Critique : Lorsque Vincent rejoint ses copains ce soir-là, par une fin d’été à Nice, l’ambiance est lourde. La cité azuréenne est toujours marquée par le drame du 14 juillet, cette année là. Ses amis du lycée sont désormais pères de famille, mais l’amitié est toujours là. Cette nuit d’août 2016, les souvenirs alimentent la conversation après quelques verres : leur rencontre au lycée, les profs et la quête ultime, les premiers rencards.

Dans un style journalistique, simple et précis, Vincent Di Serio raconte une histoire d’adolescents qui pourrait être universelle. Au-delà de la simple succession d’anecdotes, il retrace les évènements marquants de cette décennie : les grèves de 1995 qui ont paralysé le pays, la coupe du Monde de football 98…et les fléaux de cette époque : le SIDA et le chômage de masse.

La réussite du livre tient à son rythme. Le lecteur assiste à cette soirée par flashbacks, selon les faits marquants de l’époque : la première cuite, les premiers râteaux et, surtout, les bases solides d’une amitié à très long terme. Ces adolescents font preuve de bienveillance et d’entraide autour de passions communes. L’auteur parvient à dépeindre les personnalités de ces camarades sans se perdre dans les détails. Elles transparaissent dans leurs actions, leurs réactions. Les moqueries sont douces et seul le fait d’être ensemble prévaut. Le lycée terminé, chacun doit suivre sa voie, la trouver, mais l’amitié demeure.

Nos années 90 n’est pas un livre de souvenirs mais celui d’une génération, dont les peurs et la société qui les portaient étaient différentes. Il s’agit d’une plongée dans l’humour et l’insouciance de la jeunesse, à travers les étapes qui façonnent les individus et un groupe, avec des échecs, des rebondissements, et finalement la vie qui l’emporte. C’est bien là tout le message de ce livre, écrit en pleine période de terrorisme. Grâce à son écriture, Vincent Di Serio donne le sourire, sans jamais tomber dans la nostalgie ou la mélancolie. En lisant ces tranches de vie, chacun repense à son adolescence, quelle que soit sa génération.

Dans une période où les contacts sociaux sont réduits, où la perspective même de partager un verre dans un bar semble relever d’une utopie, ce livre réconforte par la justesse de sa philosophie. Une lecture qui offre la perspective d’une chaleureuse soirée de souvenirs communs, où l’on s’attarde bien volontiers.