Le 13 décembre 2024
Entre quête de Dieu et ambitions philosophiques dévorantes, Schirkoa dispose d’autant d’atouts pour fasciner qu’agacer.
- Réalisateur : Ishan Shukla
- Acteurs : Asia Argento, Golshifteh Farahani, Gaspar Noé
- Genre : Science-fiction, Fantastique, Animation
- Nationalité : Indien, Français, Allemand
- Distributeur : Dissidenz Films
- Durée : 1h43mn
- Titre original : Schirkoa: In Lies We Trust
- Date de sortie : 1er janvier 2025
- Plus d'informations : Le site du film
- Festival : NIFFF 2024
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Résumé : Coincé dans une étrange dystopie futuriste, matricule 197A, sac de papier sur la tête comme tous ses pairs, engendre un soulèvement qui pourrait le conduire vers le monde où la liberté est reine.
- © NIFFF 2024
Critique : Résumer Schirkoa, c’est un peu comme essayer de détricoter les discussions que vous auriez entre amis, tard le soir, un peu désinhibés, en refaisant le monde. Comme retracer le fil de cette conversation pléthorique, truffée d’idées merveilleuses et saugrenues. Se heurter aux pensées décousues, en retirer une ou deux qui détonnent, amusent ou font voir le monde autrement, et se débrouiller avec le reste.
- © 2024 Dissidenz, Red Cigarette Media
Tout commence alors que, inspiré par le printemps arabe en 2010-2011, Ishan Shukla travaille à une bande dessinée qui traiterait du renversement d’un régime dictatorial. L’univers visuel est aujourd’hui transposé sur grand écran, avec originalité. Armé d’un moteur de jeu vidéo, pas le plus récent, Shukla expérimente et embarque immédiatement son spectateur vers des rivages qui lui sont inconnus, ce qui peut toujours être porté au crédit d’un film. Désarçonnée, voilà que l’audience scrute l’écran, ses moindres détails, la moindre aspérité, les expressions figées des personnages et les textures moyennes avec étonnement. Schirkoa gagne en originalité ce qu’il perd en fluidité, mais en résulte l’agréable sensation de se voir proposer une vision, une vraie, puissante, qui, à défaut de provoquer l’adhésion, suscite la curiosité.
Passée la surprise visuelle, il ressort que le thème de la liberté est cher à son auteur, et nul besoin qu’il nous le rappelle de vive voix, après une projection qui a semble-t-il modérément conquis le public. Ses propos sont à l’image du film, assez manichéens – assumés comme tel - et dessinent une critique toute trouvée pour ses détracteurs. Shukla souhaitait proposer deux visions extrêmes de la liberté : un monde qui serait totalement libre, l’autre absolument dictatorial au point d’interdire l’individu en tant que tels. Et voilà qu’un personnage passerait de l’un à l’autre.
- © 2024 Dissidenz, Red Cigarette Media
Sans révéler les contours détaillés de toutes les considérations politiques que brasse le film – à supposer que l’auteur de cette chronique les ait toutes appréhendées, ce qu’il serait prétentieux d’avancer -, nous considérerons le point suivant comme étant une potentielle limite : Shukla affirme qu’après une privation de liberté prolongée, l’humain perdrait sa capacité à être libre. Ainsi, son personnage, une fois qu’il a goûté à la liberté absolue, pourrait tendre à nouveau vers la privation. Ce qui, à la réflexion, serait le meilleur argument pour ne jamais accorder cette liberté. La fin du film jette un voile sur l’ensemble, laissant songeur quant à son sens profond.
Mais, armé du bénéfice du doute, un œil bienveillant se laissera gagner par l’ambition de Shukla, la densité de sa proposition, et gardera à l’esprit qu’il vaut sans doute mieux rejeter une œuvre dont on déteste les partis pris, que de l’oublier à cause de ses efforts pour faire consensus. Alors, porté par un casting vocal cinq étoiles – Golshifteh Farahani, Asia Argento, Gaspar Noé… - Schirkoa gagne le droit qu’on exige une nouvelle vision.
– Film traité dans le cadre du Neuchâtel International Fantastic Film Festival 2024 / Asian film competition
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