Le 17 novembre 2023
Winners est surtout un petit miracle de cinéma au service de la création et de diffusion de films iraniens à travers le monde. Une œuvre autant vivifiante qu’indispensable à regarder en ces moments de troubles et d’atteinte à la liberté d’expression en Iran.
- Réalisateur : Hassan Nazer
- Acteurs : Hossein Abedini, Parsa Maghami, Helia Mohammadkhani, Reza Naji, Malalai Zikria
- Genre : Comédie dramatique, Inédit (salle, vidéo)
- Nationalité : Britannique
- Durée : 1h25mn
- Festival : Festival du film britannique de Dinard 2023, Festival Nouvelles Images Persanes de Vitré 2023
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Résumé : Dans une petite ville provinciale iranienne, les enfants travaillent dur pour faire vivre leur famille. Un jour, Yahya, neuf ans, et son amie Leyla, trouvent une statuette scintillante dans le désert. Passionné de cinéma, Naser Khan, le patron de Yahya, décide de les aider à retrouver son propriétaire.
Critique : Il n’y a des hasards qui n’en sont pas, aussi improbables soient-ils. Qui aurait pu parier qu’une statuette des Oscars, apparemment dévolue à être enfin restituée à un célèbre réalisateur iranien (Panahi peut-être ?), débarque dans un village perdu iranien, où un petit garçon, Yahya, quand il ne se tue pas la santé à ramasser des ordures dans une déchetterie pour une misère, se passionne de DVD et découvre l’immense diversité du cinéma iranien ? D’importantes récompenses sont engagées, à juste titre, pour ce Winners notamment au titre de la fameuse British Academy Film Awards (BAFTA) au Royaume-Uni où il a été sacré par Le Times de Londres parmi les 20 meilleurs films de l’année 2023. C’est peu dire de l’importance de ce long-métrage, tant du point de vue de sa réalisation que des enjeux socio-politiques qu’il recouvre.
- Copyright DreamLab Films
Winners constitue une œuvre drôle et aérienne qui se veut un témoignage vivant de la production cinématographique iranienne. Yahya accède à cette culture cinématographique grâce à des DVD que son patron lui laisse découvrir. Les grands noms comme Panahi, Rasoulof ou Kiarostami apparaissent sur l’écran de télévision, au grand dam de sa mère qui n’y voit que du mal. L’important pour elle est de préserver la seule chose qui lui reste, à savoir son fils, autant source de revenus que sujet d’affection. Hassan Nazer rend un hommage non dissimulé à l’acteur, Reza Naji, dont on se souvient qu’il avait été récompensé par le jury berlinois en 2008 pour Le chant du moineau et qui, depuis, n’a plus tourné. Il incarne ici l’acteur qu’il a été hier, contraint de travailler, en dépit de son admirable talent d’acteur.
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Winners est un film d’une grâce et d’une délicatesse absolument merveilleuses. Le spectateur se laisse emporter dans ce conte cruel et doux à la fois, un peu à la manière du long-métrage de Giuseppe Tornatore, Cinema Paradiso en son temps où l’on découvrait, à travers Noiret, la découverte du septième art par un cinéaste en herbe. Hassan Nazer n’hésite pas à faire référence à cette œuvre de 1988, comme si, à son tour, il devait témoigner de sa propre initiation au cinéma iranien quand il était enfant. D’ailleurs, le réalisateur adresse son film à de grands auteurs iraniens, témoignant ainsi du devoir de perpétuation et de renouvellement d’un art important en Iran, le cinéma, qui peut jusqu’à coûter la vie et la liberté de ses artisans. On ne peut que penser à la disparition récente de Dariush Mehrjui, mystérieusement assassiné en octobre dernier.
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Winners demeure le coup de cœur de la rédaction à la troisième édition du film iranien à Vitré. L’occasion nous est donnée ainsi de valoriser cette initiative rare en plein cœur de la Bretagne où des longs-métrages iraniens et inédits sont projetés, avec le secret espoir de les voir s’échapper de l’Iran et trouver leur place sur les écrans du monde. La fin magnifique dévoile d’ailleurs l’intérêt et le courage de réalisateurs iraniens comme Jafar Panahi dans la revendication du droit à diffuser ses œuvres à travers le monde, à réinventer le langage cinématographique et à chanter la liberté d’expression, non sans un habile clin d’œil à l’irrésistible Taxi Téhéran. Depuis la Grande Bretagne où il vit depuis l’adolescence, Hassan Nazer se fait ainsi le relai d’un cinéma iranien inépuisable et infiniment créatif.
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