Le 5 mars 2016
Ce quasi huis-clos extérieur (la grande majorité des scènes se déroulent dans la forêt colombienne) à la réalisation implacable, relate des situations dramatiques sans jugement ni émotion. Un film à l’état brut qui qui a fait partie de la sélection officielle Un Certain Regard à Cannes 2015.
- Réalisateur : José Luis Rugeles
- Acteurs : Karen Torres, Carlos Clavijo, Erik Ruiz
- Nationalité : Colombien
- Durée : 1h32mn
- Date de sortie : 9 mars 2016
- Plus d'informations : Le site du distributeur
- Festival : Festival de Cannes 2015
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Résumé : La jungle colombienne de nos jours. Maria, 13 ans, enfant-soldat, a grandi dans la jungle de la guérilla. Lorsqu’elle se rend compte qu’elle est enceinte, elle comprend vite que pour garder son enfant, elle doit cacher sa grossesse. Un jour, le commandant du camp, père d’un nouveau-né, confie à Maria, la mission de le mettre en sécurité dans une ville voisine.
Notre avis : Au milieu de la jungle, une femme accouche sous une tente militaire dans des conditions plus que précaires. En Colombie, bien des jeunes filles rejoignent la guérilla dès leur plus jeune âge. La majorité d’entre elles ne sont pas enrôlées de force mais y entrent volontairement, par goût de l’aventure, par fascination des armes ou tout simplement pour échapper à leur famille. Maria, dont nous allons suivre l’histoire, est l’une de celles-là. Elle est habillée en treillis militaire, elle s’acquitte avec courage de toutes les tâches domestiques ou matérielles qui lui sont confiées. Elle ne semble pas malheureuse. Elle a un compagnon officiel, Mauricio. S’il ne la brutalise jamais, il n’admet pas qu’elle puisse remettre en question le moindre de ses ordres. Accompagnés d’un tout jeune garçon désigné guetteur et débroussailleur de chemins, ainsi que d’un beau gaillard d’une vingtaine d’années qui assure leur protection, ils sont chargés d’amener le fils du commandant, tout juste né, en lieu sûr.
(C) Sophie Dulac Distribution.
Un périple qui va se dérouler à travers une nature hostile et une violence omniprésente. Les plans larges sur une végétation épaisse et saturée, l’absence de lumière parfois, les colonies de fourmis rouges s’activant en tous sens ne laissent aucun doute sur la difficulté du voyage. Pourtant, s’entraidant, se soutenant les uns les autres, le petit groupe ressemble presque à une famille. Jusqu’à ce que lors d’une embuscade, le plus jeune soit touché. Il faut à tout prix le faire soigner par un médecin et gagner la ville la plus proche. Pour ne pas être encombré par le bébé qui ralentit leur progression, ils décident de le confier à un couple de vieillards. Maria, qui s’est désormais attachée à ce petit être sans défense, refuse obstinément de le laisser mais son avis a bien peu de poids. Sans la présence du petit, la cohésion du groupe vole en éclats. A la ville, Maria voit comment vivent les filles de son âge : elles regardent la télé, elles ont une chambre confortable et remplie de peluches, de crèmes de soin et de d’objets de maquillage. Le doute s’installe en elle. De plus, Mauricio comprend qu’elle est enceinte et veut profiter de la présence du médecin pour qu’elle avorte, comme le veut la loi de la guérilla. Alors, elle décide de s’enfuir. A partir de là, la violence ira crescendo.
(C) Sophie Dulac Distribution.
Pour donner vie à ce film, le réalisateur a rencontré 1800 jeunes directement concernés par les conséquences de ce conflit armé colombien. C’est ainsi qu’ont été retenus trois des quatre personnages principaux : Karen Torres (Maria), dont la caméra suit avec précision les gestes et surtout l’authenticité du regard, Erik Ruiz (Yuldor,) le garçonnet que l’on souffre de voir déguisé en soldat alors qu’il devrait être dans une cour d’école et Anderson Gomez (Byron), animé d’une puissante force silencieuse. Tous ont vécu les horreurs qu’ils restituent à l’écran. Ce qui donne à chacun une authenticité parfaite. On ne doute pas un seul instant : ils ne sont pas des personnages de cinéma, ils sont eux-mêmes.Cette sensation de non-jeu des acteurs donne à ce film une allure de documentaire. Privilégiant des dialogues peu bavards et s’attachant particulièrement à l’acuité des regards et à la précision des gestes de survie de chacun des personnages, le réalisateur nous livre un récit détaché. Filmé de manière chirurgicale et sans fioriture, il n’en est que plus fort. Contrairement à Rebelle (Kim Nguyen 2012), peu de scènes sont ici d’une violence extrême. Il s’agit plutôt de se pencher sur les traces d’une violence morale permanente et sous-jacente. De quoi laisser le spectateur s’imprégner de ces horreurs qui durent depuis des décennies et dont on parle si peu. Efficace et bouleversant !
José Luis Rugeles a fondé avec Frederico Duran l’association Mas Ninos Menos Alias. Ensemble, ils animent des ateliers d’art scénique, travaillant avec des enfants qui, de près ou de loin ont connu la guérilla.
(C) Sophie Dulac Distribution.
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