A toute épreuve - la critique

Virage à 360° pour Antoine Blossier, auteur de l’intriguant et fauché La Traque, qui passe de la forêt sauvage et inquiétante aux bancs d’un bahut où fleurissent les cancres las d’échouer au baccalauréat. Un teenage movie faussement potache bien de chez nous dans la lignée des Profs qui réalise l’exploit de surpasser la médiocrité de son prédécesseur. A force de tartines, on commencerait presque à frôler l’indigestion...

L’argument : Lycée Le Corbusier, un lycée quelconque ou presque... Greg passe son bac cette année et c’est loin d’être gagné. Pour continuer à vivre son grand amour avec Maeva, il envisage un casse improbable, un casse qui doit être invisible et pour cela il monte une équipe, leur mission : voler les sujets du bac.

Notre avis : Si Fiston (la comédie avec Kev Adams et papa Dubosc) parvenait encore à se hisser au dessus de la mêlée et si Les Profs nous arrachaient quelques éclats de rire étouffés, A toute épreuve ne cesse d’étaler de manière ostentatoire son absence totale d’ambition, empilant les situations convenues et les vannes faciles comme un enfant l’aurait fait avec ses legos. Grand architecte de cette production 100% mainstream qui devrait rafler tous les suffrages chez les moins de 13 ans, Antoine Blossier se contente de recettes éculées et n’offre à son film aucune valeur ajoutée, reprenant le pire des comédies françaises et américaines des dix dernières années sans niaque ni autodérision. C’est un peu comme si les sous-doués avaient perdus leur esprit rebelle. Seul Laouni Mouhid, alias La Fouine, évite soigneusement de se prendre au sérieux et tire son épingle du jeu en incarnant avec une réelle conviction le rôle de « Scarface », un gogo tous azimuts déjà responsable du casse des sujets du bac d’il y a dix ans. On vous laisse découvrir. Loin de cacher un quelconque discours de fond comme c’était le cas dans le sympathique Neuilly sa mère (où Samy Seghir, aussi acteur ici, faisait preuve d’un réel charisme), A toute épreuve passe en revue tous les clichés sur l’intégration et le vivre ensemble et établit une galerie de personnages tous aussi inconsistants les uns que les autres. Pis, l’argument pour voler les sujets du BAC est complètement bidon (décrocher une mention TB afin de suivre à l’étranger la fille de ses rêves) et c’est donc avec un intérêt très relatif que nous suivons les étapes du plan jusqu’à une mission commando improvisée qui se prendrait presque au sérieux. Quand Les Profs tentaient de dérober les sujets de BAC, ça avait au moins le mérite d’être rigolo. C’est d’ailleurs là où le bât blesse, le film ne parvenant que très rarement à nous arracher un sourire. Même le beau Marc Lavoine, dont le rôle de proviseur-et amant de Valérie Karsenti (vive les scènes de ménages !), n’est malheureusement pas assez développé, ne parvient pas à nous embarquer tant son jeu semble figé. Pour couronner le tout, Blossier nous accable d’une fin totalement convenue en adéquation totale avec l’élaboration d’un pseudo discours moralisateur et sous-tendue par la résolution de l’éternel triangle amoureux. Autant dire qu’on le sentait venir depuis un moment. Sorte de Kick Ass du vol de sujets, minet gentil et donc puceau caressant l’espoir de devenir enfin quelqu’un, Greg, le héros de cette histoire tirée d’un authentique fait divers, est l’archétype du djeune moyen dans toute sa splendeur. Sans doute certains s’y reconnaîtront, mais cette normalité est devenue bien trop banale pour le cinéma. Les gens ont besoin d’êtres surpris, pas qu’on leur serve tout sur un plateau en argent. Quand le prémâchage élague la narration jusqu’au maximum de sa simplification, il ne reste guère de place que pour le spectateur bovidé qui ingurgite des images qu’il connaît déjà par cœur en mastiquant son pop-corn avec force et fracas. Cela ne nous empêchera pas de ruminer notre rancœur envers cette absence de prétention annihilant sans coup férir tous les efforts dont a été capable un comique français qui se porte de mieux en mieux. Et dire qu’Antoine Blossier avait imaginé tout un arsenal à la Spy Kids pour se concentrer presque entièrement sur le casse en lui-même et s’est rétracté de peur de ne pas provoquer l’hilarité générale. Tout valait mieux que ce défilé criard, bassement flatteur et populiste qui ne parvient jamais à exister pour lui-même et fonctionne uniquement dans la séduction facile.