Le 12 octobre 2018
La réalisatrice slovaque Tereza Nvotova consacre son premier long-métrage à l’étude des traumatismes liés au viol et dépeint une société moins libre qu’il n’y paraît.
- Réalisateur : Teresa Nvotova
- Acteurs : Dominika Moravkova, Anna Rakovska, Anna Siskova, Burgos Films
- Genre : Drame
- Nationalité : Tchèque, Slovaque
- Durée : 1h28mn
- Date de sortie : 17 octobre 2018
L'a vu
Veut le voir
International Film Festival Rotterdam
Résumé : Léna a 17 ans. Elle aspire à la liberté et à l’aventure jusqu’à ce jour où son monde intérieur se fracasse. Léna se replie alors sur elle-même.
Notre avis : Si la parole des femmes se libère peu à peu sur le sujet des agressions sexuelles qu’elles ont pu subir, Teresa Nvotova affirme que seulement 13% d’entre elles osent en parler, excluant ainsi toute idée d’une société vraiment libre et ouverte.
Léna vit dans une famille de la classe moyenne slovaque, entre des parents aimants et un frère handicapé à qui ses parents consacrent la grande majorité de leur temps. Elle est joyeuse et aime faire la fête. Entre dégoût et fantasme, elle évoque la sexualité avec une amie plus délurée qu’elle. Sa vie bascule le jour où alors que ses parents sont dans la pièce voisine, elle est brusquement violée par son professeur de maths venu lui donner un cours. Si cette situation peut paraître peu plausible, elle permet à la réalisatrice d’affirmer que, bien loin de l’image de la fille en mini-jupe agressée par un inconnu dans une rue sombre, la plupart des agressions sont perpétrées derrière les murs de nos maisons, par des gens que l’on connaît. Racontant l’histoire du point de vue de Léna, elle se veut le porte-voix de celles qui ne parviennent pas à briser le silence mais un scénario à la structure chancelante l’empêche d’atteindre son but.
- Copyright Burgos Films
En effet, puisque Lena choisit de taire son douloureux secret, elle se retrouve dans l’obligation de donner une autre trajectoire à ses propos et se consacre majoritairement à la dénonciation des traitements scandaleux des établissements psychiatriques de son pays.
Les parents de Léna imputent son changement de comportement aux troubles liés à l’adolescence. Ils consacrent un temps important au bien-être de leur fils handicapé et envisagent ainsi que leur fille puisse souffrir d’un sentiment d’abandon. Impuissants, ils assistent à sa longue descente aux enfers jusqu’au jour où à l’occasion de l’anniversaire de son frère, elle se taillade les veines. Avec son hospitalisation en psychiatrie débute la description d’un monde indigne et brutal où des soignants dépassés sont dans l’impossibilité de canaliser des jeunes qui n’ont de cesse de s’agresser tant verbalement que physiquement. Quant aux techniques de soin, elles se réduisent à des électrochocs que la réalisatrice brandit comme la preuve d’une médecine archaïque et dégradante. Dans un tel climat de violence, Léna s’enfonce dans son mutisme. A peine commence t-elle à sympathiser avec sa compagne de chambre que celle-ci, qui a osé affirmer avoir subi les assauts d’un père incestueux, devient le souffre-douleur du personnel médical et des autres patients et se pend. Un événement tragique qui incite notre malheureuse jeune fille à s’emmurer encore un peu plus profondément dans le silence. Pourtant, après toutes ces scènes de violence et de drame qui ne laissent espérer aucune issue favorable, survient un dénouement rapide et inattendu qui laisse perplexe.
- Copyright Burgos Films
C’est plutôt du côté de l’interprétation qu’il faut chercher les atouts de ce film. Une mise en scène conventionnelle mais dynamique permet aux différents acteurs de ce drame de faire preuve d’une réelle authenticité, à commencer par ces jeunes hospitalisés, non professionnels qui nous font partager sans filtre leur vie brute de décoffrage au sein de cette structure médicale inadaptée. Mais leur jeu n’aurait pas la même force sans la présence de la jeune et convaincante Dominika Moravkova capable d’endosser aussi bien les émotions que l’état d’esprit du personnage. Elle forme avec Anna Siskova dans le rôle de sa mère un duo attachant auquel bien des couples mère/fille n’auront aucun mal à s’identifier.
Même s’il se perd en route, on ne peut que saluer l’engagement de ce film pour la cause des femmes dans un monde plus juste.
- Copyright Burgos Films
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.