un plan de fuite fomenté par une minorité de prisonniers. Impérialement mis en image, le camp devient ce lieu où l’humanité est mise au ban, aussi bien pour les geôliers que pour les détenus réifiés, qui, une fois les grilles de cet abîme franchies et dans un mouvement alenti et onirique, se jettent à corps perdus vers leur vie arrachée.
- © www.lukasvisuals.co.uk
- Christophe Lambert dans Sobibor
BUFFALO BOYS : un western indonésien jubilatoire
Connu pour son travail de producteur (le nerveux Headshot, mais également Hitman – agent 47 et le récent carton Crazy Rich Asians), Mike Wiluan, fort d’une dizaine d’années d’expérience, passe le cap de la réalisation pour ce furieux film d’action reprenant les codes du western : en 1860, deux frères chaperonnés de leur oncle reviennent à Java venger leur père, tué par l’actuel colonisateur hollandais qui asservit la région. Si la réalisation est plus conventionnelle qu’un The raid, le long-métrage n’en demeure pas moins vivement recommandable, grâce au haut degré de délectation que l’on ressent devant ce divertissement fort plaisant. Les raisons à cet engouement sont multiples : l’histoire, en dépit de son classicisme éculé et ses quelques errements narratifs oiseux, est d’une redoutable efficacité, servant au mieux des personnages justement construits et incarnés avec don ; Wiluan nous livre de surcroît plusieurs visions sensationnelles (cet archer chevauchant majestueusement un buffle, les paysages, magnifiques, rondement mis en valeur) et emballe de puissantes scènes de bastonnades (la scène inaugurale dans le wagon, le vigoureux combat dans le bar…), comme seuls ses pairs savent en mener, faisant de ce divertissement soigné en tous points un parfait film du dimanche soir.
- (c) Screenplay Infinite XYZ Films
- Buffalo Boys
HORS-LA-LOI : intense face-à-face policier
Encore un premier long-métrage, pour une réussite à peu près totale, signée du Sud-Coréen Kang Yoon-sung, qui a été un énorme carton dans son pays avec plus de cinq millions de spectateurs. L’histoire de ce film criminel, tirée d’un fait réel ayant eu lieu en 2007, se déroule à Séoul, où un nouvel arrivant va, avec des manières pour le moins brutales, essayer de plier le quartier, peuplé de divers gangs aux règles établies, à ses volontés, créant un tourbillon de violence. Ce sauvage indépendant est traqué par le détective acharné Ma Seok-do, redoutable policier aux méthodes expéditives, incarné par la colonne de charisme qu’est Ma Dong-seok (Dernier train pour Busan, Le bon, la brute et le cinglé). D’une remarquable maîtrise pour un premier essai derrière la caméra, Hors-la-loi est un film policier dément, follement efficace et souvent très drôle, qui n’a pas volé son prix du Jury. Aidé par une profusion d’acteurs imposants de caractère, le film enchaîne les morceaux de bravoure (de vicieux règlements de comptes, une saisissante attaque lors de festivités embrumées, une castagne démente dans des toilettes qui égale aisément – au moins – l’échauffourée des WC parisiens de Mission : impossible 6) jusqu’à laisser son spectateur ardent, les sens bouillonnant.
- spip-slider
- (c) Megabox Plus M
- Hors-la-loi
INUYASHIKI : l’adaptation de manga qui met à l’amende toute superproduction occidentale
Shinsuke Sato, reconnu pour son travail dans le jeu vidéo, s’est mis en tête d’adapter pléthore de ses mangas favoris : I am a hero (2015), Death Note : light up the new world (2016) et Bleach (2018), récents échantillons, sont de son fait. Et l’homme sait visiblement s’y faire, à la vue de l’hallucinant Inuyashiki – d’après la série de mangas du même nom écrits par Hiroya Oku paru entre 2014 et 2017. Le film suit Inuyashiki Ichirou, âme en peine de 58 ans mésestimé par sa famille, qui va se découvrir tout autre à la suite d’un événement nocturne partagé avec un adolescent (joué par le jeune Takeru Satoh) lui aussi en tourment avec ses proches. Réalisé avec talent, le film est tout dédié à ses personnages et leurs problématiques, qu’il sonde en premier lieu, avec intelligence et clairvoyance, usant des artifices du spectacle en faveur de ses protagonistes torturés. C’est un film binaire qui use de la pyrotechnie, et avec virtuosité – les scènes de destruction massives sont dantesques –, et avec pertinence, les scènes en question étant placées à des moments charnières de l’évolution de ses personnages, mais qui touche également à des sujets plus attachés au sol (deux types de crise familiale, la place des écrans dans notre monde), en sus d’user avec ingéniosité de la figure du super-héros. Servant à la fois les amateurs de grand spectacle et les amoureux de problématiques humaines, les comblant tous deux en un juste divertissement ne sacrifiant rien à la surenchère, Inuyashiki se révèle une affirmation d’un savoir-faire sensationnel, preuve qu’il faut savoir dépasser les frontières, dénicher et découvrir des curiosités émanant de pays situés de l’autre côté du globe, qui usent d’un même langage, mais avec une maîtrise éloquente.
- (c) Fuji Television Network
- Inuyashiki
Galerie Photos
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