Le 20 octobre 2020
Quand le cinéma règle ses comptes avec le sinistre passé d’esclavagiste de l’Amérique, cela donne un film détonant et prenant d’un bout à l’autre.
- Réalisateurs : Gerard Bush - Christopher Renz
- Acteurs : Jena Malone, Jack Huston, Gabourey Sidibe, Kiersey Clemons, Janelle Monae
- Genre : Thriller, Épouvante-horreur
- Distributeur : Metropolitan FilmExport
- Durée : 1h46mn
- Date télé : 19 février 2022 23:31
- Chaîne : Ciné+ Premier
- Date de sortie : 9 septembre 2020
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Résumé : L’auteure à succès, Veronica Henley, se retrouve piégée dans un monde effroyable dont elle doit percer le mystère avant qu’il ne soit trop tard.
Critique : Une petite fille blonde, dans une robe d’époque, court à travers champs, tandis que la caméra s’enfonce dans une plantation de cocon immense, où des Blancs redoutables font travailler comme des animaux des femmes et des hommes noirs. Le travelling magnifique qui commence le film a peut-être quelque chose de surfait dans la précision millimétrée de la mise en scène, mais indéniablement il plonge le spectateur dans un univers glauque, qui nous ramène immédiatement aux heures sombres d’une Amérique esclavagiste et cruelle. A partir de là, le récit se centre autour d’Eden, une jeune femme noire, que ses camarades exhortent à s’enfuir. Mais elle a déjà tenté, comme d’autres, de se sauver des mains redoutables de ses maîtres, ce qui a valu à certains de se faire assassiner attachés à un cheval ou de se faire brûler vifs. Elle a peur, mais on distingue dans ses yeux la détermination à faire changer le monde. Puis, brutalement, de la période des guerres de Sécession on passe à l’époque contemporaine, où le spectateur fait connaissance avec Veronica Henley, une brillante écrivaine, qui lutte avec ses livres contre la discrimination faite aux femmes et aux Afro-américains.
- Copyright Matt Kennedy / Metropolitan FilmExport
Durant la première heure, le long-métrage a indéniablement de quoi surprendre. On a du mal à comprendre les changements de temporalités et on se prend à penser qu’il s’agit d’un énième film d’épouvante, qui donnera la voix à un fantôme blessé du passé. En réalité, si les deux cinéastes perdent consciemment le spectateur, c’est pour mieux le retrouver dans une sinistre histoire de kidnapping. Alors, le passé esclavagiste fait sens avec le présent tumultueux et militant de notre écrivaine brillante. Le détail des affiches qui colorent les murs de sa maison, les scènes parfaitement incongrues prennent toute leur épaisseur dans un récit sinistre et sanglant.
- Copyright Matt Kennedy / Metropolitan FilmExport
Voilà donc un film profondément original. Naturellement, l’histoire emprunte les détours sordides et pervers des films Us et surtout Get Out. Sans doute qu’à l’heure d’un trumpisme décomplexé et triomphant, il est urgent de rappeler l’ethos raciste et maltraitant d’une certaine Amérique. Certes, il y a dans cette fiction peu de Blancs qui donnent envie de faire leur connaissance. Le point de vue est assurément manichéen et parfois manque de subtilité. Mais le propos fonctionne absolument. Le spectateur finit par comprendre l’enfer dans lequel la jeune écrivaine s’est fait enfermer, au point qu’elle-même endosse des traits démoniaques. Il y a un vrai rythme dans le long-métrage, si on prend le temps de dépasser l’ennui de la première heure et les obscurités volontaires du scénario. Antebellumtient autant du thriller et du film d’épouvante que du témoignage politique et en ce sens, fait un bien immense à l’aune des élections américaines prochaines.
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