Truc de ouf
Le 8 juin 2020
Loin des comédies potaches auxquelles il s’est trop souvent cantonné, le comédien Jonah Hill fait preuve d’un surprenant talent pour son premier long en qualité de réalisateur, et signe une reconstitution des années 90 qui nous fait regretter ce temps où le fish-eye était à la mode.
- Réalisateur : Jonah Hill
- Acteurs : Lucas Hedges, Katherine Waterson, Sunny Sujic, Na-Kel Smith, Olan Prenatt
- Genre : Comédie dramatique, Teen movie
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Durée : 1h24mn
- Date télé : 22 septembre 2020 23:20
- Chaîne : Canal+ Cinéma
- Box-office : 7.362.439$ (recettes USA)
- Titre original : mid90's
- Date de sortie : 24 avril 2019
- Plus d'informations : Le site officiel américain
- Festival : Festival de Toronto 2018
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Résumé : Dans le Los Angeles des années 90, Stevie, 13 ans, a du mal a trouver sa place entre sa mère souvent absente et un grand frère caractériel. Quand une bande de skateurs le prend sous son aile, il se prépare à passer l’été de sa vie…
Critique : Le milieu des années 90, c’est l’époque où Jonah Hill entrait dans son adolescence, mais aussi celle où Larry Clark réinventait le teen movie en le teintant d’une charge sociale loin de la légèreté qui caractérisait le genre jusque-là. Or, et alors que Jonah Hill vient d’apparaître dans le dernier film de Harmony Korine, qui se revendique comme l’héritier de Clark, il est difficile de ne pas penser à cette influence à la vue de son premier film. Le format d’époque et la fougue des jeunes personnages y sont pour beaucoup. Toutefois, le primo-réalisateur trentenaire a tenu à ajouter à son long-métrage une patte personnelle, et ce bien qu’il assure que l’écriture des personnages n’est pas autobiographique. Cette marque se retrouve en fait surtout dans les excellents choix musicaux, et en particulier les sons de hip-hop, là où les réalisateurs plus âgés emploient généralement très mal le rap dans leurs films – le limitant souvent aux communautés black, ou latino dans le cas plus limité encore de Cypress Hill que l’on entend aussi dans 90’s. Ainsi, à travers son personnage qui a au-dessus de son lit des posters de Mobb Deep et du Wu-Tang, c’est toute une génération qui se retrouvera aisément dans les souvenirs que Jonah Hill garde des années 90.
- ©Tobin Yelland
Plus encore que dans la justesse avec laquelle Jonah Hill a dépeint la jeune population qui fréquente les skate-parks, la qualité de ce premier film vaut surtout pour la finesse avec laquelle il est parvenu à observer leurs interactions sans avoir recours à une mise en scène qui vienne appuyer leurs sentiments. « L’esprit de meute », tel qu’il le nomme lui-même, mais aussi la relation tumultueuse que le jeune Stevie entretient avec sa mère et son grand frère, deviennent le moteur de son scénario. Celui-ci devient aussi intemporel sans pourtant jamais tomber dans le carcan mélodramatique. Le meilleur exemple en est la fin dans laquelle les champs-contrechamps qui s’échangent rapidement entre cette mère (interprétée par la splendide Katherine Waterston, vue notamment dans Inherent Vice ou Les Animaux fantastiques et sa suite) et les potes de son fils avec qui elle est en conflit, alors que cette scène aurait aisément pu se transformer en stupide démonstration tire-larmes. De la même manière, la délicatesse avec laquelle Jonah Hill a croqué ces personnages se ressent dans l’absence de surenchère en grossièreté gratuite lorsque, presque inévitablement, ces adolescents évoquent leur éveil sexuel. Une commodité obséquieuse qui a valu à Larry Clark de perdre une part importante de son public.
- ©Tobin Yelland
Mais la vraie plus-value de 90’s vient assurément des jeunes acteurs débutants, recrutés pour la plupart en casting sauvage pour leur aisance au skate-board. C’est avec vivacité et véracité qu’ils parviennent – sans doute grâce aux conseils avisés de leur réalisateur, qui, pour rappel, a déjà été deux fois nommé à l’Oscar du meilleur acteur dans un second rôle – à donner de l’épaisseur à leurs rôles. Grâce à ce soin tout particulier apporté à l’authenticité de ces adolescents et à l’énergie qui transpire de la direction d’acteurs, il n’est pas nécessaire de partager les goûts musicaux des personnages pour se retrouver dans les difficultés qu’ils rencontrent en quittant l’enfance. C’est à cette universalité que l’on reconnaît les films propres à marquer leur époque. Autant dire que Jonah Hill a frappé fort pour son premier coup. Chance du débutant ? L’avenir nous le dira.
- ©Tobin Yelland
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