La ville aux couteaux
Le 8 décembre 2009
Scrupuleusement, Asher Tlalim se rend dans tous les quartiers de Jérusalem qu’il aime mais ne reconnait plus, afin de rendre compte de la séparation territoriale, politique et idéologique des Arabes et des Juifs.
- Réalisateur : Asher Tlalim
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Israélien
- Plus d'informations : Le site officiel du festival
- Festival : Festival Proche-Orient : que peut le cinéma ?
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– Durée : 1h40mn
– Titre original : Galoot
Scrupuleusement, Asher Tlalim se rend dans tous les quartiers de Jérusalem qu’il aime mais ne reconnait plus, afin de rendre compte de la séparation territoriale, politique et idéologique des Arabes et des Juifs.
L’argument : Cartographie d’une ville. Portraits de Jérusalémites, d’un quartier à l’autre, d’Ouest en Est, en suivant tour à tour Shanit, Neda, Avraham, Akram et la famille Surkhi. Un mur qui sépare, étouffe des villages arabes, emprisonnant des familles qui perdent toute identité, empêche la circulation des ambulances... C’est une ville fragmentée qui se dessine, où les barrières se déplacent au fil des événements.
Notre avis : Asher Tlalim est quasiment inconnu en France, à l’exception de Don’t touch my holocaust, en 1992. En Israël, par contre, le nom de ce réalisateur prolifique (scénariste, monteur et réalisateur de plus de cinquante films sélectionnés dans de nombreux festivals) évoque dans les esprits une riche filmographie, témoin de l’histoire religieuse et politique d’Israël. Ayant par ailleurs conçu une série de dessins animés à la fin des années quatre-vingt, il est également connu des jeunes générations. Dans Puzzled Jerusalem, il questionne la réalité spatiale, politique, religieuse et stratégique de Jérusalem - ville au cœur des tensions israélo-palestiniennes et symbole religieux incontournable des religions monothéistes que sont le judaïsme, l’Islam et le christianisme. Son long-métrage s’ouvre et se cloture sur des séquences tournées avec un téléphone portable, dans lesquelles le cinéaste dévoile les bouleversements qu’il a connu au cours de la réalisation de son projet - provoquant immédiatement un lien entre l’histoire de la ville et la sienne propre.
Asher Tlalim aime Jérusalem et cela se voit. Tourné avec une petite caméra numérique, Puzzled Jerusalem crée immédiatement un effet de proximité avec la ville et les personnes qu’il présente. Ponctuant régulièrement son discours d’extraits de poèmes de Yehuda Amihaï qu’il a personnellement connu et qui a toujours passionnément défendu l’intégrité de la Ville Sainte, Asher Tlalim ne nous livre jamais un journal intime visuel. Au contraire, les interventions du réalisateur offrent un contrepoint humain et personnel au constat des tensions géopolitiques et sociales de Jérusalem qu’il nous expose.
Le long-métrage fonctionne sur un principe de séquences introduites par le nom d’une personne ainsi que le quartier où elle réside. Cette structure éclatée du film est à l’image de la cartographie de Jérusalem, séparée par des murs de pierres et des obstacles idéologiques. Le cinéaste se rend dans tous les quartiers de la Ville Sainte pour comprendre et saisir les conséquences nombreuses de cette partition. Au-delà de la séparation d’un territoire, on arrive à une dichotomie identitaire : des familles se retrouvent exclues de la ville alors qu’elles n’ont pas déménagées ou été expulsées. Les frontières changent en fonction des évènements politiques que connaît Israël. Des jérusalémites d’origine se retrouvent soudain sans terre véritable et surtout sans identité, celle-ci étant restée de l’autre côté du mur (avec bien souvent, une partie de leurs proches). En allant à l’est comme à l’ouest, tentant de traverser les barrages aux frontières des quartiers, Asher Tlalim témoigne de la réalité concrète et cruelle des populations palestiniennes continuellement agressées, voire niées.
Tout l’intérêt de Puzzled Jerusalem est de ne pas proposer un seul regard sur cette situation. Le cinéaste s’est ainsi rendu dans une section de l’armée israélienne à un barrage, s’attachant à une soldate afin de montrer également le travail des militaires et de capter la difficulté (ou non) de devoir traiter durement les populations civiles. Sans pour autant défendre l’idée que les soldats sont aussi des victimes, il expose le fait qu’eux aussi sont inclus dans un système qui les dépasse. Asher Tlalim ne reconnaît plus cette ville qu’il chérit, déchirée par les conflits religieux et politiques qui s’entremêlent et son long-métrage donne à voir la situation du conflit israélo-palestinien, concentré à Jérusalem, avec une grande lucidité et sans complaisance.
L’air au-dessus de Jérusalem est chargé de prières et de rêves comme l’air au-dessus des villes industrielles il est très difficile à respirer. Yehuda Amihaï (Ecologie de Jérusalem, 1980)
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