Zaman, l’homme des roseaux - Amer Alwan - critique

Critique : De l’Irak, l’œil occidental ne connaît que le désert, les palais somptueux de Saddam Hussein et les guerres qui ont embrasé le pays. Le cinéma irakien s’est assoupi sous la dictature baasiste et n’a pu dès lors contribuer à effacer nos images stéréotypées. Revenu d’exil, Amer Alwan a choisi pour décor de son premier long métrage sa région d’origine, une contrée d’eaux et de roseaux où s’entrecroisent le Tigre et l’Euphrate.
Le long périple de son héros pour sauver sa femme le conduit à observer, des campagnes jusqu’aux villes, son pays ravagé par la terreur d’un régime et l’absurdité de la guerre et de l’embargo. Zaman parfois pose ses rames, seuls quelques pépiements d’oiseaux se font alors entendre dans une paysage onirique et soudain, le bruit et la fureur des chasseurs américains dans le ciel. Quelques jours plus tard, les chars arriveront.
Tourné un mois tout juste avant le déclenchement de la seconde guerre du Golfe, ce film se veut un hommage au peuple irakien qui, selon le réalisateur, "plie comme le roseau mais ne rompt jamais en dépit de la tourmente".
Il y a certes quelques maladresses liées à tout premier long métrage, renforcées par les nombreux obstacles rencontrés par le réalisateur. Quatre heures de rushes ont notamment disparu après la confiscation de bobines par le régime alors encore en place.
Tourné en vidéo numérique pour des raisons purement budgétaires, ce film est une œuvre bouleversante et ses plans de toute beauté rythment le magnifique chant d’espoir imaginé par Amer Alwan.