Glacial
Le 19 septembre 2019
Plongée dans les souffrances multiples des victimes de viol, Unbelievable est un récit à la fois captivant, clinique et glacial. Et ce n’est surtout pas un « feuilleton ».
- Réalisateurs : Lisa Cholodenko - Michael Dinner - Susannah Grant
- Acteurs : Toni Collette, Merritt Wever, Kaitlyn Dever
- Nationalité : Américain
- : Netflix
- Durée : 8 épisodes de 44 à 59 minutes
- VOD : NETFLIX
- Genre : Drame, Policier
- Titre original : Unbelievable
- Date de sortie : 13 septembre 2019
- Plus d'informations : Unbelievable
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Résumé : Alors qu’une jeune femme est accusée d’avoir menti au sujet d’un viol, deux policières enquêtent sur une vague d’agressions similaires. Inspiré d’une histoire vraie.
Notre avis : On va faire simple : Unbelievable est la pépite à voir en cette rentrée « netflixienne », plutôt encombrée par des productions plus que discutables, comme ces deux navets, The I-land et The A List - cette dernière étant produite par BBC -, où un player a été victime d’un marabout avant de signer, on ne voit pas d’autre explication.
Comme on a dit l’essentiel sur Unbelievable, ouvrons une parenthèse. Disney + qui va entrer en guerre contre Netflix, a annoncé sa stratégie anti-« binge-watching ». Autrement dit, entre chaque épisode d’une série, l’abonné chez Mickey devra attendre plusieurs jours. Argument avancé, et partiellement recevable : privilégier la qualité à la quantité. Si pour certaines séries, patienter une semaine entre chaque épisode est loin d’être insurmontable, il en est d’autres pour lesquelles, cela ne fait plus sens. En diffusant immédiatement l’intégralité d’une série, Netflix a induit, pour certaines, une autre manière de les écrire, moins en feuilletons, mais plus comme de « vrais » long-métrages de plusieurs heures, découpés en actes, et qui nécessitent, de fait, un minimum de continuité temporelle pour être vues. Et appréciées. À vrai dire, cette affaire de durée, et donc de diffusion, est aussi vieille que le cinéma. Deux exemples : Les Rapaces (1924) d’Eric von Stroheim, chef-d’œuvre absolu du muet. von Stroheim livre à la MGM une première version de neuf heures. Le studio hurle, le vire, le dépossède de son film et le réduit à 2h20. Autre chef-d’œuvre, Il était une fois en Amérique (1984), dont l’ultime version de 4h11 est enfin présentée à Cannes, en 2012. Sergio Leone avait pourtant prévu dix heures, bataillé pour six heures, puis 4h25, avant de capituler. Dommage que Stroheim, Leone et bien d’autres, n’aient pas connu Netflix…
Presque fin de parenthèse, car Unbelievable est le parfait exemple de ce nouveau type d’écriture, qui bouscule le schéma du feuilletonnage hebdomadaire issu d’un ancien monde, un temps définitivement révolu de la télévision, avant Internet. Disney + a-t-il tort ou raison ? On verra.
Soyez très précise…
- Copyright Netflix
Comme When They See Us d’Ava DuVernay, produit et diffusé par Netflix en mars dernier, qui racontait une monstrueuse erreur judiciaire américaine, dans une écriture non pas en quatre épisodes, mais quatre actes, Unbelievable revient sur autre triste affaire. 2008, État de Washington. Marie, dix-huit ans, se fait agresser et violer dans sa chambre en pleine nuit. Elle raconte tout au policier arrivé sur place. Un autre flic débarque et reprend l’affaire. Elle recommence son récit. Elle doit à nouveau le re-re-raconter en se faisant longuement examiner à l’hôpital. Puis encore et encore au poste de police. Sauf que des détails ne collent pas ; sauf que c’est une jeune femme un peu perturbée, trimbalée entre familles d’accueil et foyers ; sauf qu’il n’y a aucun indice, ni trace ADN ; sauf qu’elle ne semble pas vraiment traumatisée par ce viol ; sauf qu’elle raconte des versions différentes. Ce paquet de « sauf que » fait que les policiers doutent de tout et que ce « viol » doit être imaginaire. Voilà, résumés, les débuts du premier « épisode ». Ensuite ? Relisez le résumé, regardez à la rigueur la bande-annonce, mais n’allez surtout pas sur Google ou Wikipedia, puisque cette histoire est vraie.
Soyez très très très très très précise…
- Copyright Netflix
Unbelievable. Étrange titre, non ? L’explication, viendra au cours d’une discussion entre flics, un simple mot que prononcera la détective Karen Duvall de la police de Golden, Colorado, où elle enquête sur un viol, avec une grande bienveillance à l’égard de la victime, et une ferme détermination à ne rien lâcher sur le moindre indice ou détail pour coincer l’agresseur. Le lien entre le Colorado et Washington ? C’est ce que raconte ce long métrage en huit actes d’une densité rare. Deux récits habilement croisés : le destin de Marie et de ses souffrances, et les investigations, travail de fourmis mené par deux femmes flics, deux caractères, deux fortes personnalités, sur des viols au Colorado.
La gravité du sujet fait qu’on regarde Unbelievable, en deux ou trois soirées. D’affilée. Car il n’y a pas d’échappatoire à être immergé dans ce récit d’une pudeur terriblement violente ; à être aspiré par une narration simple, essentiellement dans le verbe ; à être hypnotisé par ces nombreuses séquences en montages parallèles, mais où les dialogues emportent tout. Se dire, au passage, - enfin, nous, on y croit - qu’il y a du prix d’interprétation dans l’air pour Merritt Wever, Toni Collette et/ou Kaitlyn Dever. Et surtout, à la fin, réfléchir et penser à l’horreur que subissent les victimes des viols dans leur chair et leur âme, et pendant l’infernal parcours médico-légal, policier et judiciaire. Surtout quand leur parole est mise en doute. Pendant des années. Odieux feuilleton.
- Copyright Beth Dubber / Netflix
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