On dirait le sud
Le 30 juillet 2019
Qu’il s’agisse de la motivation des migrants, du deuil d’une mère ou, plus encore, de l’antagonisme entre le Maroc du nord et sud, le film passe à côté de tous les sujets auxquels il s’attaque.
- Réalisateur : Olivier Coussemacq
- Acteurs : Jalila Talemsi, Jamil Idissi, Assma El Hadrami
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Marocain
- Distributeur : Local Films
- Durée : 1h27mn
- Date de sortie : 7 août 2019
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Résumé : Naïma a élevé seule à Tanger ses trois fils. Deux déjà ont pris tragiquement le chemin de l’exil. Alors quand Hossein le dernier envisage à 16 ans de partir à son tour, elle invente un prétexte familial et l’entraine vers un village du sud du Maroc. Tenant désormais sa mère pour responsable de ses frustrations d’adolescent citadin, Hossein lui oppose une résistance sans merci.
Notre avis : « Le vrai Maroc, c’est ici ! ». Lorsque cette phrase est prononcée, au début du second tiers du film, le sujet de ce qui va suivre apparaît comme une évidence. Jusque-là, Olivier Coussemacq avait mis dans son viseur l’exil, une thématique déjà très exploitée, mais avec un point de vue relativement novateur, celui d’une famille explosée par ce phénomène migratoire. Deux frères, qui ont déjà vu leurs aînés partir en France, ainsi qu’une mère qui souffre de voir ses fils s’en aller l’un après l’autre. Là où le film offre une analyse intéressante, c’est essentiellement dans la façon dont Hossein et son frère perçoivent ce départ. Alors que le plus grand paraît résigné de devoir partir, contraint par une situation économique qui limite ses chances de trouver de l’argent à faire parvenir à sa mère de l’autre côté de la Méditérranée, le cadet fait preuve d’une certaine impatience, non pas de rejoindre une France idéalisée, mais de suivre fièrement les pas de ses frères. Deux façons d’appréhender ce voyage, que l’on n’a pas forcément l’habitude de voir depuis la France.
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En revanche, lorsque le scénario quitte la côte méditerranéenne pour se diriger vers le sud du pays, il apparaît que la problématique centrale sera désormais l’opposition entre versions urbaines et occidentalisées, et versions rurales, plus traditionnalistes, du Maroc. Et pourtant, hormis un accueil en berbère et ce fameux « Le vrai Maroc, c’est ici » de la part du cousin de Hossein, leurs mésententes culturelles ne sont pas mises en avant par le long métrage. Ces problématiques socio-culturelles auraient par exemple pu être traitées à travers un parallèle entre les motivations du cousin de partir vers le nord avec celles de Hossein et ses frères de rejoindre les côtes européennes, comme une allégorie d’une échelle sociale parfaitement illusoire.
Mais dès lors, l’enjeu romantique, avec les deux jeunes filles que Hossein rencontre et va essayer de charmer, devient l’élément principal, allant jusqu’à rendre secondaire pendant un long moment la relation qu’il entretient avec sa mère. Ce love-interest va atteindre son climax dans une scène tournée au milieu de linges à sécher. De quoi évidemment nous faire brièvement espérer une intensité digne de l’inoubliable Une Journée Particulière, mais qui se conclut bien rapidement par une agression belliqueuse, qui d’ailleurs est rendue visuellement inharmonieuse par un effet de ralenti malvenu. Une déception qui représente en soi assez bien ce que le film entreprend.
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Quelques plans parviennent néanmoins à atteindre une certaine qualité picturale, grâce à une photographie parfaitement maîtrisée, essentiellement lors des scènes de nuit. Mais malgré ces belles images, l’écriture n’accorde que trop peu de profondeur aux dialogues et surtout empêche Olivier Coussemacq d’aborder frontalement la question des différences entre Nord et Sud et surtout celle du rapport entre le fils et sa mère. Ce sujet ne reviendra, outre une scène de danse certes entraînante mais finalement assez dérisoire, sur le devant de la scène que dans les dernières minutes, correspondantes à leur retour à Tanger. Un épilogue qui paraît bien vite expédié au regard de la longue partie situé au sud, au cours duquel le sujet de la migration a été complètement passé sous silence. Seule la première partie parvient donc à remplir sa mission, alors que l’ensemble n’apporte que peu de grain à moudre aux pistes qu’il aborde, avec une superficialité des plus regrettables.
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