Le 13 novembre 2022
Un documentaire à la facture classique, mais le propos constitue un digest intéressant sur l’une des critiques les plus influentes de l’histoire du cinéma.


- Réalisateur : Rob Garver
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Dean Medias
- Durée : 1h35mn
- Reprise: 21 juin 2023
- Titre original : What She Said: The Art of Pauline Kael
- Date de sortie : 16 novembre 2022
- Festival : Festival de Berlin 2019

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Résumé : Pauline Kael, longtemps critique de films au New Yorker, s’est battue toute sa carrière pour imposer son empreinte. Une personnalité toute en éclat(s), riche d’une confiance en soi inébranlable, d’un passé complexe, mais surtout d’un amour profond pour l’Art et le cinéma.
Critique : Durant des années, Pauline Kael fut la critique la plus en vue du New Yorker, suscitant l’admiration autant que la détestation, inspirant aussi une jeune génération de journalistes à partir des années 70.
Ce documentaire à la facture classique, parsemé d’extraits de films et d’interviews, revient sur le parcours d’une femme à la fois passionnée et intransigeante, dont les avis souvent à rebours de l’opinion commune provoquèrent des débats houleux. C’est une chronique relative aux Feux de la rampe, publiée dans le magazine City Lights en 1952, qui fera émerger le nom de Kael : le film de Chaplin y est stigmatisé par la manière dont il mythifie la figure de l’artiste et cherche à impressionner le public. D’autres œuvres adoubées par une grande partie de la critique subiront les foudres de cette plume acérée, qui suivait les traces d’un journalisme gonzo, pour véritablement relater une expérience de spectatrice et assumer la subjectivité de son propos.
Aux scènes représentatives de Hiroshima mon amour, Lawrence d’Arabie ou 2001 : L’odyssée de l’espace se superposent des exégèses sans concession, où s’expriment les désapprobations de son autrice : le cinéma sentimental, la virtuosité expressive ou les afféteries d’une certaine avant-garde lui sortent par les yeux. Dans cette perspective, Kael dénigre systématiquement les films de Kubrick en même temps qu’elle défend Spielberg. Mais, plus surprenant, elle encense également Jean-Luc Godard. On notera : le premier Godard, sans doute le moins expérimental.
Figure influente du monde artistique à partir des années 70, très lucide sur le machisme du monde journalistique de cette époque, Kael accompagne l’avènement du nouvel Hollywood, croit dans le talent de Robert Altman, et finit par s’associer à l’un des acteurs emblématiques de ces années prolifiques, Warren Beatty, pour produire un long métrage qui ne sera jamais réalisé. C’est un tournant : la chroniqueuse prend ses distances avec le monde du cinéma, avant de se retirer en 1991.
Si des extraits d’articles parsèment le film, on aurait aimé qu’au-delà des réactions suscitées, le propos se concentre davantage sur l’écriture si particulière de Kael, où les traits de l’analyse côtoient volontiers les punchlines, où l’argot si peu accepté dans l’univers de la chronique artistique n’empêche pas une vraie attention à la forme cinématographique.