A casa de Alice

Cette chronique d’une vie familiale révèle son lot de désillusions et de frustrations.

L’argument : Alice, la quarantaine est manucure dans un salon de beauté. Elle vit dans la banlieue de Sao Paulo et partage un appartement avec sa mère Dona Jacira, son mari Lindomar, un chauffeur de taxi, et ses trois fils, Lucas, Edinho, et Junior.
Après 20 ans de mariage, pas plus Lindomar qu’Alice n’espèrent se réconcilier. Le chauffeur de taxi garde le peu de ses pulsions sexuelles pour des aventures, de préférence avec des adolescentes. Alice fait semblant d’ignorer les infidélités de son mari.

Notre avis : Alice, c’est un peu Madame tout le monde. Justement, pour son premier long métrage de fiction, le Brésilien Chico Teixera a choisi une approche réaliste, quasi-documentaire, du quotidien somme toute ordinaire d’un personnage qui l’est tout autant, à Sao Paulo. Avec une absence totale de musique et les seuls sons ambiants, la caméra omnisciente suit au jour le jour Alice, Lindomar et leurs trois enfants, entre secrets et mensonges. Car dans la famille, la communication n’est pas le point fort et si tout ce petit monde vit sous le même toit, chacun mène sa vie de son côté avec plus ou moins de succès, se contentant de rentrer pour manger et dormir. Témoin de ces petits arrangements, la grand-mère, véritable pilier de la maison, tenue pourtant par tous pour quantité négligeable, trouve encore un peu de réconfort auprès de son poste de radio tout en souffrant d’un début de cécité, et n’oublie pas de temps à autre de purifier la maison pour la purger de cette ambiance délétère.
Alice, quant à elle, tente au travail ou dans les soirées arrosées entre copines, d’oublier une vie conjugale qui part à vau-l’eau malgré tous ses efforts. Dans le salon de manucure où elle est employée, sorte de Vénus Beauté miniature, Alice écoute les confidences vraies ou fantasmées de ses clientes et rêve les yeux grand ouverts. Aussi, quand elle retrouve son amour de jeunesse, croit-elle pouvoir échapper à son quotidien. D’autant que, au moins au début, tout semble jouer en sa faveur. Le film s’appuie sur la prestation de Carla Ribas, qui s’empare à bras le corps de son personnage, contrebalançant la sécheresse du propos et de la mise en scène. Alice est une éponge qui, après avoir pris sur elle pendant toutes ces années, tombe aujourd’hui le masque et laisse s’échapper le flot d’émotions.
Tout en martelant que la vie n’est pas un rêve, A casa de Alice place les joies simples à la portée de tous. Ni joyeux ni résigné, mais lucide avant tout.