The edukators

Où il est joliment dit que chaque cœur est une cellule révolutionnaire.

L’argument : Jan, Peter et Jule sont trois jeunes en pleine rébellion et unis par leur volonté de changer l’état du monde. La nuit, Jan et Peter forment "The Edukators" , de mystérieux activistes qui s’infiltrent dans de riches villas pour avertir leurs propriétaires que "les années grasses sont révolues". Tout se complique lorsque Jule, la petite amie de Peter, tombe amoureuse de Jan et les entraîne accidentellement dans un kidnapping...

Notre avis : Le cinéma politique n’est pas mort. The edukators en est la preuve. Le film de Hans Weingartner contient en effet presque autant de discussions ou situations politiques qu’un bon vieux Ken Loach. En suivant les pas de Jan, Peter et Jule, trois jeunes Allemands comme on en rencontre des milliers outre-Rhin, le réalisateur a le mérite de parler d’une jeunesse européenne engagée, inscrite dans son époque, bref loin des clichés tenaces qui la cantonnent au rang de larves incultes vaguement dépressives.
Par rapport à un cinéma français qui se vautre indifféremment dans le drame bourgeois qu’il parle de jeunes ou vieux adultes, le rapport tendu qu’entretiennent les personnages de The edukators avec la société fait l’effet d’un électrochoc assez jouissif. Ah qu’on aimerait comme Jan ou Peter empiler jusqu’au plafond les chaises d’un salon respirant la prétention sociale ! Ah qu’on aimerait comme Jule rayer une de ces grosses Mercedes qui servent plus à rouler des mécaniques qu’à se déplacer d’un lieu à un autre ! Enfin du cinéma qui ne va pas dans le sens du poil, qui ne s’enfonce pas dans le politiquement correct.
Malheureusement, après un début réussi, le scénario patine quelque peu. Avec l’enlèvement du chef d’entreprise bourré aux as, l’action se déplace dans les montagnes et perd en chemin de sa force. Hans Weingartner réussit bien à dessiner un portrait relativement juste de ses protagonistes confrontés aux limites morales de leurs actions révolutionnaires et aux bornes sentimentales qu’implique la liberté sexuelle. Mais il manque le souffle, l’effet de surprise sans quoi toute œuvre finit par tourner en rond et finalement lasser.
Cette impression tient beaucoup dans une certaine faiblesse de la réalisation, qui tenait pourtant une bonne idée avec l’utilisation de la vidéo, renfort d’intensité idéal pour ce genre de films à propos radical. Hans Weingartner alterne le bon - la scène d’ouverture - comme le moins bon - les scènes de clôture -, comme s’il ne maîtrisait son sujet que par intermittence. D’où un sentiment d’inachevé qui naît de son film. Impression mitigée d’où émerge l’incroyable Stipe Erceg, acteur au physique mêlant de manière improbable l’angélisme à la trashitude, qui laisse loin en retrait ses partenaires de jeu.